Deux fois moins d'auteurs et deux sites différents au lieu d'un seul chapiteau, l'édition 2023 de Lire à Limoges, réduite pour raisons économiques, a suscité des inquiétudes. Selon les premiers retours, le public n'a pas boudé la manifestation.
Pas de chapiteau au Champ de Juillet pour Lire à Limoges 2023, mais une patinoire aménagée et un centre culturel Jean Gagnant pour les masterclasses, une édition plus modeste voulue par la Mairie afin de réaliser des économies.
À la patinoire, ce sont donc 150 auteurs au lieu des 300 habituels qui se sont installés dès vendredi 12 mai à 14h. Une édition pour laquelle les deux librairies indépendantes limougeaudes Anecdotes et Page et Plume ont mutualisé leurs moyens, alors que les deux enseignes Cultura et Leclerc n'ont, elles, pas participé cette fois-ci.
Dès le vendredi après-midi, les auteurs étaient soulagés de voir les lecteurs se déplacer jusqu'à eux. Pour l'écrivain limougeaud Franck Linol, qui ne rate pas une édition depuis de nombreuses années, ce choix de la patinoire est finalement plutôt une agréable surprise : "Pour être très franc, c'est vrai qu'on avait des préjugés", explique-t-il samedi en fin d'après-midi.
Le chapiteau du Champ-de-Juillet, c'était une institution mais finalement je trouve qu'il y a du gros potentiel. On interroge les visiteurs qui passent et ils sont plutôt satisfaits de cette formule.
Franck Linol, auteur "pilier" de Lire à Limoges
Croisée samedi devant le stand d'Anne Goscinny, une mère de famille analyse l'offre jeunesse : "Il y a plutôt du choix au niveau de la petite enfance, peut-être moins pour les ados", explique-t-elle.
Au stand polars, l'auteur Mathieu Lecerf est satisfait après ses trois jours passés à la patinoire : "Certes, c'est différent, mais moi, par exemple, j'ai vendu autant que l'année dernière" dit-il. Pour Aurélie Janssens, libraire à Page et Plume, le bilan est également positif
Il y avait une grande incertitude et on a été agréablement surpris dès le vendredi après-midi, il y a eu énormément de monde, et le samedi, une grosse affluence.
Aurélie Janssens, libraire
Au centre culturel Jean Gagnant, masterclasses et ateliers
Pour les conférences des auteurs, les lecteurs se déplacent au centre culturel Jean Gagnant, comme pour cet entretien de l'auteur Dany Laferrière venu présenter son "Petit traité du racisme en Amérique".
Face au public, l'écrivain haïtien évoque notamment ses 15 ans passés au Québec où il lui est même arrivé de présenter la météo à la télévision, ce qui avait amené un téléspectateur à téléphoner pour demander s’il était payé autant qu’un Blanc. "Voir un Noir présenter la météo au Québec dans ce pays où l’hiver est si froid, avec cette neige si blanche"... Le public rit avant de l'écouter raconter son admiration pour des grandes figures comme Harriet Tubman, qui entreprit 19 voyages pour aider des esclaves fugitifs à s’enfuir, ou Frédérick Douglass qui demeure pour lui "le plus grand orateur du XIXe siècle".
Dans un second auditorium, ce sont les deux stars de la littérature jeunesse, Antoon Krings et Bernadette Despres, qui échangent sur leurs pratiques. Elle, facétieuse créatrice de Tom-Tom et Nana explique qu'il lui "arrive de rire en dessinant, mes personnages ne m’agacent jamais, ce sont mes petits enfants qui m’agacent ! », dit-elle dans un sourire. Antoon Krings, l'auteur des petites bêtes comme Mireille l'Abeille, explique, lui, sa fascination pour la capacité à jouer qu'ont les enfants.
Même en temps de guerre, les enfants conservent toujours cette capacité à jouer. J’adore les observer, c’est fascinant.
Antoon Krings, auteur jeunesse
Des ateliers à destination des plus jeunes étaient également proposés au centre culturel.
Une édition plus modeste vivement contestée par l'opposition municipale
Depuis l'annonce de cette édition plus réduite en décembre 2022, l'opposition n'a eu de cesse de condamner ce choix de la Mairie guidé par une chasse aux économies budgétaires, notamment en raison de la hausse du coût de l'énergie.
Croisé samedi dans la foule des visiteurs, le maire (LR) Emile-Roger Lombertie lui, semblait ravi de ce choix et se projetait déjà sur la prochaine édition, en évoquant la possibilité d'accueillir "50 auteurs de plus à la patinoire".