Arrivée par la mer pour s'épargner un accueil musclé prévu par les syndicats de la zone portuaire, Elisabeth Borne s'est rendue au Havre ce mardi 25 juillet afin d'aborder l'avenir du port et les nouveaux investissements qui devraient y être réalisés. Parmi eux : l'implantation d'une plateforme de biokérosène sur les docks.
Christophe Béchu (Transition écologique), Agnès Pannier-Runacher (Transition énergétique), Roland Lescure (Industrie), Edouard Philippe et la députée Agnès Firmin-Le Bodo : aux côtés d'Elisabeth Borne, ce mardi, plusieurs ministres, le maire du Havre et un nombre impressionnant de caméras.
Il faut dire que sa venue est attendue. D'un côté, par les dockers, qui ont cessé le travail de 11h à 15h, pour envoyer un dernier coup de pression contre la réforme des retraites. De l'autre, parce-que depuis la Nouvelle-Calédonie, Emmanuel Macron a désigné hier soir Edouard Philippe comme capable "de prendre le relai" dans la course à la présidentielle.
Pourtant, l'objet principal de la visite de la Première ministre au Havre portait d'abord sur un important chantier prochainement mené sur le port du Havre : l'implantation, par Engie, d'une plateforme de carburants alternatifs pour accélérer la décarbonation du transport maritime et aérien.
Deux projets distincts mais complémentaires
Engie déploiera ces projets gargantuesques, baptisés Salamandre et KerEAUzen, sur une parcelle de 23 hectares sur la zone havraise d'Haropa, établissement public qui a fusionné les ports du Havre, Rouen et Paris.
"Ces deux projets distincts mais complémentaires ont pour but de contribuer à la mise en place d'une plateforme de décarbonation de l'industrie aéronautique et maritime" sur l'axe de la Seine, a expliqué à l'AFP Sébastien Arbola, directeur général adjoint d'Engie.
Notre objectif est de renforcer encore la place d'Haropa comme porte d'entrée en Europe, et d'accélérer la décarbonation de notre transport de marchandises.
Elisabeth Borne
Le projet Salamandre, au budget d'1,2 milliards d'euros, permettra de fournir, dès 2027, 11 000 tonnes par an de bio-méthane de 2e génération pour les besoins du transporteur maritime CMA CGM, dans un secteur qui cherche à se décarboner en sortant du fioul et du gaz fossile.
Ce carburant renouvelable et bas carbone sera obtenu par "pyrogazéification", en chauffant à très haute température des déchets secs aujourd'hui non utilisables pour les transformer en gaz, en l'espèce des résidus de bois et des déchets solides de récupération.
L'autre projet, France KerEAUzen, évalué à 1 milliard d'euros, doit permettre, après une étude de faisabilité, de fournir 70 000 tonnes par an d'e-kérosène (carburant de synthèse bas carbone) à partir de 2030, principalement pour les besoins d'Air France.
Ce carburant sera fabriqué à partir de la combinaison d'hydrogène renouvelable et bas carbone produit par une unité d'électrolyse d'environ 250 MW, et de CO2 recyclé, dont les apports sont évalués à 270 000 tonnes.
Une enveloppe destinée à booster l'enseignement supérieur au Havre
Plus tard dans l'après-midi, Elisabeth Borne a pu signer le protocole de partenariat relatif au développement de l’enseignement supérieur du Havre, aux côtés d’Hervé Morin, président de la Région Normandie, et d’Édouard Philippe.
La Première ministre a annoncé une enveloppe de 20,4 millions d'euros (qui s'ajoutent aux 26,5 millions d'euros de la région et aux 26 millions d'euros du Havre Seine Métropole) pour la construction d’un bâtiment qui accueillera la plupart des formations de l’IUT du Havre, un nouveau campus de l’École Nationale des Arts et Métiers et un point de restauration du CROUS.
Un bâtiment de plus de 20 000 mètres carrés au total, construit, sur la presqu’île du quai Frissard, censé dynamiser le pôle universitaire du Havre.
Ce déplacement de la Première ministre au Havre devait en outre représenter l'occasion d'"illustrer la convergence de la réindustrialisation, du développement d'un territoire, et de la planification écologique", avait fait valoir Matignon lors d'un point presse, en amont de la visite.