Limoges : où en est le projet de ceinture maraîchère de la communauté urbaine ?

Lancé en 2017, le projet de « ceinture maraîchère » de Limoges Métropole porte ses fruits. Sur les trois maraîchers en test sur un terrain agricole dédié à Verneuil-sur-vienne, un premier est en passe de pouvoir s’installer à son compte.

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"Mon concept, c’est le kilomètre zéro", lance d’emblée Olivier Dougy, maraîcher installé depuis janvier 2020 sur l’espace test de Limoges Métropole, baptisé Pouss&bio à Verneuil-sur vienne.

Ça tombe bien, c’est l’idée de la communauté urbaine de rapprocher les producteurs des consommateurs. Olivier rentrait à peine de l’île de la Réunion, où il était installé avec femme et enfants, quand son projet a germé ici en Limousin. "J’ai toujours travaillé dans le milieu agricole, en Indre et Loire. J’ai toujours été salarié, mais c’est la première fois que je me frotte au monde de l’entreprenariat" s’enthousiasme Olivier. Pour s’installer, " j’ai eu un faible investissement", raconte-t-il. "Avec mes 6000 euros de départ, j’ai réussi à dégager 12.000 euros de chiffre d’affaires donc il y a du chemin encore à faire. " Mais Olivier n’est pas du genre à se laisser abattre.

"Mon contrat c’est de fournir 10% de notre chiffre d'affaire en restauration collective, sauf que mes premières productions sont tombées en plein confinement. Je me suis adapté, j’ai fait du démarchage à Verneuil-sur-vienne, ça n’a pas été évident, car ce n’est pas mon cœur de métier." sourit-il. 

Olivier Dougy s'est fait un réseau. Chaque début de semaine, il informe ses clients par mail, des rendez-vous sont fixés s’il y a des commandes. Ça vient tout doucement. Olivier livre quelques magasins comme La vie claire à Limoges, la boutique du lycée des Vaseix, ainsi que le magasin Les paniers libres à Saint Yrieix-sous-Aixe. " Avec tout ça, Olivier a fait 400 euros de chiffre d'affaire le mois dernier.

"Ce n’est pas encore viable économiquement, reconnaît-il, mais pour l’instant, je bénéficie de l’allocation chômage, pour arrondir les fins de mois, en plus du salaire de ma compagne" mais c’est encourageant, se rassure Olivier.

Dans l’idéal, il faudrait qu 'Olivier double son chiffre d’affaires pour pouvoir dégager un petit revenu.

"C’est compliqué, il y a des maraîchers mieux organisés, qui sont à plusieurs qui peuvent générer jusqu’à 45.000 euros par an".

Sur les 15 ha acquis par la communauté urbaine il y a également Rémi Béchade, 30 ans, qui occupe lui aussi d'1ha.

Après avoir vécu huit ans à Rennes pour ses études, et une fois son diplôme agricole en poche, le jeune homme décide de retrouver ses racines limousines. « Je suis en recherche d’une parcelle pour m’installer, l’espace test est un bonne opportunité pour faire ses armes, trouver ses clients, réfléchir à la commercialisation, s’habituer au terroir. » Rémi est le dernier arrivé. Installé à Verneuil depuis juin 2020, il est au tout début de son projet mais il est tout aussi enthousiaste. "C’est un métier qui me passionne " répète-t-il, lui qui n’est pas du tout issu du milieu agricole.

" J’ai fait les premiers semis il y a un mois, et je suis en train de planter les pommes de terre primeur, les petits pois, les oignons, les salades, les betteraves, les navets, les persils, épinards, tout ce qui est à l’extérieur, et sous serre, actuellement on plante les haricots à rame, et les courgettes et d’ici 15 jours, on plantera tous les légumes d’été sous abri (tomates, aubergines, concombres et poivrons)" liste Rémi.

Selon Rémi, le projet de ceinture verte est vraiment une bonne chose, car cela permet à des jeunes de limiter les risques, sachant que l’investissement n’est pas le même que si l'on souhaite s'installer directement en tant qu’exploitant agricole.

"Pour me lancer,  j’ai investi 10.000 euros notamment pour l’achat de semences et plants, du matériel pour les semis, les plaques, le terreau, l’irrigation pour le plein champ etc. Sachant qu’ici les canalisations sont faites, mais tout ce qui est hors sol est à notre charge " se satisfait-il.

De manière générale, selon Rémi, c’est vraiment une belle opportunité. Surtout, répète-t-il " qu’il y a énormément de demandes en légumes, et en Limousin il y a encore des places pour s’installer, aujourd’hui il y aurait davantage de jeunes à s’installer, ce ne serait pas du luxe ".

On constate que les gens ne connaissent pas bien les légumes, quand on propose des chouraves, les panais, les persils, je vois bien que certains ne savent pas les cuisiner. Il est là mon plaisir, de faire redécouvrir des choses. Moi je suis un producteur de goût.  J’aimerais que mes clients se fassent plaisir.

