Le verdict a été prononcé dans la soirée de vendredi 23 septembre et il est accablant pour l'accusé Claude Alonso qui se faisait appelé "Zeus". Les assises de la Gironde ont condamné l'octogénaire à dix huit ans de prison assortie de neuf ans de peine de sûreté pour abus de faiblesse sur cinq femmes et trois viols.
"'Zeus' n'est qu'un grand manipulateur pervers et narcissique". Pour ce cinquième et dernier jour du procès de Claude Alonso, dit "Zeus", l'avocat général Xavier Chavigné n'y est pas allé de main morte. Il a requis dix-huit ans de réclusion criminelle contre cet octogénaire, accusé d'abus de faiblesse sur cinq femmes et de trois viols sur trois femmes, dont sa propre fille, à Gujan-Mestras. Le verdict, prononcé vendredi soir, est même plus lourd : les dix-huit ans de réclusion criminelle sont assortis d'une peine de sûreté de neuf ans.
Tout au long de sa réquisition longue de 1h15, Me Chavigné est revenu devant la cour d'Assises de Gironde sur les éléments constitutifs de l'infraction. Pendant plusieurs années, ce "gourou" a constitué une véritable secte dans laquelle plusieurs femmes étaient sous son emprise.
Des viols "corps et âmes"
L'avocat général a dépeint le portrait d'un homme qui violait "corps et âmes" ses victimes. Dans son "temple", "Zeus" figurait sur un trône rouge en bois perché sur une mezzanine. Ses "pensionnaires" assises autour de lui rappelaient une fresque des déesses de l'Olympe entourant Zeus, exposée au mur de la salle.
Au bout de la nuit - et après avoir distillé aux femmes sous son emprise un mélange de Lexomil, vin, sperme et sang menstruel -, Claude Alonso avait des rapports sexuels avec l'une d'entre elles. Ces rapports sexuels forcés constituaient des "travaux", selon son langage. Si elles n'obéissaient pas aux caprices de l'autoproclamé dieu, "Zeus" déclenchait un "Code rouge", avec pour conséquence "le malheur de l'humanité".
►Voir le reportage sur le verdict diffusé le 24 septembre 2022 :
"Les barbelés sont dans la tête"
"La réalité dépasse la fiction, a rétorqué Me Frugier, avocat de Noura Bouras, l'une des deux plaignantes présentes vendredi. Le seul code rouge est celui avec lequel vous allez être jugé, c'est le Code Civil". Les victimes de "Zeus" avaient en commun une certaine fragilité du fait, par exemple, d'une enfance difficile.
"Cette partie civile vient de la DDASS, vivait dans une caravane. Elle qui avait faim, on l'a nourrie, mais à quel prix ?"
Maître Frugier, avocat de Noura Bourasdevant la cour d'Assises de Gironde
"Si Claude Alonso accueille des personnes fragiles, c'est pour se constituer un terrain de chasse avec des proies faciles", a poursuivi l'avocat général. "Pour ces victimes, il n'y a pas besoin de séquestrer les gens pour les enfermer", a exprimé Me Frugier. Et l'avocat de Noura Bouras de citer Daniel Zagury, un expert-psychiatre intervenu mercredi par visio-conférence : "Les barbelés sont dans les têtes".
L'autre plaignante présente, Vanessa Alonso, fille de "Zeus", était représentée par Maître Picotin. "Elle a su que son père avait des défauts dès 11 ans, quand il s'est glissé dans son lit", a détaillé l'avocat. Après avoir coupé les ponts, la jeune fille s'est rapprochée de Claude Alonso à dix-huit ans.
"C'est sa seule et unique responsabilité. A qui donner une seconde chance si ce n'est à son père ?"
Maître Frugier, avocat de Vanessa Alonsodevant la cour d'Assises de Gironde
"Ce n'est pas parce qu'il y a soumission qu'il y a viol, il y a des femmes soumises, c'est ainsi"
L'accusé était défendu par Mes Rapaud et Parastatis. Les deux avocats ont plaidé le consentement des plaignantes, même pour le cas d'inceste. "L'inceste est moralement mal vu, mais juridiquement autorisé entre deux personnes adultes consentantes", a estimé le premier. Quentin Rapaud a fustigé un portrait "détestable" de son client, "où l'on noircit le tableau". Pour lui, la communauté, "suivie médicalement", n'était pas "coupée du monde". "Les pensionnaires y avaient plus d'avantages que d'inconvénients", a-t-il froidement lâché.
Georges Parastatis a embrayé le pas de son collègue : "Ce n'est pas parce qu'il est manipulateur, pervers et narcissique qu'il est violeur", a-t-il déclaré dans un ton offensif. "Le viol ne peut découler d'une soumission, a ajouté l'avocat de la défense. Ce n'est pas parce qu'il y a soumission qu'il y a viol, il y a des femmes soumises, c'est ainsi." Neuf ans après le premier signalement contre Claude Alonso, il vient d'être condamné à dix-huit ans de réclusion criminelle, assortis d'une de peine de sûreté de neuf ans. Vendredi soir, "Zeus" dort en prison.