Adrien Ostins, un jeune viticulteur âgé de 28 ans, cultive à Listrac-Médoc (Gironde) deux hectares de vignes. Il participe à l'élection de Mister Agri 2022 pour mettre en lumière sa profession et ses jeunes exploitants. Il constate que les grands châteaux s'accaparent l'essentiel de la visibilité dans le milieu.
Les votes sont clos, place au dépouillement. On ne parle pas (encore) de l'élection du président de la République, mais de celle de Miss et Mister Agri 2022. Le concours est organisé par la page Facebook éponyme, et a reçu plus de 400 candidatures.
Après la fin des votes du public à midi, ce mercredi 8 décembre 2021, le jury va délibérer pendant trois jours (c'est lui qui décide). Le but de ce concours informel créé en 2015 : donner une visibilité nouvelle à l'agriculture, par un biais décalé. Attention, il faut poser sans provoquer : pas question de poser tout nu comme sur un calendrier lancé par des cavistes dans le Haut-Rhin.
C'est très sérieux, car Miss et Mister Agri représenteront toute leur profession : par leur présence au Salon de l'agriculture, ou via des interviews auprès des médias. Celui qui ambitionne de le devenir, c'est Adrien Ostins, viticulteur de 28 ans basé à Listrac-Médoc en Gironde (visible sur la carte ci-dessous).
Le jeune viticulteur a répondu aux questions de France 3 Aquitaine. "J'ai voulu participer pour faire en sorte qu'on parle un peu plus des jeunes viticulteurs dans le Médoc. Je trouve qu'ils sont trop souvent oubliés. Les grands châteaux sont plus mis en avant alors qu'ils ont déjà leur notoriété, par rapport à des petits viticulteurs comme moi ou d'autres." La pantagruélique visibilité de ces grandes maisons étouffe presque la jeune concurrence, estime-t-il : point trop n'en faut. "C'est un peu dommage, car on est l'avenir."
Les grands châteaux sont plus mis en avant alors qu'ils ont déjà leur notoriété, par rapport à des petits viticulteurs comme moi ou d'autres.
Adrien Ostins, jeune viticulteur à Listrac-Médoc
Adepte des réseaux sociaux, où il a fondé la page Vignes&Vins En Médoc, Adrien Ostins aimer parler de son métier, de ses collègues, des petites maisons qu'il connaît de près (voir la publication ci-dessous). Participer à ce concours n'est qu'une étape de plus pour promouvoir le milieu et ses jeunes acteurs et actrices. "J'ai un beau métier, et je le recommande. Il est assez libre car on a ses propres horaires, c'est aussi une passion... Mais ça peut être un métier difficile, surtout actuellement avec le Covid où les ventes ont beaucoup ralenti, les salons ont été annulés..."
Il souligne, à nouveau, que les châteaux ont pu bien mieux s'en tirer que les petites exploitations.
Médiatiser son métier, c'est aussi permettre de dissiper certains a priori. "Les gens partent du principe que les jeunes viticulteurs sont en bio. Et beaucoup de personnes ne savent pas trop, pensent qu'il suffit de planter un pied de vigne et le laisser pousser en attendant le raisin. Non. Il y a aussi des traitements - par le biais de cuivre ou de souffre - et il faut beaucoup plus d'entretien, c'est difficile." Un investissement risqué. "C'est compliqué si on n'a pas de vins solides. On a des années où on ramasse très peu de raisin. Viticulteur reste une profession : pour en vivre, il faut pouvoir ramasser."
Le vin sinon rien
Adrien Ostins est tombé dans le vin quand il était petit, ou presque. "Mon grand-père avait un demi-hectare à Pauillac", raconte-t-il à France 3 Aquitaine. "C'était sur un lieu-dit qu'on appelait Jupiter. Il m'a donc fait découvrir ce milieu. J'ai une anecdote : il me disait étant petit qu'on allait sur Jupiter. Pas la planète, évidemment, mais sur son hectare de vigne..." D'où le nom porté par ses bouteilles, la première cuvée remontant à 2019.
"J'ai vraiment baigné dans ce milieu. J'allais souvent chez mes grands-parents, et à côté, il y avait les hangars à tracteurs du Château Lafite-Rothschild : je les surveillais en train de passer. Donc depuis petit, j'ai voulu être là-dedans."
Ses études devaient le mener à vendre du vin, originellement. "Mais en travaillant dans un château à Pauillac, où je me destinais à devenir commercial, je voyais par la fenêtre le chef de culture dans la vigne, les tracteurs... J'ai su que c'était vraiment ça qui me plaisait depuis le début." Changement de BTS (viticulture et œnologie), alternance, intégration dans la Cave de Listrac : où il est encore actuellement.
Si Adrien Ostins devient Mister Agri 2022, ce ne sera pas sa victoire à lui tout seul. "Le gagnant est invité dans des conférences, des salons... C'est justement pour sortir du Médoc, moi et mes connaissances : de jeunes viticulteurs pour représenter la profession, et promouvoir nos vins. On ne s'ouvre pas assez aux autres, et je voudrais qu'on puisse changer un peu cette image. Ce sera une victoire pour la jeune viticulture médocaine en général, pas que pour moi."
On verra si ce message d'unité convaincra le jury. Et s'il sera donc sélectionné. Résultats le samedi 11 décembre.