"Un client lui a mis un couteau sous la gorge". Face aux agressions qui se multiplient, les vétérinaires renoncent aux urgences de nuit

Manque de personnel, surcharge de travail et agressions physiques et verbales... Les vétérinaires racontent un métier en tension et mis à rude épreuve. Pour beaucoup et pour se préserver, travailler de nuit n'est plus une option.

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"La semaine dernière, ma belle-sœur a emmené son chien en urgence, à Bordeaux, dans une clinique vétérinaire de nuit, raconte Valérie Despalatovic, propriétaire d'un malinois. Elle a attendu trois heures avant d'être renvoyée vers une seconde clinique où l'attente était évaluée à huit heures, souffle-t-elle. Avant de conclure, douloureusement : "Finalement, son chien est mort."

Si la prise en charge avait été plus rapide, l'issue n'aurait peut-être pas été la même.

Valérie Despalatovic

Propriétaire d'un malinois

Cette situation est redoutée par de nombreux propriétaires, impuissants face à un secteur mis à rude épreuve. Dans le Langonnais, région naturelle du sud de la Gironde, les cabinets vétérinaires qui assuraient un temps des gardes d'urgence, la nuit, ont fini par baisser les bras. La raison ? Une charge de travail trop importante et un personnel en sous-effectif. "C'est le cas partout en France, que l'on soit en milieu rural ou urbain", dénonce Caroline Dabas, vétérinaire et vice-présidente de l'Ordre des vétérinaires.

L'épuisement d'une profession

Installée à Langon depuis 1996, Caroline Dabas a vu la profession changer. "Les conditions de travail sont éprouvantes et le rythme n'est pas compatible avec une vie personnelle, assure la vétérinaire. En conséquence, pas mal de jeunes quittent cette profession, qui par ailleurs est plutôt féminisée. Beaucoup aspirent finalement à d'autres rythmes de vie. Et c'est compréhensible."

Aujourd'hui, alors qu'elle a toujours travaillé avec un ou deux collègues dans son cabinet, Caroline Dabas assume seule toute la charge de travail. Impossible pour elle d'occuper son poste la nuit, en plus de ses consultations en journée. "Les charges sont déjà lourdes et éprouvantes. Travailler de nuit reviendrait à mettre ma santé en jeu, et ce serait inhumain."

Plaquée contre le mur, un couteau sous la gorge

Jusqu'en 2015, un cabinet du Langonnais assurait les permanences de nuit et celles du week-end. "Malheureusement, mon confrère et ses collègues ont été victimes de plusieurs incivilités, dont une agression grave, rapporte Caroline Dabas. Un soir, alors qu'elle était seule, une consœur s'est retrouvée plaquée contre le mur par un client, qui lui mettait un couteau sous la gorge. En plus de problèmes de travail, s'ajoute celui de l'insécurité."

Dès que ça touche leur animal, les propriétaires sont colériques.

Maeva Pacouret

Auxiliaire vétérinaire

Si les vétérinaires ne cachent pas leur inquiétude, il en va de même pour les auxiliaires vétérinaires, souvent placés en première ligne. "En tant qu’assistante, je suis la première personne que le client voit quand il arrive. Et la première personne qu'il entend au téléphone, explique Maeva Pacouret, auxiliaire vétérinaire depuis six ans. Quand il est mécontent, c’est donc moi qu'il vise directement avec des agressions verbales ou physiques." D'après ses années d'expérience, elle remarque : "un rien énerve aujourd'hui un propriétaire. Ça peut être le prix des soins ou l'annulation d'un rendez-vous par exemple."

L'appréhension avant le travail

"Dès que le client est mécontent, il utilise la violence, observe aussi de son côté Claire Beaucaillou, auxiliaire vétérinaire en alternance à la clinique de Langon. En seulement un an passé ici, elle a été victime de deux agressions verbales. Depuis que j'ai été agressée, j'ai toujours une appréhension quand je viens à la clinique, regrette-t-elle. Je comprends parfaitement que des cliniques restent fermées la nuit, parce qu'on est encore plus vulnérable. Surtout en milieu rural."

Aujourd'hui, en cas d'urgence de nuit, les propriétaires d'animaux domestiques domiciliés dans le Langonnais peuvent se rendre dans les cliniques d'urgence de Bordeaux, accessibles a minima après 45 minutes de voiture. Deux sont opérationnelles la nuit et les week-ends : le centre hospitalier vétérinaire AniCura Aquivet, situé à Mérignac, et la clinique vétérinaire Alliance, située à Bordeaux-centre. Dès 2025, cette dernière déménage à Villenave-d'Ornon dans un nouvel établissement.

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