Les images font froid dans le dos. Des canards reproducteurs vivants parmi des canards morts, en décomposition, dans un élevage aux cages défoncées. L214 demande la fermeture de ce site à Lichos en Soule. Le ministère de l'agriculture a envoyé des vétérinaires sur place qui confirment la situation. 

Certains sont en vie, d'autres non. Les cages sont défoncées, les excréments des palmipèdes recouvrent le sol. Sur les images produites par l'association L214, qui milite pour le bien-être animal, on distingue des canards vivants, au milieu de nombreux canards morts, parfois même à l’état de squelettes.

En 15 ans d’enquêtes de terrain, jamais je n’avais vu une situation pareille !
 

Sébastien Arsac, porte-parole de L214


L'inventaire de ce que l'on découvre sur ces images est lourd : des canards enfermés dans des cages étroites où ils ne semblent pas avoir d’espace pour étendre leurs ailes et leurs pattes. Les cages ne sont pour certaines plus en état. " Des canards ont pu s’échapper et pataugent dans les excréments qui recouvrent uniformément le sol recouvert d’une couche de 15 cm d’excréments dans le bâtiment qui rend l’air irrespirable. " avance l'association.
Enfin, les enquêteurs de L214 signalent " des rats, des asticots, des mouches et d’autres insectes en grand nombre."

Lanceur d'alerte

L'association, spécialisée dans ce type d'enquêtes sur la condition animale, a été alertée par un ancien employé, " un lanceur d'alerte " précise Sébastien Arsac.   
Il y a quelques jours, courant août, vérifications faites, des photos et vidéos ont été réalisées in situ. La preuve par l'image, c'est la marque de fabrique de L214 pour provoquer des réactions et appuyer son combat pour la défense des animaux.
Cet élevage fait partie d'un site de reproduction de canards utilisés pour le foie gras. Un couvoir fait également partie de l'installation située à Lichos dans les Pyrénées-Atlantiques, une commune d'une centaine d'habitants.
D'après le témoignage du lanceur d'alerte, il y aurait 300 canards mâles. Il y aurait une dizaine d'employés dont beaucoup d'intérimaires d'après lui. 
  

La situation de cet élevage est catastrophique. Les conditions de vie des animaux sont effroyables, les risques sanitaires sont élevés, les atteintes à l’environnement sont alarmantes et les conditions de travail pour les salariés tout bonnement épouvantables
 

Sébastien Arsac - L214 -

Cette fois, Sébastien Arsac s'attend à coup sûr à la fermeture de l'élevage pour la partie concernée. " L'association espère a minima qu’une interdiction d’exercer une activité d’élevage sera prononcée à l’encontre des personnes responsables de cette situation. Rarement, dans un élevage, les images ont été aussi révoltantes et répugnantes. Souffrance des animaux, risques sanitaires, atteintes à l’environnement : L214 demande, pétition à l’appui, la fermeture urgente et définitive du site et un audit généralisé de l’ensemble des élevages de reproducteurs et couvoirs de la filière foie gras."

La femme du propriétaire de l'élevage réagit ce jeudi matin, interrogée par notre équipe au Pays basque :

On ne se reconnaît absolument pas dans cette vidéo-là. Vous êtes sur place, vous voyez. On n'est pas un agroalimentaire, on est une petite exploitation familiale. Ce montage vidéo est un faux, il est mensonger et malhonnête et fait à partir d'images qui ne correspondent pas au site. L214 a payé une personne en difficultés financières pour pouvoir se procurer des images.

Madame Vidal - couvoirs de Saisons - Lichos ( 64 )

Elle remercie les services vétérinaires et ajoute : "On travaille avec les services vétérinaires, en lien ave ceux. Ils sont en train de faire une enquête et c'est uniquement cette enquête qui décidera quoi que ce soit. "

Vidéo réalisée par l'association L214 ( attention les images peuvent choquer ) 


Y a-t-il une carence des contrôles ?

