Alors que la plus grande raffinerie de France à Gonfreville-l'Orcher (Seine-Maritime) et la raffinerie Exxon de Port-Jérôme-sur-Seine étaient à l'arrêt, des réunions avaient lieu ce lundi matin (10 octobre 2022) avec grévistes et syndicats avant un débat sur la suite du mouvement.
La mobilisation se poursuivait ce lundi matin dans les deux raffineries normandes, mises à l'arrêt suite à un grand mouvement de grève. Quelle suite à donner à ce mouvement ? Quelles négociations mener, et sur quel calendrier ? Avec quels engagements ?
Voilà quelques-unes des questions qui devaient être abordées ce lundi matin (10 octobre 2022) entre grévistes et syndicats, tant à Gonfreville-L'Orcher (Total) qu'à Port-Jérôme-sur-Seine (Exxon).
La veille, TotalEnergies avait proposé d'avancer à octobre ses négociations annuelles sur les salaires, répondant à la main tendue de la CGT, à condition que les blocages prennent fin dans les raffineries et dépôts de carburants.
Mais pour Eric Sellini, coordinateur CGT pour le groupe TotalEnergies, c'est à la base de décider comme il l'a indiqué à l'AFP :
"Tant qu'on n'a pas pris de position définitive avec les grévistes, qu'on n'a pas échangé avec eux, le mouvement va se poursuivre. On se réunit entre nous ce matin et ce midi, il y aura de vrais débats sur ce qu'on fait."
"Est-ce qu'on continue en attendant d'avoir une date et des engagements fermes ? Est-ce qu'on suspend le temps de la négociation ? Toutes les options sont sur la table, ce sera aux grévistes de trancher."
Eric Sellini, coordinateur CGT pour le groupe TotalEnergiesle 10 octobre 2022
La grève continue à la raffinerie de Normandie
Comme dans le dépôt de carburants de Flandres, près de Dunkerque et à la "bio-raffinerie" de La Mède (Bouches-du-Rhône), la grève a été reconduite à la raffinerie Total de Gonfreville-l'Orcher où, après l'assemblée générale du 10 octobre, environ 80 personnes ont voté à main levée la poursuite du mouvement, a constaté un correspondant de l'AFP.
Pour Alexis Antonioli, secrétaire général du syndicat CGT de la Plate-forme Total Normandie, la direction a fait du chantage en proposant d'avancer les négociations salariales prévues en novembre au mois d'octobre (sans donner de date précise), à condition que les raffineries et dépôts actuellement bloqués reprennent le travail :
"Le mouvement se poursuit malgré le communiqué de la direction. Pour le moment, elle se contente d'avancer la réunion sur les négociations annuelles obligatoires de 2023, les NAO, mais il n'y a pas de proposition concrète. On nous propose d'accepter un chèque en blanc, ce n'est pas acceptable."
Grève aussi dans les stations
Alexis Antonioli, a annoncé le début, ce mardi 11 octobre 2022, d'un nouveau mouvement de grève touchant cette fois-ci des stations Total :
"Le syndicat CGT Argedis, filiale de Total, appelle à un mouvement de grève à compter de demain dans les stations service Total. Ce sont des salariés maltraités et mal payés. C'est un marqueur fort de la mobilisation. Même ces salariés, isolés dans leur stations-service, s'emparent du mouvement"
Selon Thierry Defresne, le secrétaire CGT du comité européen TotalEnergies, joint par l'AFP, cette grève va toucher des stations près de Rouen, en région parisienne et dans la région de Strasbourg et aussi sur autoroutes, "les stations de Paisy (A6, Rhône), Montluel (Ain), Ceignes (autoroute A40, Ain), et Lançon-Provence (A7, Bouches-du-Rhône).
Plus de 20 jours de grève à ExxonMobil
A Port-Jérôme-sur-Seine, même scénario qu'à Gonfreville puisque du côté d'Esso-ExxonMobil, la grève a été reconduite tôt dans la matinée de ce lundi, en attendant d'en savoir plus sur la réunion prévue par la direction avec les syndicats dans la journée.
