Océan et plans d'eau : une start-up à la conquête du monde pour aider à améliorer la qualité de l’eau

Son crédo : nettoyer les ports ou encore les plans d'eau. Créée en 2016 à Guéret en Creuse, par Alan Alfonso, la petite entreprise grandit et s'est installée à Saint-Junien (Haute-Vienne). Une startup en plein développement, car le carnet de commandes pour son aspirateur des mers est rempli. Entretien.

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Le Recyclamer est un engin écologique. Il fonctionne grâce à l'énergie solaire avec des panneaux photovoltaïques. Le robot "écolo", sorte d'aspirateurs des mers et des plans d'eau, possède aussi des capteurs qui lui permettent de mesurer en temps réel la qualité de l'eau (le PH, température, taux d'oxygène). Son activité principale est de ramasser les déchets flottants. Il aura fallu un an et demi pour le développer. Un filtre végétal capable de récupérer et traiter les hydrocarbures est imaginé par le laboratoire Péreine. Quant à l'Ensil (école d'ingénieur de Limoges), elle collabore à la gestion de l'eau à l'intérieur du petit robot. EDF adaptera un panneau solaire spécifique. Le Recyclamer a nécessité un investissement de 220 000 euros.

Comment s'opère cette croissance et comment se porte cette entreprise qui a réussi à rester hors de l'eau après la crise Covid ? Entretien.

Rédaction web de France 3 Limousin : Comment se porte cette entreprise aujourd’hui ?

Alan d'Alfonso Peral, concepteur de Recyclamer : On a pu faire un partenariat avec un grand groupe industriel de Saint-Junien. On va commencer à produire des robots en série, parce que j’ai commencé à produire de la présérie. Mais avec la difficulté de la Covid, on a rencontré des difficultés à trouver des composants électroniques. On s’est retrouvé avec la pièce maîtresse de notre robot qui était en rupture. J’ai eu la chance de trouver un partenaire dans la même région, dans la même zone pour pouvoir livrer les petits robots. Cette boîte est rentrée dans le capital de l’entreprise. Il s’agit d’une entreprise présente depuis une cinquantaine d’années à Saint-Junien. Et c’est grâce à eux qu’on a pu finir toute la partie électronique et continuer à livrer les clients. Là, on doit livrer Palma de Majorque, Monaco. On livre en Inde aussi. Grâce à ce groupe industriel, on a réussi à avoir des contacts dans plusieurs pays asiatiques.

Qui sont vos clients ?

Comme gros clients, nous avons le gouvernement de Palma de Majorque, avec des marinas privées. Comme c’est un produit qui est très nouveau, il y a plusieurs étapes. Il faut que les personnes puissent tester et comprennent l’utilité de nos produits. C’est à partir de ce moment, qu’il y a une deuxième vague dans le secteur.

Nettoyage obligatoire dans trente ans

C’est un marché de niche, qui est tout nouveau, parce qu’en fait, il faut s’imaginer qu’il y a quatre-vingt ans, les camions poubelles n’existaient pas. Mais ce qui s’est passé, c’est que la production de différentes quantités de déchets, les camions passent deux, voire trois fois par semaines. Parce qu’il y a de plus en plus de consommateurs. On est à une époque où il faut nettoyer les ports, les plans d’eau, avec l’augmentation des déchets rejetés dans la mer. Parce qu’il faut savoir, c’est que dans trente ans, ces nettoyages vont être obligatoires. C’est une étape, c’est pour cela qu’on parle de marché de niche.

 

L’origine du projet ?

En 2016, je naviguais avec des amis. Quand on plongeait, on avait l’habitude de ramasser des déchets en profondeur, c’est comme ça qu’en 2016, on a fait le choix de créer l’association Recyclamer. C’est là que j’ai eu l’idée de créer une machine pour aider les gens à collecter les déchets. Avec le surcroit d’activité, j’ai décidé de créer l’entreprise Recyclamer innovation pour développer la première gamme de robot solaire autonome qui s’appelle le Geneseas. On a commencé par la petite taille S, avec laquelle on a rencontré pleins de difficultés avec la crise de Covid pour la partie électronique, parce qu’on avait plus de quarante robots en commande.

Aujourd’hui, on est dans un processus très avancé pour la taille M, c’est la raison pour laquelle on fait une levée de fond l’année prochaine en 2024 pour pouvoir finir la taille M.

La petite, c'est la taille S, juste pour nettoyer les ports, la taille M, c'est pour le nettoyage des côtes.  On est en pleine croissance, parce qu’on vient de passer un cap de la startup, on a fini la présérie, maintenant, on change de gamme. On a validé le modèle commercial, on en a déjà vendu, on a des robots en location. Là, on passe au stade supérieur. Après, c'est une aventure, on rencontre pleins de problèmes, mais on a rencontré le patron de FBO, c’est lui qui m’a accompagné pour passer ce cap. C’est un soutien très important que j’ai trouvé ici à Saint-Junien. C’est une vraie chance en Limousin de pouvoir trouver des entreprises qui peuvent nous accompagner.