Olivier Dougy

En tout, Olivier va passer trois ans ici à faire ses preuves et voir si économiquement son affaire est viable. " On a 1ha de terrain, 500 m2 d’abri froid et du matériel agricole mis à disposition. Sur ce terrain, je produis une trentaine de légumes de saison en bio", se réjouit Olivier. "Actuellement, on est en train de préparer la saison d’été avec la mise en place de tomates, concombres, courgettes, pastèques, melons. J’ai un peu raté ma production d’hiver, mais ce sont des choses qui arrivent ", tempère Olivier.

Pour intéresser les gens il faut pouvoir proposer toute une gamme de produits tout en respectant les saisons.

 

Bémol

" Le plus dur c’est de trouver le foncier à Limoges, et même si on en trouve, il faut qu’il y ait un point d’eau à proximité, ce n'est pas juste une prairie qui suffit pour faire du maraîchage comme on pourrait le penser", explique Rémi. "Et puis si on fait de la vente directe il faut pouvoir accéder aux clients, c’est en cela que la ceinture maraîchère est une idée brillante ".

Pour Olivier,  l’idée de ceinture maraîchère c’est très bien, mais au bout de trois ans, on est obligés de partir. "J’ai un peu plus de 50 ans, et dans ma troisième année, quand j’aurai ma clientèle, je vais devoir tout recommencer ". Pour lui " c’est un peu dur " d’avoir cette perspective-là.

" Celui qui va prendre après moi va disposer d’un terrain viabilisé, il n’aura pas à faire tout le travail que j’ai fait sauf que moi je vais devoir partir, néanmoins c’est un contrat de 3 ans que l’on a signé, que l’on doit respecter ".

La ceinture maraîchère ça a toujours existé, signale Olivier. " Au siècle dernier il y avait plus d’une centaine de maraîchers sur Limoges, aujourd’hui on est moins de trente sur le département. "

Pour être à la hauteur de tous ces enjeux, la communauté urbaine de Limoges se dote d’une SCIC (une société coopérative d’intérêt collectif), pour favoriser l’installation d’exploitations maraîchères permettant, demain, de nourrir durablement le territoire.

Pour ce faire, la collectivité "va voter une participation à hauteur de 150.000 euros " annonce Bernard Thalamy, 1er vice-président de la communauté urbaine de Limoges.  

La SCIC c’est Limoges Métropole qui lance la société, mais elle est ouverte à toute autre collectivité, investisseurs privés, producteurs, habitants, associations qui souhaitent entrer au capital.

Satisfaction

Carlos Campos Bonnet, le premier maraîcher installé, arrive à la fin de ses trois années de test. Il devrait se mettre à son compte à Rilhac Rancon à la fin de l’année. " C’est une belle satisfaction pour nous, car il a montré une appétence pour le métier, il a su surmonter les obstacles. En effet, il est vrai que beaucoup de personnes veulent s’installer sans prendre conscience de la pénibilité du métier agricole. ", se satisfait l’élu en charge des circuits courts.

" Carlos a réussi à s’insérer, il a tissé son réseau, financièrement il a atteint presque la moitié du chiffre d’affaires attendu pour une production viable en maraîchage. Une exploitation est viable quand elle arrive a générer 40.000 euros de chiffre d’affaires annuel sur 2ha " rappelle Elodie Blanchard, chargée de mission maraîchage péri-urbain à Limoges Métropole.

Selon elle, les besoins alimentaires sont sur Limoges Métropole mais les surfaces agricoles sont limitées ; il fallait trouver une solution pour installer les maraîchers en périphérie du territoire, détaille la chargée de mission. Et la SCIC ne se limitera pas aux frontières de Limoges Métropole. Ainsi rien n’empêchera les autres collectivités de rentrer au capital "on sait qu’il y a d’autres collectivités qui réfléchissent à des projets alimentaires avec la même ambition d’installer des maraîchers. Ils pourront entrer dans la SCIC. "

La tâche n’est pas simple car dans la communauté urbaine il y a à peine " une vingtaine de maraîchers déclarés " se désole Elodie Blanchard, "il faudrait 100ha cultivés pour atteindre 10% de notre autonomie alimentaire pour tout Limoges Métropole soit 200 000 habitants ".

Ce n’est pas encore officiel, mais la SCIC pourrait s’appeler " La ceinture verte du terroir de Limoges ", une proposition issue des ateliers de travail qui se sont tenus à Ester ce 8 avril. Le nom sera arrêté en juin lors de l’assemblée générale constitutive.

En attendant, " le point positif c’est qu’on produit des légumes frais, avec une cueillette le matin, une livraison le midi et cuisinée le soir, et ça c’est quand même appréciable, c’est ce que me disent mes clients en tous cas. Et puis il faut dire que l’aliment n’est pas aussi bon quand ça vient de plus de 100 kilomètres. Mon concept c’est le kilomètre zéro : produire localement et consommer localement, à un prix abordable, je suis en bio et mes prix sont moins chers qu’en supermarché " affirme Olivier Dougy.

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