La consommation de produits bio est toujours en baisse. Elle avoisinait encore les 5% l'année passée. Les ventes représentant 12,6 milliards en 2021, ont baissé à 11,7 milliards en 2023. La filière est peu convaincue par les dernières annonces gouvernementales suite au mouvement des agriculteurs. Seuls 50 millions d'euros ont été fléchés vers ce secteur en crise et la pause du plan Écophyto est un mauvais signal pour ceux qui ont fait de l'abandon des produits phytosanitaires leur cheval de bataille.
Ils ont fait le choix du bio. Depuis 2018, Claire Neuts et son mari ont converti leur exploitation mixte de porcs (cinquante truies) et de bovins (vingt-sept vaches) en bio dans la commune de Cognac-la-Fôret. La ferme a demandé un gros investissement afin d'améliorer les conditions de travail et respecter la réglementation bio. Ils ont notamment fait l'achat d'une fosse à lisier d'un montant de 120 000 euros.
"On récupère le lisier au niveau du bâtiment. Il y a un gros tuyau qui l'emmène jusqu'à la fosse. Cette dernière est faite en béton avec un terrassement très solide afin qu'elle ne s'affaisse pas. Il y a une partie intérieure, où les cochons mangent et se reposent, et une courette extérieure où ils font leurs déjections et ont accès au grand air", détaille Claire Neuts.
En tout, près de 500 000 euros ont été déboursés avec les bâtiments qui permettent aux porcs de sortir dehors.
"On ne se paye plus trop"
Les contraintes sont plus lourdes que pour les éleveurs conventionnels. Le coût est, en théorie, compensé par des prix plus élevés. Mais, la baisse de la consommation bio assombrit les perspectives.
"C'est un équilibre entre l'aliment qu'on achète et le prix de vente, qui fait notre revenu. C'est grâce à ça que la ferme survit et qu'on se paye. Là, on en est à la ferme survie. On ne se paye plus trop, en ce moment", avoue l'éleveuse.
Si le prix du porc baisse, on ne pourra plus se payer et la ferme, il faudra clairement l'arrêter. Il y a des jours où on se pose cette question.
Claire Neutséleveuse en bio
L'agricultrice déplore également que la loi Egalim ne soit pas pleinement appliquée. La restauration collective devait représenter un gros débouché puisque la loi impose 20% de bio. Mais avec l'inflation, la tendance est de se limiter à ces 20% et, pour le reste, de se tourner plutôt vers la production des exploitations ayant obtenu le label HVE, moins contraignant. Ce système crée une concurrence déloyale.
Revenir en conventionnel
En Limousin, le bio représente 13% des fermes. La filière continue d'attirer avec 151 nouveaux projets en 2023, mais le nombre d'abandons, vingt-sept, pour la même année, est en hausse.
"On a des arrêts d'activités bio, car des gens reviennent en conventionnel, parce qu'ils trouvent que le prix vendu en bio n'est pas assez élevé. Il y en a eu un petit peu en lait et en grande culture. Sur les trois départements, il y en a moins que sur d'autres territoires ancrés sur le développement des grandes cultures. On est encore un peu préservé", reconnaît Katell Petit, coordinatrice de la Fédération régionale d'agriculture biologique de Nouvelle-Aquitaine.
"On souhaiterait une reconnaissance de l'état, de la société. C'est un service environnemental rendu à tout le monde. Derrière, ça permet d'éviter la pollution des eaux par exemple, la préservation de l'environnement. On voudrait qu'on soit un peu plus pris au sérieux pour cela", espère un agriculteur.
Le signal envoyé par le gouvernement avec la pause du plan Écophyto n'est pas de nature à redonner le moral à la profession. Elle attend maintenant un rebond de la consommation et une action au niveau européen afin que les primes PAC pour le bio soient revalorisées.