Près de Rouen, une mobilisation contre le projet d’une énorme sucrerie

Le sucrier AKS a été retenu par Haropa (groupement des ports de Paris, Rouen et le Havre) pour s’installer sur la friche industrielle de Moulineaux (Seine-Maritime), dans les boucles de la Seine. Le projet, qui devrait voir le jour en 2025, a déjà ses détracteurs. Explications.

C’est une bonne nouvelle pour certains et une catastrophe pour d’autres. En 2025, une immense usine de transformation de betteraves devrait ouvrir près de Rouen. Installée sur une friche industrielle basée à Moulineaux, le site devrait produire du sucre et du bioéthanol.

C’est le sucrier AKS, basé aux Emirats Arabes Unis, qui a été choisi par Haropa. 300 emplois devraient être créés d’ici 2025. Si certains se réjouissent de l’arrivée de cet industriel, d’autres dénoncent les effets secondaires d’un tel site notamment sur le plan environnemental.

La Normandie, terre de betteraves

Avec son climat, la Normandie est parfaite pour la culture de la betterave. Depuis des décennies, elle est cultivée sur les terres normandes pour être transformée en sucre. Depuis la fermeture du site de Cagny, la filière est en souffrance. Avec l’annonce de l’arrivée de cette immense sucrerie en Seine-Maritime, tous les protagonistes se réjouissent de la reprise de l’activité. Les paysans normands, notamment ceux du Calvados, pourraient être amenés à fournir les deux tiers des 4,5 millions de tonnes de betteraves nécessaires au fonctionnement du site qui comprendra également une chaudière biomasse et un biométhaniseur pour produire sa propre énergie.

Si l’usine voyait le jour, elle nécessiterait la mise en culture de 50 000 hectares supplémentaires dans la région pour répondre aux besoins alimentaires et énergétiques. Pour l’agglomération rouennaise, 300 emplois directs et plus de 1 000 emplois indirects pourraient être créés.

Du sucre et du carburant

650 000 tonnes de sucre destinées à l’export seraient produites chaque année dans l’usine normande. AKS veut également installer une raffinerie pour produire du bioéthanol. Certains agriculteurs estiment que leur rôle est de produire de l’alimentation et non du carburant. Ils pointent du doigt également un mode de production très polluant : « pour produire ce carburant on a besoin de carburant ! Et ce carburant c’est le pétrole. Ces betteraves vont être acheminées vers l’usine par camions qui vont parcourir en moyenne 150 kilomètres. C’est un camion par minute qui va emmener les betteraves dans cette usine pendant une centaine de jours, la durée de la récolte de la betterave », déplore Stéphane Bourlier, Président de la Confédération Paysanne du Calvados.

La pollution engendrée par le trafic des camions est également un des arguments de l’association de défense des Berges de Seine (ABDS) qui a lancé une pétition contre ce projet. Sur le site change.org elle détaille ses arguments.

Mobilisation à Rouen

Pascal Magoarou de l'ABDS était sur les quais de Rouen ce mardi 26 avril 2022 avec d'autres membres pour faire entendre leurs voix : 

Ce projet d'énorme sucrerie est une aberration économique et écologique : depuis toujours on a mis les sucreries au plus près des champs de betteraves car la betterave est constituée à 90% d'eau et seulement 10% de sucre et les déchets des légumes retournent dans les champs.

Pascal Magoarou, membre de l'ABDS

"Là, on va avoir un camion par minute durant les 100 jours de récolte ce qui va produire des gaz à effet de serre qui va gêner la population. C'est une aberration de faire une sucrerie dans un site classé. D'un point de vue économique, il y a une surproduction mondiale de sucre depuis la fin des quotas. En 2020, deux sucreries ont fermé en Normandie : une dans le Calvados l'autre dans l'Eure. Le seul intérêt pour l'industriel, c'est d'être à proximité d'un port pour importer du sucre brut venu d'Inde ou de Brésil et d'arroser ensuite le marché européen et mettre ainsi en danger les sucreries existantes localement".

AKS en attente de validation

Dans un article du Parisien, Pascal Gabet, le directeur général délégué d’Haropa, précise qu’« il reste encore de nombreuses étapes avant la concrétisation de ce projet qui est sur de bons rails. La prochaine étape consistera pour AKS à déposer un dossier afin d’obtenir les autorisations indispensables à son installation auprès des services de l’Etat ».

Il ajoute qu’Haropa accompagnera l’industriel venu de Dubaï dans ce cheminement, tout en réalisant les investissements nécessaires qui comprendront notamment le raccordement du site au réseau ferroviaire normand pour y acheminer une partie de la matière première.  

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