Ce jeudi 12 décembre, la CGT appelait à des manifestations partout en France pour "défendre l'emploi et l'industrie". Dans notre région, le secteur industriel représente 21 % des emplois salariés, mais depuis deux ans, les plans sociaux s'enchaînent.
"Plus de 200 000 emplois directement ou indirectement menacés" en France. En cette mi-décembre, la CGT tire la sonnette d'alarme. "Les vagues de suppressions d'emplois se multiplient et impactent durement la France." Pour répondre à cette alerte, le syndicat organisait une journée de mobilisation ce 12 décembre.
Une journée marquée, en Bourgogne, par la mobilisation des salariés de Valti à Montbard et de PPG Seigneurie à Genlis, deux entreprises en voie de fermeture... et où respectivement plus de 100 salariés risquent de perdre leur emploi. Et cette situation est loin d'être isolée. Tour d'horizon.
De nombreux plans sociaux en Bourgogne ces derniers mois
Pour avoir une vision plus globale, il faut se tourner vers la Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DREETS) de Bourgogne-Franche-Comté. Dans ses conjonctures économiques trimestrielles, elle recense le nombre d'emplois menacés par secteur. Depuis le début de l'année 2023, 2 190 emplois industriels ont été menacés dans la région.
De notre côté, en deux ans, nous avons recensé 16 plans de licenciements dans la région.
Janvier 2023 : 151 emplois supprimés à Place du Marché
Dans le secteur des produits surgelés, l'entreprise Place du Marché, autrefois appelée Toupargel, était une pionnière. Lancée en 1969, elle devient leader du marché après son rachat en 1982. Puis, petit à petit, elle se développe jusqu'à compter 3 500 salariés et un million de clients en 2003. Mais avec l'arrivée de nombreux concurrents, les ventes baissent inexorablement.
L'entreprise est rachetée en 2019 par les frères Bahadourian, mais ceux-ci ne parviendront jamais à relancer l'activité. En janvier 2023, Place du Marché est placée en liquidation judiciaire. 1 900 salariés se retrouvent sans emploi, dont 151 à Saint-Marcel (Saône-et-Loire). "Je suis révoltée. Après 21 ans de boîte, je suis mise à la porte sans rien : ni prime supra-légale, ni indemnités, ni prime", explique une employée.
Juillet 2023 : 230 emplois supprimés à CEAT à Longvic
Les difficultés du groupe Centre Électronique de l’Audiovisuel et des Transmissions (CEAT) sont connues depuis 2019. Le chiffre d'affaires de cette entreprise, basée à Longvic (Côte-d'Or), avait alors baissé de plus de la moitié par rapport à l'année précédente. Malgré des efforts, elle n'était pas parvenue à se redresser.
En janvier 2023, le tribunal de commerce de Dijon place CEAT en redressement judiciaire. Six mois plus tard, l'entreprise est liquidée. 230 personnes perdent leur emploi. "Pour Samsung, on n'est rien. On a fait ce qu'ils nous ont demandé, et maintenant c'est 'salut !'", explique un ex-salarié à nos micros. Samir Abbou, représentant des salariés, ajoute : "Beaucoup sont au bout du rouleau."
Septembre 2024 : 160 emplois supprimés à Easydis
En mai 2024, le groupe Casino, qui vient de changer de mains, annonce un vaste plan de restructuration. L'entreprise prévoit 1 293 suppressions de postes au sein des fonctions sièges du groupe et 740 au sein de sa filiale Easidys. Quatre entrepôts sont concernés : Toulon, Limoges, Gaël et Besançon, où 160 personnes sont employées.
"À Besançon travaillent des femmes, des hommes, pas mal d’anciens. Ça va être très compliqué", estime alors à nos micros Michael Vidal, délégué syndical Force Ouvrière de l'entreprise. Le 19 septembre 2024, l'entrepôt situé dans le Doubs ferme ses portes.
Octobre 2024 : 130 emplois supprimés chez Bayard
Bayard Habillement est un géant du prêt-à-porter pour homme. Née en 1925 à Villeurbanne (Rhône), l'entreprise est connue pour avoir habillé des stars françaises telles que Serge Gainsbourg, Claude François ou encore Johnny Hallyday. Mais la crise du Covid a durement impacté son chiffre d'affaires, qui est passé de 22 millions d'euros en 2019 à 15 millions en 2024.
Basée à Quetigny (Côte-d'Or), l'entreprise est d'abord placée en redressement judiciaire. Puis, le 1er octobre, nos confrères de France Bleu Bourgogne rapportent que le tribunal de commerce de Dijon prononce sa liquidation judiciaire. Le 5 octobre, les magasins ferment, laissant 130 salariés sans emploi.
Pour la profession, une situation qui "stagne"
Interrogée sur ce nombre de plans de sauvegarde de l'emploi (PSE), Véronique Guillon, déléguée générale de l'Union des Industries et Métiers de la Métallurgie (UIMM) de Côte-d'Or, estime que la situation dans le département est stagnante. "Certains secteurs, comme le nucléaire, se portent bien, tandis que d'autres, comme la mécanique, rencontrent plus de difficultés."
Selon elle, cette situation s'explique par deux paramètres. L'instabilité gouvernementale, qui "freine les investissements et rend la projection difficile," et les longueurs de paiement, qui "impactent de nombreuses parties des entreprises. Aujourd'hui, on voit des délais de paiement tellement longs que cela freine les trésoreries."
Pour tenter de résoudre ces situations et d'atténuer l'impact pour les salariés, l'UIMM collabore avec l'ensemble des services de l'État. "Dans le cas de Valti, nous travaillons en amont pour identifier les entreprises qui recrutent et essayer d'adapter nos formations potentielles aux offres de postes dans le secteur."