"J'ai peur d'oublier mes mots" Des lycéens se lancent dans un concours d'éloquence

En Aquitaine, le concours d'éloquence du réseau d'associations RADSI récompense chaque année un groupe de lycéens issus des filières professionnelles. Deux équipes des lycées Bel Orme de Bordeaux, en Gironde, et Lot et Bastides de Villeneuve-sur-Lot (47) y ont participé. Plus qu'une aventure, une véritable métamorphose.

Les yeux rivés sur leurs fiches, le stress dans la voix. À quelques minutes des phases de sélection du concours d'éloquence lancé par le réseau d'associations RADSI, la pression monte dans les couloirs du lycée Bel Orme à Bordeaux. "J'ai l'habitude de passer devant les gens, mais ça fait peur quand même." 

Dépasser les clichés

Pour la première fois, Clara Male et ses camarades vont déclamer leur texte devant le jury, après plusieurs mois de travail. Une opportunité aux allures de grand saut pour ces jeunes filles en filière accompagnement, soins et services à la personne.

Au lycée Lot et Bastides à Villeneuve-sur-Lot, c'est Emmanuel Capo qui a encouragé ses élèves à s'investir dans l'éloquence : "La plupart ont des vécus souvent difficiles, ils ont déjà eu une vie un peu cabossée quand ils arrivent en classe de Première. Si on est trop brusques ou directifs, on n'obtient rien." La professeure de lettres et d'histoire-géographie veut leur faire ce cadeau : laisser leur parole s'exprimer.

Les lycéennes, elles, veulent la saisir, comme pour dépasser ces clichés : Les lycées professionnels sont réputés pour être moins intellectuels, regrette Lyana Miranda, élève en Première à Bordeaux. Mais on va montrer qu'on n'a pas besoin d’être en filière général pour prendre la parole. 

La plupart des élèves ont des vécus difficiles. Je veux leur faire ce cadeau de la prise de parole.

Emmanuel Capo

Professeure au lycée Lot et Bastides

Quel monde pour 2030 ?

Casser les codes, et évoquer des sujets qui leur tiennent à cœur. Cette année, les lycéens ont planché sur le thème de leur choix, guidé par une question : "Quel monde pour 2030 ?" Un appel à leurs convictions, leurs espoirs et leurs préoccupations.

Lyana et son groupe ont choisi les violences sexuelles. Elles évoquent un enfant, une jeune femme, un policier, brandissent un body, un chemisier, un uniforme. Avant d'enchaîner en cœur : Pensez-vous toujours que la tenue justifie le viol ?

Leur discours engagé retient l'attention des jurys. Deux groupes de chaque établissement se qualifient pour la demi-finale à Agen. Comme Hanaé, Chloé, Julie et Jackie, lycéennes à Villeneuve-sur-Lot.

"Avant, j'étais une fille réservée"

"J'ai peur d'oublier mes mots", lâche Chloé, avant son discours pour dire stop à la violence sur le conflit israélo-palestinien. Quelques minutes plus tard, les doutes ont laissé place à l'aplomb. Devant les autres concurrents, elles assènent leurs derniers mots, comme un coup de poing : "Nous vous parlons d'un sujet clivant. D'un sujet urgent." Dans leurs voix, des heures de travail, de répétition pour s'accepter, dire oui à leur légitimité. 

Les équipes de Bel Orme et de Lot et Bastides s'arrêtent en demi-finale. Une pointe de déception, mais beaucoup de fierté dans les yeux de Sarah Baudouin, l'une des professeures bordelaises : "Elles ont tout donné, elles se sont surpassées. Il y a beaucoup de déception, on va digérer ça et repartir pour une nouvelle année. On n’a pas dit notre dernier mot.

Et Jackie a gagné son pari.

Avant, j'étais une fille réservée et là, j'arrive à aller devant les gens, à mieux m'exprimer. Je suis fière de moi, parce que j'ai vu une vraie évolution.

Jackie,

lycéenne participante au concours d'éloquence

"Les chemins de l'éloquence", une série à suivre toute la semaine sur France 3 Aquitaine.

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