Depuis avril 2023, le Centre de la mémoire d’Oradour-sur-Glane présente une exposition baptisée "Oradour Objets en héritage". Cette exposition réunit des objets ayant appartenu aux habitants du village avant le massacre du 10 juin 1944. Parmi les nombreux donateurs, André Désourteaux, aujourd’hui décédé, a légué l’intégralité de ses recherches et un objet qu’il conservait précieusement.
Dans les vitrines du Centre de la mémoire d’Oradour-sur-Glane, la carcasse d’un réveil, une paire de lunette, des ciseaux rouillés… Ces objets ont tous appartenus a des habitants du village, avant le massacre du 10 juin 1944. Ils ont été donnés par les familles ou des proches des anciens habitants. Dans le cadre de l’exposition "Oradour Objets en héritage", le Centre de la mémoire organise une vaste collecte d’objets. Après la disparition des derniers témoins directs du drame, ces objets ont désormais une valeur mémorielle importante.
« La boite de l’oncle Jacques »
Parmi tous ces objets, une longue boite en métal blanc se trouve exposée. Il s’agit de "la boite de l’oncle Jacques". Cet étui et son contenu, des instruments médicaux, appartenaient au médecin d’Oradour, Jacques Désourteaux."Il était parti faire un accouchement, mais l’accouchement n’était pas prêt et quand il a su qu’il y avait quelque chose à Oradour, il est revenu", raconte Suzanne Désourteaux, la veuve du médecin.
Il s’est fait tuer et cette boite était dans sa voiture.
Suzanne Désourteauxveuve d’André Désourteaux
Durant des décennies, cette boite a été soigneusement conservée par le neveu du médecin, André Désourteaux. Cet ami proche du dernier rescapé, Robert Hébras, avait perdu dix-huit membres de sa famille lors du massacre d’Oradour. Décédé en 2023, il avait, de son vivant, choisi de confier cet objet au Centre de la mémoire afin qu’il ne tombe pas dans l’oubli. "Mon père a donné ces objets et tous ses documents, pour l’Histoire et pour les plus jeunes notamment qui viennent", explique Cécile Désourteaux, la fille d'André. "Ça peut les aider à mieux se rendre compte qu’il y avait de la vie avant le massacre."
C’est ce qu’il faut mettre en avant pour montrer qu’Oradour a réellement existé.
Cécile Désourteauxfille d’André Désourteaux
Une base de données sur les habitants d’Oradour
Il y a une dizaine d’années, André Désourteaux avait également fait au Centre de la mémoire un autre don très important : l’intégralité des recherches qu’il avait effectuées dans les années 60 et 70 sur les habitants du village martyr. "Il faisait ces recherches tout seul, après son travail, il allait aux archives départementales", indique Sandra Gibouin, documentaliste au centre de la mémoire d'Oradour-sur-Glane.
Grâce à lui, on a eu une base de données sur les victimes du massacre d’Oradour.
Sandra Gibouindocumentaliste au centre de la mémoire d’Oradour-sur-Glane
Ces centaines de pages, de documents et de photos retracent l’identité des victimes, leur lieu de naissance, leur adresse dans le village, leur métier. L’intégralité de ces documents est conservée dans les archives du centre d’Oradour. "Ils ont été classés et inventoriés. Certains ont été numérisés pour éviter les manipulations. Ils sont placés dans des boites au PH neutres et stockés, à l’abri de la lumière, dans un local spécifique avec un taux d’hygrométrie et une température qui varient très faiblement", explique la documentaliste. Le seul moyen de garder le plus longtemps possible.
Cette mine d’informations est scrutée aujourd’hui par les historiens. "Cette histoire artéfactuelle nous renseigne énormément sur les circonstances du massacre, mais également sur les phénomènes de mémoire qui ont pu le suivre", rejoint Stéphane Michonneau, historien à l'université de Paris Créteil.
Il s’est développé depuis quelques années tout un courant de recherche autour de l’histoire des objets.
Stéphane Michonneauhistorien à l’Université Paris Est Créteil
Une valeur mémorielle que le Centre de la mémoire d’Oradour souhaite transmettre. La collecte de ces objets se poursuit.