Après l'attaque d'un chasseur par une ourse, le 20 novembre à Seix (Ariège), Alain Reynes, directeur de l'association de défense de l'ours dans les Pyrénées Pays de l'ours-Adet, soutient que la "cohabitation" entre l'homme et l'animal est possible. Il regrette néanmoins le manque d'implication des différents acteurs sur la question.
C'est le premier accident grave impliquant un homme depuis le début de la campagne de réintroduction des ours dans les Pyrénées. Un chasseur a été attaqué par une ourse lors d'une battue à Seix, en Ariège, samedi 20 novembre, avant d'ouvrir le feu et de tuer l'animal.
Suite à cette attaque, qui ravive les tensions entre pro et anti-ours, la préfecture d'Occitanie a annoncé mardi 23 novembre la nomination d'un préfet délégué en charge des questions "ours" dans le massif des Pyrénées.
Alain Reynes, directeur de l'association Pays de l'ours - Adet qui promeut le retour de l'ours dans les Pyrénées, assure que "la cohabitation" entre l'espèce et les activités humaines est possible, à condition d'y "travailler". Invité du 12/13 de France 3 Occitanie mardi 23 novembre, il répond à nos questions.
Cette attaque est-elle un comportement normal ?
La seule explication possible à cet accident est que cette ourse a senti une menace sur ses oursons et qu'elle les a défendus. C'est une réaction normale de défense.
On est dans le cadre d’une battue, un mode de chasse accidentogène en lui-même, mais aussi stressant pour toute la faune car basé sur le fait de faire peur aux animaux pour les rabattre sur les tireurs. Ce sont généralement des gibiers, mais il arrive parfois que des espèces qui ne sont pas concernées soient aussi rabattues. En l'occurrence, c'est le cas de cette femelle.
À savoir qu'un ours adulte a les moyens physiques d'échapper à une battue, mais des oursons ne peuvent pas y échapper. Et un ours femelle restera toujours avec ses petits.
Le nombre d'ours continue d'augmenter dans les Pyrénées. De nouveaux accidents avec des chasseurs ou des randonneurs sont-ils inévitables ?
Je pense qu’ils sont évitables, mais il faut travailler dessus. Malheureusement, tous les responsables dans les domaines concernés, que ce soient les chasseurs ou les politiques, n’ont pas cette volonté. C’est regrettable, et même consternant.
Chacun, de là où on est, doit travailler pour améliorer les conditions de la cohabitation avec l'ours, revoir peut-être les modalités des exercices de battues. Il n'est pas question de s’y opposer, mais de rendre tout cela compatible avec la présence de cet animal.
Le risque zéro n'existe pas ; d’ailleurs, toutes les personnes qui vont en montagne s’en rendent compte. Il y a des accidents de différentes natures, mais on peut les réduire considérablement.
Y a-t-il un manque de prise en compte de la part des chasseurs de la présence de l'ours dans les battues ?
C’est certain qu’il faut prendre en compte la présence de cette espèce, qui est particulière. Il faut réapprendre à vivre avec l'ours. Ce n'est pas simple, cela demande du travail. Encore une fois, il faut que chacun fasse ce travail.
Les personnes qui s’en dédouanent en disant “c'est impossible de vivre avec l'ours” prennent une part de responsabilité dans les accidents à venir.
Alain Reynes, président de Pays de l'ours - Adetà France 3 Occitanie
La présidente du département de l'Ariège, Christine Téqui, appelle à retirer des ours du massif. Pourriez-vous partager cette position en cas de nouvelle attaque grave ?
On n'en est pas là. Mais le problème que l'on a actuellement est que la population d’ours en France, qui est la plus petite d'Europe, n’est pas viable. L'année dernière, 64 ours ont été détectés.
Il ne faut pas mentir : la restauration d’une population viable d'ours est une obligation légale de la France. Donc il va falloir lâcher de nouveaux ours, et il va falloir organiser cette cohabitation. Tout autre discours est démagogique et irresponsable.