Comment en arriver à une telle situation ? Nous avons tenté de joindre sans succès pour l'instant le responsable de l'élevage pour connaître ses explications et le siège social de l'entreprise basé dans les Landes.
Nous avons aussi contacté la préfecture des Pyrénées-Atlantiques et son service de contrôles vétérinaires pour savoir à quand remonte la dernière inspection et s'il y a déjà eu des signalements concernant cet élevage. Pas de réponse mercredi. En revanche, la réaction est venue du ministère directement. 

Ce jeudi 20 août, le ministère de l'agriculture réagit peu après minuit et la diffusion des images qui étaient sous embargo, à travers un communiqué de presse :  
"Dès que le ministère en a eu connaissance le 19 août 2020, le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation a immédiatement demandé à la préfecture de diligenter une enquête complète de l’état de l’exploitation. Les services se sont rendus sur place le jour-même et ont pu confirmer certains des manquements à la règlementation en vigueur."

Le ministre ajoute à destination de la filière :

"Une mise en demeure de l’exploitation va être prononcée, qui pourra aboutir à la suspension d’activité. Nous multiplions les contrôles pour protéger les animaux et prendre des mesures strictes afin que justement ces dérives inacceptables, mais isolées et individuelles, ne jettent pas le discrédit sur toute une profession à laquelle j’assure mon soutien et ma confiance."

Julien Denormandie - ministre de l'Agriculture 

" La protection des animaux fait partie de leur job aux services vétérinaires " affirme Sébastien Arsac. L'association est persuadée que la fréquence des contrôles est insuffisante et pas à la hauteur des enjeux en s'appuyant sur les données d'un rapport de 2018 du ministère de l'agriculture : 
" La pression d’inspection annuelle (inspections programmées et inspections sur plainte) est constante avec 1 % des élevages contrôlés à ce titre."  ( Source : RAPPORT ANNUEL 2018 du PLAN NATIONAL DE CONTROLES OFFICIELS PLURIANNUEL (PNCOPA) 2016-2020 )

Autrement dit, l’objectif des services de l’État est d’inspecter les élevages 1 fois tous les 100 ans.
 

Sébastien Arsac - L214 -

Les professionnels de la filière condamne une situation dramatique

Pour le Cifog qui représente la filière foie gras, " C'est proprement scandaleux, nous les condamnons. " déclare Marie Pierre Pé, la directrice. " Si les images sont avérées." car elle précise aussi qu'elle les trouve " théâtralisées ". Quand on lui demande comment cest possible qu'un tel établissement présente ces conditions d'élevage alors qu'il est sensé être contrôlé, elle précise que les " Couvoirs de Saisons", situés à Lichos, est une petite structure qui fait partie de l'interprofession.

Je pense que c'est une petite structure, les services de l'Etat ne peuvent pas être en permanence derrière les petites structures parce qu'il y a beaucoup d'opérateurs. Les grandes structures, elles, sont contrôlées très régulièrement. Peut-être que le problème ce sont les moyens humains pour notre administration. Il y a quand même une responsabilité de l'éleveur, c'est évident.

Marie-Pierre Pé - directrice du CIFOG -

Ce que l'on sait à la mi-journée ce jeudi 20 août - Journal de France 3 Aquitaine - 


La croisade contre les élevages de la filière foie gras

Les conditions d'élevage des canards pour la filière foie gras sont dans le collimateur de l'association depuis toujours. L'industrialisation de ce type d'élevage est mis en cause par les militants. 
" En France, l’écrasante majorité du foie gras est produit de façon industrialisée avec des souches de canards optimisées après des années de recherche dans des laboratoires de zootechnie." argumente L214.

L'hiver dernier, c'est en Dordogne au sein de lycée agricole de Périgueux que L214 avait tourné une vidéo où apparaissaient notamment des images de canetons "jetés vivants à la poubelle". 
Cette fois, l'association " demande au ministre de l’Agriculture un audit général des élevages reproducteurs et couvoirs de la filière foie gras et la publication in extenso des rapports d’inspection. "
 
Pour le cas présent, à Lichos, l'avocate de L214 précisera d'ici quelques jours le dépôt de plainte pour sévices graves, cruauté sur les animaux, abandon qui est envisagé auprès du tribunal de Pau. Les propriétaires de l'élevage ne veulent pas en rester là. Ils assignent en justice L214 pour diffamation et intrusion sur une propriété privée. 
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