L'expérimentation de l'extinction de l'éclairage public lancée au printemps dernier dans plusieurs quartiers, en même temps que le couvre-feu, va être étendue selon Léonore Mondcond’huy, maire de Poitiers.
Etendre l'extinction nocturne de l'éclairage public à d'autres quartiers. C'est la décision prise par la Ville de Poitiers aujourd'hui 11 octobre 2021.
Après les évaluations qu'on a pu faire et les discussions avec les riverains (300 personnes en porte à porte), on a opté pour le créneau minuit-5h du matin.
Des possibilités qui seront étudiées lors de réunion publiques de novembre 2021 à mars 2022 afin de tenir compte des spécificités et des besoins de chaque quartier. "Ce ne sont pas des décisions prises unilatéralement", explique Aloïs Gaborit, conseiller municipal délégué "Patrimoine à énergie positive" avant d'ajouter :
Demain aura lieu la première réunion publique aux Couronneries. Une réunion de restitution d'expériences suite aux mesures mises en place le 9 juin dernier. Nous voulons prendre des décisions en concertation avec la population".
?Une réunion publique sera organisée dans chaque quartier pour échanger sur l'extension de l'extinction de l’éclairage public :
— Poitiers (@poitiersfr) October 9, 2021
?12/10 à 18h30 au Centre d'animation des Couronneries pour les Couronneries
?13/10 à 18h30 au Centre d'animation de Beaulieu pour Beaulieu & le Pâtis pic.twitter.com/Zk80aMW3n7
En effet, l’éclairage public constitue un levier important de la transition énergétique et écologique, avec deux enjeux : diminuer la consommation d’électricité et préserver de la biodiversité par la diminution de la pollution lumineuse.
Une expérimentation d’extinction de l’éclairage public, de 22 heures à 5 heures du matin, a débuté le 2 mars 2021 dans certains quartiers et zones de la ville : Beaulieu, les Couronneries, le Pâtis, la cité des Sept Villes, la voie Malraux et le boulevard périphérique de la Porte-de-Paris jusqu’au giratoire Poitiers Nord.
Depuis le 9 juin, la Ville de Poitiers a décidé de repousser l’extinction de l’éclairage public de nuit à 2 heures du matin (jusqu’à 6 heures). Cette expérimentation, mise en place depuis le 2 mars, doit permettre d’obtenir un parc d’éclairage public moins énergivore avec un objectif : le retour à la nuit étoilée sans toutefois mettre en jeu la sécurité des habitants.
Des avis partagés
A la fin du mois de juin, une enquête a été réalisée auprès des habitants des quartiers concernés afin de recueillir leurs avis et leurs témoignages. Des agents de la collectivisation sont allés à la rencontre de la population et ont recueilli 372 questionnaires. Les résultats sont les suivants :
Les associations liées aux droits des femmes font remonter un sentiment d'insécurité quant à l'extinction de l'éclairage public. Elles préconisent de ne pas éteindre dans tous les lieux. Un problème soulevé dont la cause est plus profonde selon Aloïs Gaborit.
Le sentiment d'insécurité existait déjà quand tout était allumé. Ce n'esr pas uniquement la question de l'éclairage qui est ici soulevée, c'est un problème plus large de sécurité au sein de la Ville de Poitiers qu'il faut prendre en compte.
Economies énergétiques financières
Ces perspectives d’extension permettent aussi de générer des économies financières pour la Ville de Poitiers, permettant d’autofinancer les investissements nécessaires et de financer d’autres politiques publiques. Il faut dire que l’éclairage public a un coût : en 2020, à Poitiers, celui-ci se montait à 900 000 €.
En France, quelques 10 000 communes pratiquent l’extinction de l’éclairage public. Sur Grand Poitiers, 90% des communes éteignent partiellement ou totalement leur éclairage la nuit. Une meilleure gestion de la durée d’éclairage, associée à la rénovation totale des luminaires, à l’échelle de la ville entière permettront d’aller jusqu’à 60% d’économies énergétiques, sur l’ensemble de la ville de Poitiers.
Et c'est un fait. Suite à l'expérimentation, les résultats sont significatifs comme le rapporte Aloïs Gaborit.
On a économisé presque 130 000 kw/h soit 67% d'économies sur la consommation habituelle. Cela représente plus de 15 000 € d'économie.
Conséquences sur la nature et sur la santé
En France métropolitaine, l’éclairage public représente 42 % des consommations d’électricité d’une commune, soit 17 % des dépenses totales d’énergie. Au-delà de l’aspect purement économique, la "pollution lumineuse "(également panneaux et enseignes publicitaires) a des impacts sur les espèces, les écosystèmes et les paysages, la vision, le sommeil et la santé humaine, etc.
La pollution lumineuse est la deuxième cause de disparition des insectes. Pour preuve, un réverbère tue 150 insectes chaque nuit d’été. La lumière artificielle a aussi des conséquences sur la flore, et notamment sur un impact sur la reproduction et la pollinisation des espèces puisqu’on constate une diminution de 62% des visites nocturnes d’insectes dans des lieux éclairés.
Les associations naturalistes, Vienne Nature et LPO Vienne, confirment l’intérêt pour la biodiversité de l’extinction de l’éclairage public sur Poitiers, selon l’étude réalisée sur l’ensemble de la communauté urbaine de 2018 à 2020.
Pour l'instant, l'évolution du mode de gestion de l’éclairage public sur Poitiers a des impacts positifs sur, l’activité de la faune déjà présente, la reconquête d’habitats redevenus favorables et la migration nocturne des oiseaux. Mais ces résultats ne sont, pour le moment, qu'un ressenti et n'ont pas été prouvés.
Nous aurons des résultats sur le long terme. Actuellement, c'est trop tôt pour prouver scientifiquement que les choses bougent. La Ville de Poitiers propose de mettre en place des indicateurs de suivi d’espèces indicatrices de la biodiversité nocturne, comme les papillons de nuit, dès 2022.
L'éclairage nocturne a aussi des conséquences sur la santé humaine et notamment sur la qualité du sommeil. L'extinction de l'éclairage public permet une augmentation du taux de mélatonine dans le corps, favorable au sommeil et utile contre le stress et l'anxiété.