Trafic de drogues à Canteleu : on vous explique pourquoi le procès de l'ex maire Mélanie Boulanger a (encore) été retardé

Lundi 3 juin 2024, le procès de l'ex maire de Canteleu avec 18 autres prévenus, dont son adjoint au commerce Hasbi Colak, a été de nouveau retardé au mardi 4 juin 2024. Voici pourquoi.

Le procès de l'ex-maire de Canteleu (Seine-Maritime) Mélanie Boulanger (PS), jugée avec 18 autres prévenus pour un vaste trafic de drogue dans sa petite ville de Seine-Maritime, a de nouveau été retardé ce lundi 3 juin 2024 par le tribunal correctionnel de Bobigny à la demande des avocats, après un premier faux départ à son ouverture il y a une semaine, en raison d'un pourvoi en cassation.

Des pourvois en cassation retardent le procès

Trois prévenus - Camel B. Mohammed M. (tous deux en détention provisoire) et Adyl M. (contrôle judiciaire) - avaient formulé un pourvoi en cassation suite à l’arrêt de la chambre de l’instruction du 22 mai rejetant leur demande d’annulation de certaines pièces du dossier.

C’est ce pourvoi qui avait entraîné la suspension du procès le 27 mai en attendant que la Cour de cassation se prononce sur la recevabilité. Dans son ordonnance du 31 mai, la Cour de cassation a rejeté les requêtes des trois prévenus estimant que les pourvois n’étaient pas immédiatement recevables.

Mais les avocats des trois prévenus ont demandé un délai supplémentaire pour consulter l’ordonnance de la Cour de cassation (dont ils ont pris connaissance ce lundi 3 juin, au matin, à la lecture en ouverture d’audience) et préparer leur défense.

Plusieurs avocats ont sollicité une suspension de 72 heures. Me Leberquier, avocat de Mohamed M.,  assure que ce délai n'est pas destiné à "emmerder la cour ou tenter d'enrayer la machine". "Tant que je porterai cette robe-là, je m'en ficherai des agendas. Des principes sont en jeu", clame-t-il.

De son côté, l'avocate générale dénonce ces jeux de renvois et de suspensions qui "paralysent" la cour et plaide pour le refus de cette suspension de 72 heures, craignant notamment que les trois prévenus actuellement en détention provisoire (Montacer Meziani, Camel B. Mohammed M.) ne soient libérés si les délais se rallongent... Les trois hommes sont en détention provisoire jusqu'au 13 juillet maximum.

"Le réquisitoire de Mme la procureure de la République est truffé de rappels à des pièces qui ne devraient pas se trouver dans le dossier", note Me Fabien Picchiotino, avocat de Ethem T ., sous contrôle judiciaire. Ce dernier évoque notamment des enregistrements qui ne peuvent pas être exploités en raison "d'irrégularités" et qui ont donc été annulés et ne peuvent constituer des preuves.

Plusieurs avocats réclament simplement le renvoi du dossier pour régularisation au juge d'instruction. 
C'est le cas de l'avocate de Fouzia Meziani, la sœur des deux têtes du réseau.

Après s'être retiré pour délibérer, le tribunal a décidé de rejeter la demande de suspension et de renvoi. Le procès va démarrer le mardi 4 juin 2024. Et les débats auront lieu du 20 au 24 juin. La personnalité des prévenus et des témoins sera examinée le 19 juin.

Un dossier tentaculaire

Fruit de deux ans d'enquête, le tentaculaire dossier de Canteleu, commune populaire de 14 000 habitants de l'agglomération de Rouen, illustre l'enracinement et la puissance grandissants des narcotrafics dans des petites et moyennes villes en France, dont s'inquiétait le mois dernier un rapport du Sénat.

Élue maire en 2014 et figure du socialisme normand, Mélanie Boulanger est soupçonnée d'avoir fait pression sur les services de police pour qu'ils ne gênent pas les affaires du redoutable clan Meziani, réputé pour tenir le trafic de stupéfiants dans sa ville et y faire régner la terreur.

Aux côtés de l'ancienne maire - elle a démissionné en début d'année -, le tribunal de Bobigny doit entendre pendant tout le mois de juin les principaux acteurs présumés du réseau: les têtes, leurs lieutenants, des fournisseurs et des blanchisseurs.

L'affaire avait débuté en septembre 2019 avec l'arrestation sur un parking de Saint-Denis de deux individus procédant à une transaction de drogue.

L'un était porteur de 50 000 euros en liquide, l'autre de deux kilos de cocaïne pure à 80%. Les investigations sur l'acheteur avaient rapidement amené les policiers de Seine-Saint-Denis à Canteleu, base de la famille Meziani, soupçonnée d'être l'un des principaux acteurs du trafic de drogue en région rouennaise.

Cannabis, héroïne, cocaïne

Selon l'enquête, la fratrie a soufflé le chaud et le froid sur l'élue, via son adjoint au commerce Hasbi Colak, également poursuivi.

L'enquête, riche en sonorisations et en écoutes, a mis au jour un important réseau d'importation et de vente de stupéfiants, aussi bien de cannabis que d'héroïne et de cocaïne.

Selon les estimations des policiers, leur organisation a engrangé plus de 10 millions d'euros de bénéfices annuels rien que pour la cocaïne et l'héroïne.

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