Le nord du département de la Charente est devenu, en 15 ans, un territoire parsemé d’éoliennes. De nombreuses associations militent contre leur implantation et alertent contre les problèmes liés à ces machines de plus en plus imposantes.
Cinquième région éolienne de France, avec 52 % de ces mâts implantés dans les Deux-Sèvres et la Charente-Maritime. Le département de la Charente n'est pas épargné par le projet d'installations d'éoliennes. Dernièrement, un dossier vient d’être validé par la préfecture de Charente, dans la commune de Chasseneuil-sur-Bonnieure, avec des conséquences sur le paysage.
Des éoliennes qui passent de 180 à 200 mètres
Certaines associations locales n’en reviennent toujours pas, quatre éoliennes seront prochainement installées ici. Ce qui dérange le plus ces militants associatifs, ce sont les dimensions des machines, revues très à la hausse. "Quand l’autorisation a été donnée, on avait des éoliennes de 180 mètres avec des pales de 60 mètres", explique Gery Lepoutre, membre de l'association Charente Limousine Environnement. "Finalement le dossier sorti il y a quelques jours, les éoliennes sont passées de 180 à 200 mètres. Ce n’était pas dans ce dossier modificatif."
Ce militant fustige cette décision : "Pour se donner une idée, on va avoir quatre tours Montparnasse, mais sans emploi. Est-ce que l’on va aller au bout de cette opération ? Je n’en sais rien. On a quand même de gros changements par rapport à l’autorisation d’origine. Est-ce que c’est acceptable d’avoir quelque chose en pleine vue ? Cela va engendrer également une baisse de la valeur de leur logement."
Des conséquences sur le paysage
Selon l’association Charente Limousine Environnement, ces éoliennes auront un impact sur le paysage. Elles sont visibles depuis le mémorial de la résistance, dont le classement au monument historique est imminent. Le business du vent n’a jamais autant fait polémique en Charente, ces dernières années. Selon les différentes associations qui luttent contre leur implantation, il y en aura environ 500 en fonctionnement, en cours de projet ou de validation sur tout le secteur nord du département.
Cependant, des projets se heurtent aux décisions de justice. Récemment, la cour d’appel administrative de Bordeaux vient d’invalider de nouvelles implantations près de Ruffec en expliquant que "la saturation visuelle pour les éoliennes est avérée depuis plusieurs points et notamment depuis les villages de La Faye et Raix. L’implantation du projet, même réduit à trois éoliennes, serait de nature à favoriser un phénomène de saturation visuelle, portant ainsi atteinte à la commodité du voisinage."
"On va vivre dans une forêt d'éoliennes"
"C’est une des premières décisions de justice qui concerne la commodité du voisinage. La cour a vraiment pris conscience de la pression exercée par les promoteurs, sur les habitants", affirme Xavier Mathieu, membre de l'association Stop Éolien 16. "Et en plus, elle a considéré que ce préjudice était non régularisable. La cour a estimé que le préjudice était valable dans un rayon de 5 km et 10 km. J’imagine que pour d’autres projets, cela a déjà eu lieu dans d’autres parties de la France où cette notion de saturation visuelle commence à être prise en compte."
"On a l’impression que notre avis ne compte pas vraiment. Le fait que l’on est enfin un projet qui soit annulé par rapport à cette saturation sur notre territoire, c’est très important", ajoute Jean-Jacques Vrignon, vice-président de la communauté de communes Val de Charente. "On va espérer que cela crée un précédent. Je suis vice-président en charge du cadre de vie : cadre de vie, c’est quand même un mot important dans nos campagnes. Préserver un cadre de vie avec des éoliennes qui fleurissent partout, c’est relativement compliqué. Aujourd’hui, la saturation fait que notre cadre de vie est massacré. Au final, on va vivre dans une forêt d’éoliennes."
Reportage de Bruno Pillet et Cécile Landais :
Sur le territoire métropolitain français, on compte plus de 8 000 éoliennes en fonctionnement. L’État envisage de doubler ces implantations dans les années à venir.