Ce lundi 4 novembre, la façade de la mairie de Bordeaux s’est paré de deux immenses affiches dénonçant directement les coupes budgétaires annoncées par le gouvernement dans le cadre du Projet de loi de finances (PLF). À Bordeaux, elles représenteraient 16,5 millions d’euros.
“Vous préférez priver tous les élèves de cantine à Bordeaux ou supprimer la police municipale ?” La question qui s’affiche en grosses lettres sur la façade de la mairie de Bordeaux se veut provocatrice. Une seconde, installée à quelques mètres, interpelle directement le gouvernement. Ce dernier a en effet ordonné des coupes budgétaires au niveau des finances accordées aux collectivités. Dans la ville de Bordeaux, la réduction est évaluée à 16,5 millions d’euros. “L’équivalent du budget dédié au périscolaire”, évoque Claudine Bichet, adjointe au Maire chargée des finances, sur le site de la ville.
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Seuls les "riches"
Au niveau national, ces coupes budgétaires sont évaluées entre 5 et 8 milliards d’euros. “Il ne s’agit pas de baisser les dotations qui sont désormais stabilisées, mais de faire des ponctions sur les recettes perçues par les collectivités”, indique Alain Pariente, professeur de droit public à l’Université de Bordeaux.
Les dotations de l’État représentent en moyenne la moitié des revenus des collectivités. L’autre vient généralement de recettes fiscales.
Alain ParienteProfesseur de droit public à l'université de Bordeaux
En réalité, le gouvernement propose de créer un fonds, qui permettrait aux communes en difficultés face à l’inflation, de se financer. Pour ce faire, seules les collectivités dites “riches”, dont le budget excède plus de 40 millions d’euros, sont concernées : elles seraient environ 450 en France. “C'est dans ces lieux que se concentrent deux tiers de la précarité et 80 % des gaz à effet de serre émis en France. Impacter les grandes collectivités, c'est se tirer une balle dans le pied”, assure Claudine Bichet. Une décision injuste pour la mairie de Bordeaux, qui verrait donc ses financements réduits, sans solution pérenne de recettes.
L’édile bordelais, Pierre Hurmic dénonce ainsi une “attaque frontale contre la démocratie locale” accusant l’État de “faire payer aux collectivités sa gestion calamiteuse, au lieu d’assumer les conséquences de ses choix politiques”. “Nous sommes de bons gestionnaires, qui présentons des budgets tenus à l’équilibre à l’euro près, et nous serons pénalisés par les mauvais gestionnaires qui cherchent à transférer leur endettement”, regrette le maire de Bordeaux.
Pas d'augmentation des taxes
Cette campagne qui veut indéniablement faire réagir les Bordelais, précise également ce que signifie cette somme. “C’est plus que le coût annuel de l’intégralité de la cantine scolaire, par exemple, ou que la totalité de la masse salariale de la police municipale et des médiateurs”, liste Pierre Hurmic dans une publication Facebook.
Bien sûr, il n’est pas question de fermer ni les cantines, ni la police municipale.
Pierre Hurmic,Maire de Bordeaux
Malgré ces ponctions, la mairie assure ne pas augmenter ses recettes fiscales. “Nous refusons d’augmenter les impôts ou de baisser nos ambitions écologiques et sociales. Le gouvernement doit modifier son projet de loi de finances sans délai”, martèle Pierre Hurmic. “Sur le volet recettes, les tarifs de certains services publics pourraient évoluer. En revanche, nous ne toucherons pas à la taxe foncière, que nous estimons déjà élevée à Bordeaux”, ajoute de son côté Claudine Bichet.
Contrairement à l’Etat qui peut s’endetter pour des dépenses de fonctionnements, les collectivités sont contraintes d’établir des budgets “à l’équilibre”. “Elles ne peuvent s’endetter que pour de gros projets qui nécessite des investissements importants”, précise le professeur de droit Alain Pariente.
Selon la mairie de Bordeaux, la dette des collectivités représente seulement 8 % de la dette publique totale, “alors que nous représentons 70 % des investissements publics locaux”. Au-delà des questions financières, la mairie dénonce une menace pour l’indépendance et l’autonomie des collectivités. Le sujet a également été abordé au conseil municipal, qui se tenait ce mardi 5 novembre.