Créatrice d'emplois, la nouvelle unité de fabrication de produits bio, installée dans la petite commune de Genouillé, permet de valoriser les cultures locales, et de revitaliser le territoire. Commercialisés dans les magasins alentours, les produits semblent avoir trouvé leur clientèle. Un exemple encourageant pour une filière fragilisée par la crise.
Farine, pâtisserie, huile, bières et pâtes, l'unité de fabrication de produits bio, en activité depuis quelques mois dans le sud de la Vienne, compte à ce jour quelque 120 références de produits, distribués aujourd'hui dans les magasins bio de la région.
À l'origine de ce projet, un couple d'entrepreneurs grossistes en bio originaire de Reims, qui a trouvé à Genouillé le lieu idéal pour développer cette nouvelle entreprise.
Un bassin de production idéal
"On a constaté un nombre de producteurs extrêmement important : 2700 dans un rayon de 100 km. Quand on est transformateur, c'est forcément un élément extrêmement important. C'est un projet de territoire puisqu'on travaille avec une quinzaine de producteurs locaux dans un rayon d'une quarantaine de kilomètres" explique Frédéric Grünblatt, directeur général d'Ecolience.
Dans cette entreprise, on transforme les produits, sans conservateurs ni additifs. "Cette matière, on va la transformer sur place : la trier, la nettoyer, faire notre propre semoule puis nos propres pâtes avec cette semoule issue du territoire", développe Frédéric Grünblatt.
Marlène Castan, directrice adjointe d'Ecolience, précise : "Il faut que la qualité soit maintenue tout au long de la chaine pour avoir le produit le plus sain possible".
Un bassin de consommation important
L'étude préalable de marché réalisée par l'entreprise avait conclu à la présence d'un bassin important de consommation de produits bio.
La commercialisation de la gamme Ecolience dans les magasins bio de la région le confirme : "Ça aurait pu faire concurrence, mais au final non, il a eu tout de suite de très belles ventes, sans impacter les autres. Au contraire, ça a même créé une dynamique encore plus forte dans notre magasin", constate Alexandre Richard, responsable d'un magasin bio.
Un constat encourageant, alors qu'au terme d’une décennie de forte croissance de l’agriculture biologique, des turbulences sont enregistrées sur certains marchés. Globalement, les chiffres de ventes stagnent depuis 2021, et avec la flambée des prix à la consommation, s
L'intérêt de la polyculture
En signant un contrat de 3 ans avec Ecolience, Augustin Neel, agriculteur à Genouillé, est assuré d'écouler 50% de sa production céréalière. Une garantie qui lui permet de conforter une polyculture aux vertus environnementales, et économiques. "On arrive à intégrer des cultures très spécifiques comme le pavot, le chanvre, les lentilles, la cameline ou le lin, qu'on n'arrivait pas forcément à valoriser auparavant. Indirectement, ça sécurise le système parce qu'on fait des surfaces moins importantes, du coup, s'il y a un aléa climatique sur une culture, ça permet d'éviter de l'avoir sur une surface trop importante" explique l'agriculteur.
Un enjeu global de territoire
Jean-Guy Valette, maire de Genouillé, suit avec intérêt l'installation de l'entreprise Ecolience dans sa petite commune, depuis son origine. Il espère, à travers cette création, inverser la courbe de décroissance de la population de son village qui ne compte plus aujourd'hui que 500 habitants. "Les activités qui étaient liées à une population plus importante, à savoir boulangerie, coiffeur, ont disparu progressivement. L'arrivée d'une entreprise telle qu'Ecolience avec aujourd'hui une vingtaine d'emplois, et demain soixante, va contribuer à redynamiser et revitaliser la commune de Genouillé" assure-t-il.
Déjà, un nouvel espace multiactivités va voir le jour dans une maison de la commune. On y trouvera bar, restaurant, épicerie et espace de formation.
La filière biologique fragilisée
Si l'exemple d'Ecolience semble fonctionner, il n'est pour autant pas représentatif de la situation globale actuelle de la filière biologique. Ces derniers mois, de nombreuses enseignes ont dû fermer leurs portes faute de clientèle dans de multiples villes moyennes.
Au dernier Salon de l'Agriculture, Elisabeth Borne a annoncé un plan de soutien à la filière biologique avec un fonds d’urgence de dix millions d'euros. Plan jugé insuffisant par les acteurs de la filière.
En juin 2022 déjà, un rapport de la Cour des comptes, consacré au soutien à l'agriculture biologique, pointait l’insuffisance des politiques publiques en faveur du développement de l’agriculture bio. Et émettait trois recommandations : " Éclairer les citoyens et les consommateurs sur l’impact environnemental et sanitaire de la filière issue de l’agriculture biologique ; réorienter les soutiens publics à l’agriculture au profit de la filière bio ; et favoriser la création de valeur au sein de la filière issue de l’agriculture biologique."
Une politique de soutien que la Cour des comptes justifiait par les bénéfices de l’agriculture biologique pour la santé publique et l’environnement.