Une équipe de chercheurs du CNRS, de l'INRA et de l'Université de La Rochelle vient de montrer, pour la première fois, que l'agriculture biologique améliore les performances des abeilles.
Une étude scientifique entièrement réalisée par des chercheurs de Poitou-Charentes, quantifie pour la première fois, l'effet positif du bio sur les colonies d'abeilles qui produisent du miel. Elle démontre que l'agriculture biologique apporte aux abeilles une alimentation diversifiée et surtout régulière, permettant d'atténuer la mortalité. L'étude a été publiée ce mardi dans la revue scientifique internationale « Journal of Applied Ecology ».Ces recherches ont été menées par le CNRS de Chizé dans les Deux-Sèvres, et l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) du Magneraud en Charente-Maritime.Take a look at this new study published today in @JappliedEcology, which shows how #organic farming supports #honeybees through an ongoing supply of floral resources, including weeds and cover crops ??? https://t.co/B4xQ7bpzKv @Inra_France @CNRS pic.twitter.com/WAhQqYHyc9
— British Ecological Society (@BritishEcolSoc) 26 juin 2019
Six années de recherche
En analysant six années de données sur les abeilles domestiques, l' équipe de recherche démontre qu'à l'échelle du territoire, les abeilles sont sensibles à la présence de l'agriculture biologique qui peut atténuer le déclin du pollen dont souffrent les abeilles et par conséquent la mortalité élevée qui en découle."Le colza fleurit en avril ou en mai, le tournesol en juillet août, dans l'intervalle, les régions d'agricultures intensives manquent cruellement de fleurs et donc de pollens et de nectar indispensables aux abeilles. Dans un territoire qui est cultivé en bio, la rotation est plus importante: les cultures sont plus diversifiées et davantage étalées dans le temps", explique Jean-François Odoux qui précise que chez les abeilles, comme chez l'homme, régime alimentaire équilibré rime avec résistance immunitaire.
Plus la disette est forte plus on aura de mortalité à la sortie de l'hiver suivant",
-Jean-François Odoux, chercheur à l'INRA Le Magneraud en Charente-Maritime.
Jean-François Odoux, co-auteur de l'étude a répondu à nos questions.
Où l'étude a-t-elle été réalisée ?
►Cette étude inédite a été réalisée en plein champ dans une zone test appelée Zone atelier Plaine et Val de Sèvre, il s'agit d'un vaste territoire qui comprend des zones d'agriculture intensive, des zones boisées et des zones d'agriculture biologique. C'est très compliqué à mesurer, il faut plusieurs années.Pour en arriver là, on a démonté les ruches tous les 15 jours, on a réalisé des mesures et on a obtenu des milliers de données qui ont été analysées par un doctorant. Les résultats sont extrêmement intéressants.
Quels sont les bienfaits de l'agriculture biologique
►Là où il y a de l'agriculture biologique, il y a plus de haies, il y a une palette de cultures plus importantes. L'agriculture biologique apporte une diversité en ressources florales qui est supérieure à l'agriculture intensive et il n'y a pas de pesticides.
Comment peut-on quantifier les bienfaits de l'environnement bio ?
►Les chiffres de l'étude parlent d'eux-mêmes : dans les colonies entourées de parcelles agricoles biologiques les chercheurs ont constaté jusqu'à 37% d'oeufs, de larves et de nymphes en plus et 20% d'abeilles adultes supplémentaires, voire doubler les réserves de miel.Quels sont les enseignements de cette étude ?
►Nous devons changer de système de production agricole. On peut très bien vivre autrement. Il n'y a aucun insecticide qui ne tue pas les abeilles, les scientifiques disent cela depuis 20 ans mais ils n'ont pas toujours été entendu, on a besoin de politiques qui soient plus encourageantes. Le consommateur peut aussi encourager un système de production agricole de par son mode de consommation alimentaire.Pour nous, c'est un très grand espoir d'arriver à démontrer cela et à faire passer le message qu'il y a d'autres modèles d'agriculture et d'autres solutions.
L'étude en 3 chiffres
D'après l'expérimentation menée sur le périmètre de la Zone atelier Plaine et Val de Sèvre, la proximité de parcelles biologiques peut augmenter
- la surface des oeufs et des larves de 37 %,
- les effectifs adultes de 20 %
- les réserves de miel de 53 % dans les ruchers.