En 2018, j’ai quitté Guéret pour me rapprocher de Limoges, car je travaillais avec l’Université de Limoges, en recherche et développement dans l’incubateur d’Ester. C’est pour ça que je me suis retrouvé à Saint-Junien où j’ai fini ma carrière de rugbyman en fédérale 2.

C’est une SAS avec deux associés, FBO et une autre entreprise de Limoges, Iconosquare.

Des projets ?

On part faire une tournée en Espagne, l’année prochaine, on fait une tournée en Italie, où on a un bateau en attente d’installation à Venise. On a un bateau à livrer à Monaco. C’est plein de ports qu’on va visiter cette année !

Notre produit, ce n’est pas seulement un robot ramasseur de déchets solides qui flottent, c’est plus que ça. Il y a des sondes multiparamètres à l’intérieur pour contrôler le PH, la température, le redox (qui mesure et indique le pouvoir oxydant d'une substance (le chlore, le brome ou l'oxygène actif) et sa capacité à réduire une autre substance (les matières organiques, les algues). La machine indique tout ça en temps réel. On peut prévoir ou prévenir ou détecter des sources de pollution avant qu’il n’arrive, et qu’il s’éparpille dans tout le port ou dans un lac.

 

Parce qu’en Limousin, il n’y a pas la mer, mais beaucoup de lacs…

Oui, pour les lacs par exemple, on a diversifié notre offre, parce qu’on a beaucoup de demandes. Il y a des clients qui ont des espaces plus petits. Ils n’ont pas besoin de faire usage du robot en permanence. À partir de l’année prochaine, on va surement travailler avec la mairie de Limoges pour contrôler les plans d’eau, contrôler la qualité des PH, le redox par exemple, et nettoyer l’eau. Tout cela va donner des paramètres pour la qualité des plans d’eau. Dans un plan d’eau en été, quand il y a les cyanobactéries, cette toxine qui se libère, les plages sont interdites à la baignade. Avec ce système, on va pouvoir contrôler les sources de pollution, c’est-à-dire tous les micro-organismes qui sont susceptibles de polluer cette eau en amont pour anticiper ces problématiques en été. Parce qu’on ne va pouvoir améliorer la qualité sanitaire des plans d’eau pour éviter des pollutions. C’est très important de commencer à développer ces services. Des mairies nous ont d’ailleurs déjà contactés pour aller analyser différents endroits. On n’a pas besoin d’y aller tous les jours, mais une fois par semaine. C’est notre façon d’apporter notre compétence dans la région. 

C’est surprenant de démarrer le projet en Limousin, malgré tout…

On a commencé le projet de développement ici aussi, parce qu’on a commencé avec EDF, on a travaillé dans les centrales électriques, on a commencé à étudier les paramètres d’eau. Ils ont acheté aussi des prototypes. EDF nous a beaucoup accompagnés, comme d’autres entreprises lancées dans le développement durable. Les ports nous ont très vite contactés parce qu’il s’agit d’un produit qui répond à leurs besoins immédiats. Parce qu’avec la mesure de la qualité de l’eau, on peut avoir beaucoup de paramètre, parce qu’avec toutes les data récoltées dans les endroits où on nettoie, on a aussi beaucoup d’informations pour pouvoir traiter au mieux les plans d’eau. Il y a des lacs en Charente qui sont très intéressés par nos produits.

 

Est-ce que de manière générale, vous avez le sentiment que les gens sont de moins en moins civiques et ne respectent pas l’environnement ?

 

Le problème ce n’est pas forcément les gens, c’est surtout la démographie et la quantité de déchets qu’on produit. L’action humaine a un impact, c'est indéniable. On analyse les nano plastiques, on analyse la concentration des nano plastiques en relation aux planctons. Il faut savoir que chaque semaine en occident, chaque personne consomme des micros plastiques de la taille d’une carte de crédit par semaine. C’est-à-dire un gramme. C’est énorme, c’est beaucoup trop. On ne connait pas encore l’impact, donc c’est très important de faire de la sensibilisation.

 

C’est notre mode de consommation au fond qui accélère cette pollution ? C’est la production de plastique qui n'est juste plus tenable

Alan Alfonso, PDG de Recyclamer à Saint-Junien

La taille S est vendue 30.000 euros, la taille M, coûte environ 90.000 euros, et la taille L, c'est beaucoup plus cher pour aller collecter le 7ᵉ continent, de façon autonome en énergie renouvelable.

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