Le 3 octobre aura lieu la Nuit du Droit, un événement national pour sensibiliser le grand public aux questions juridiques. A Limoges, magistrats et avocats ont choisi de lire des extraits du procès dit "de Bordeaux", en écho aux commémorations du quatre-vingtième anniversaire du massacre d'Oradour-sur-Glane.
Le 3 octobre prochain, la vénérable salle d’Aguesseau, siège de la cour d’appel de Limoges, sera le théâtre d’une première jamais réalisée depuis soixante-dix ans : c'est là que seront lus des extraits du procès de Bordeaux. Un procès historique qui s'est ouvert le 12 janvier 1953 pour juger 21 anciens Waffen-SS accusés d'avoir participé au massacre d'Oradour-sur-Glane neuf ans plus tôt, dont 13 accusés alsaciens, Malgré nous.
Un choix qui tombait sous le sens pour la Nuit du droit - organisée tous les ans dans toutes les juridictions de France - en cette année de commémoration du quatre-vingtième anniversaire du massacre. "Nous avons une vision de juriste, nous n'avons pas une vision d'historien", tient à préciser Richard Doudet, bâtonnier de l'Ordre des avocats de Limoges. "C'est intéressant parce que l'on va réhabiliter ce procès qui a été un peu mélangé avec la loi d'amnistie dans l'esprit des Limousins alors que ce procès a été mené jusqu'à son terme avec un souci de recherche de la vérité, d'impartialité et une réelle écoute des victimes."
Un procès resté longtemps douloureux pour les familles de victimes en raison d'un télescopage total entre pouvoir politique et pouvoir judiciaire. L'Assemblée nationale a en effet adopté une loi portant amnistie sur les accusés alsaciens en plein milieu du procès pour les exclure des poursuites. "C’est unique dans l’histoire", souligne Richard Doudet.
Huit mois de travail
Il a fallu huit mois de travail aux magistrats et avocats de Limoges - avec l'aide du Centre de la mémoire d'Oradour, d'universitaires de Poitiers et de l'Association nationale des familles des martyrs - pour sélectionner des extraits parmi les cinq semaines de débats, intégralement retranscrits par sténotypie. Des extraits principalement choisis dans les interrogatoires d’accusés, réquisitions, les plaidoiries et des auditions de victimes, seulement reconnues comme témoins. "À l'époque, les martyrs n'étaient pas victimes, car il s'agissait d'un tribunal militaire", explique Richard Doudet.
Tout ce qui sera lu a été prononcé à l’audience : on aura les témoins , les victimes, les interrogatoires, les réquisitions et le délibéré, comme dans un procès classique pour que chacun puisse faire sa propre opinion sur ce procès de 1953.
Richard Doudet, bâtonnier de l'Ordre des avocats de Limoges
Cette lecture inédite est le fruit de la coopération entre la cour d’appel de Limoges, les tribunaux judiciaire et administratif et le barreau de Limoges. Magistrats, procureurs, avocats, universitaires... tous joueront le rôle d'un protagoniste de ce procès historique en veillant à respecter la mémoire des victimes.
Après l'émotion, la réflexion. La lecture sera suivie d'un débat sur un thème terriblement actuel : la justice face aux crimes de guerre.