Alors qu'ils entamaient ce vendredi 15 mars au matin une quatrième opération de mobilisation, le collectif de viticulteurs Viti 33 en Gironde, dénonce les menaces de la direction de Lidl, qui voudrait retirer tous les vins de Bordeaux de ses magasins. Le Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux annonce l'organisation prochaine d'une table ronde.
"Ils n'en ont rien à foutre de nous." Comme tous les membres du collectif Viti 33, Didier Cousiney, n'en revient pas. "Le patron de Lidl a appelé les dirigeants du Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux pour les menacer de ne plus acheter de bouteille", explique le porte-parole, incrédule. Alors que ce vendredi 15 mars, une cinquantaine de vignerons bloquent le site de la maison de négoce Raymond, à Allias, cette annonce pèse comme une menace sur le collectif. "On nous met le couteau sous la gorge."
"Faux" répond Lidl ce vendredi 15 mars. "Nous continuerons de vendre des vins de Bordeaux, car la demande des consommateurs est bien présente", indique la communication de l'enseigne alimentaire.
Du vin de Bordeaux à 1,89 euro
"Non aux prix qui nous tuent." Le slogan est porté depuis plusieurs semaines par les viticulteurs girondins après la découverte du prix affiché pour les bouteilles de vin de Bordeaux dans les magasins Lidl à 1,89 euro. "C'est dévalorisant pour l'appellation Bordeaux", scande le porte-parole de Viti 33.
Lidl représente 7% du marché de la grande distribution et ne peut, à sa mesure, porter la responsabilité de pratiques de l’ensemble des acteurs.
Direction de Lidldans un communiqué
Des tarifs pratiqués dans d'autres enseignes, selon Lidl, qui regrette une chasse aux sorcières à leur encontre. "Nous sommes pointés du doigt alors même que des vins de Bordeaux sont proposés à des niveaux de prix identiques, voire inférieurs chez certains de nos concurrents. Ce prix est positionné par rapport au marché", précise la communication de l'enseigne, qui rappelle qu'il s'agissait d'une opération promotionnelle dans le cadre de la Foire aux vins de Printemps.
La mobilisation de ce vendredi 15 mars est dans la même continuité, mais les menaces de la direction de l'enseigne viennent renforcer un climat déjà tendu. "Nous, on demande juste un prix rémunérateur pour vivre de notre métier et dès qu'on les tape un peu, ils réagissent comme ça."
Tout le monde est incrédule d’avoir appris ça, c’est lamentable d’avoir une réaction pareille, c’est indigne de sa part.
Didier Cousineyporte-parole Viti 33
Selon le Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux, la réaction du patron de Lidl aurait été faite "à chaud", après "des débordements de viticulteurs sur des bases logistiques", huit jours plus tôt. "Nous sommes conscients du profond désespoir dans lequel beaucoup de viticulteurs sont plongés. Pour autant, nous ne pouvons pas cautionner les débordements constatés lors des actions menées ces derniers jours chez des négociants de Bordeaux ou des distributeurs", réagissait le CIVB dans un communiqué diffusé le 12 mars. "Le CIVB et ses deux composantes, vignerons et négociants, sont au travail et ont à cœur de répondre aux enjeux de la crise et de l'actualité. "
Une table ronde
Pour répondre à la détresse agricole, le Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux a annoncé la mise en table d'une table ronde à la fin du mois de mars. Doivent se réunir le Préfet de Gironde et de Nouvelle-Aquitaine, les acteurs de la distribution, ceux du négoce, de la viticulture, du courtage, les syndicats agricoles (FDSEA, Jeunes Agriculteurs de la Gironde, Confédération paysanne, Coordination rurale) et le Collectif Viti 33. "Le patron de Lidl a par ailleurs indiqué être favorable à l'ouverture de cette discussion", précise le CIVB.
Nous avons écrit au Premier ministre pour participer aux travaux à venir sur les lois EGALIM dans le but de renforcer le poids des agriculteurs dans les négociations commerciales et donc d’améliorer leur revenu.
Conseil interprofessionnel du vin de Bordeauxcommuniqué
De son côté, la direction de Lidl confirme leur participation à une table ronde, sous conditions. "Nous avons accepté de prendre part à une table ronde à la condition que les autres distributeurs y participent également", précise la communication de l'enseigne alimentaire.
"Nous voulons seulement nous mettre autour d'une table pour que le viticulteur puisse vivre de son métier, insiste Didier Cousiney, porte-parole de Viti 33. Pour un consommateur, acheter la bouteille 60 centimes supplémentaires ne changera rien. Ce qu'on demande n'est pas déconnant, ce serait le grand minimum."