Avant cette réunion, Raynald Prévost, coordinateur syndical FO d'Exxon Mobil, a expliqué à notre journaliste Claire Schaffner les revendications des grévistes :
"Au 21e jour de grève, on réclame une augmentation générale de 6%, une augmentation individuelle de 1,5%, un plafond à 170 euros et une prime pour la répartition des richesses de 6000 euros. Aujourd'hui la direction nous propose 5% d'augmentation générale, une augmentation individuelle des premiers salaires de 0,5%, une prime de 3000 euros et un plafond de 125 euros. Ce n'est pas suffisant parce que cela ne couvre pas l'inflation et vu les profits exorbitants qu'a fait Exxon Mobil au premier semestre, les salariés veulent donc leur part du gâteau !"
Concernant ces revendications, la direction d'Esso France rappelle, dans un communiqué en date du 9 octobre, qu'une réunion de négociation salariale pour 2023 a eu lieu le 20 septembre, et que "cette négociation a débouché sur une proposition qui a depuis été améliorée et qui s'articule autour d’une évolution globale des salaires entre le 31 décembre 2022 et le 31 décembre 2023 de 6,5 % et d'une prime de partage de la valeur de 3 000 € (hors participation et intéressement). Cette proposition a pour l’instant recueilli la signature de l’organisation syndicale CFE-CGC."
Esso France, qui appelle à la responsabilité et au dialogue social pour la fin du blocage, précise qu'avec cette proposition, "la rémunération mensuelle moyenne d’un opérateur de raffinerie, hors participation et intéressement, qui est de l’ordre de 4 300 € par mois toutes primes comprises, se trouvera donc ainsi améliorée." Et que "par ailleurs, la somme de la participation et de l’intéressement versés en 2022 a représenté un montant compris entre 1 850 et 3 350 € par salarié."
Des syndicats ouverts à la négociation
Quant à un éventuel arrêt de la grève, le responsable syndical FO indiquait que les 4 organisations syndicales représentatives réunies à 11h étaient ouvertes à la négociation avec la direction :
"La plate-forme complétement arrêtée pendant 3 semaines, on a jamais vu ça dans la société. Donc on essaie d'être optimiste, on espère vraiment se sortir de tout ça, parce que, pour tout le monde, il faut une porte de sortie à un moment ou à un autre."
Pas d'entente avec la direction
Après avoir rencontré la direction, et ne pas avoir obtenu satisfaction, grévistes et syndicats débutaient à 14h une assemblée générale pour décider de la suite à donner au mouvement.
Lors de la réunion, la direction d'Exxon a proposé aux syndicats, comme seule avancée nouvelle, une "prime de mobilité durable" de 750 euros à chaque salarié pour faire face à la hausse du coût de l'énergie.
"Cela n'a absolument pas convaincu les salariés" a déclaré Raynald Prévost, coordinateur syndical FO d'Exxon Mobil, et qui prévient que le mouvement risque de durer.
"D'après ce que disent les salariés, la grève va durer. Donc malheureusement, cela va recréer encore plus de problèmes au niveau des stations-service et tout, parce que nous on n'est pas prêts de reprendre pour l'instant !"
Raynald Prévost, coordinateur syndical FO d'Exxon Mobil à Port-Jérôme-sur-Seinele 10 octobre 2022
La grève reconduite
A Port-Jérôme-sur-Seine, sur le site de Gravenchon, la grève a été finalement reconduite, ainsi qu'à Fos-sur-Mer, où se trouve l'autre raffinerie française d'Exxon Mobil (Esso). La réunion avec la direction s'étant révélée "non-concluante", a indiqué à l'AFP, sans plus de précisions, Christophe Aubert le délégué syndical central CGT.
A Gonfreville les représentants syndicaux CGT et FO déclaraient qu'après la réunion infructueuse avec la direction, ils restaient en permanence disponibles "pour continuer la négociation et pour sortir de là!"