Les derniers bilans de la préfecture de l'Ariège laissent présager d'une année noire dans les estives, avec plus d'un millier de bêtes tuées, et près de 500 demandes d'indemnisation pour des attaques d'ours. Des chiffres en nette augmentation par rapport à 2018.
Un été potentiellement catastrophique dans les estives. Avant même la descente des derniers troupeaux, 2019 s’annonce comme une année record en termes de prédation ursine en Ariège.
Selon le dernier bilan de la préfecture, arrêté au 20 septembre, les attaques d’ours ont causé la mort de 1063 ovins depuis le 1er janvier. Soit presque deux fois plus qu’en 2018 (589), et cinq fois plus qu’en 2016 (190).
Des dérochements conséquents
Une augmentation des attaques qui concerne également les bovins (27 bêtes tuées en 2019, 21 en 2018), et les chevaux (12 en 2019, 6 en 2018) mais aussi les ruches, avec trente-trois attaques contre six seulement en 2018.Cette hausse des dégâts liés à la prédation s’explique en partie par les 3 dérochements qui se sont produits cet été. Le plus important d'entre eux, à Aston la nuit du 25 au 26 juin, a tué 265 brebis. Le nombre de demandes d'indemnisation a également augmenté, avec 484 dossiers contre 384 en 2018.
"Ces chiffres n'ont aucun sens" selon les associations pro-ours
Des chiffres importants, remis en cause par l'association Adet - Pays de l'ours. "Là où il faut faire attention, c’est de ne pas mettre tout ça sur le dos de l’ours, explique Alain Reynes, directeur de l'association. Ces chiffres n'ont aucun sens. Personne n’est capable de dire quelle est la part de l’ours et quelle est la part des autres causes de mortalité."Selon l'association, les chiffres sont gonflés par les nouvelles modalités d'indemnisation entrées en vigueur au mois de juillet qui, en l'absence de preuves, accordent le bénéfice du doute aux éleveurs si la responsabilité de l'ours ne peut être écartée.
Je n’ai pas de problème vis-à-vis des éleveurs, qu’ils soient indemnisés, poursuit Alain Reynes. Le seul problème que j’y vois, c’est que les opposants à l’ours utilisent ces chiffres pour incriminer l’ours et essayer de montrer que l’ours commet énormément de dégâts. La générosité du système se retourne contre l’ours.
Des pertes préjudiciables pour la santé des éleveurs
Le son de cloche diffère chez les opposants à l'ursidé. Philippe Lacube, président de la chambre d'agriculture de l'Ariège, évoque des chiffres "alarmants", et insiste sur les conséquences (au-delà du préjudice financier) de ces pertes sur la santé des éleveurs.Alors que des effarouchements ont eu lieu pour la première fois cet été sur des estives de l'Ariège, le déclenchement de ces mesures est, selon les éleveurs, une preuve que la cohabitation entre l'ours et le pastoralisme est impossible.Derrière ces chiffres il y a des hommes, des femmes. On a des gens qui sont vraiment au fond du trou psychologiquement, au bord de la rupture. Quand la catastrophe arrive, c’est à la fois de la douleur, une forme de culpabilité, aujourd’hui on voit vraiment des gens dans la détresse.
"Nous ce qu’on demande aujourd’hui, c’est que les éleveurs aient le droit de protéger leur troupeau et de tirer quand l’ours veut prédater, poursuit Philippe Lacube. Et ensuite, il faut envisager leur retrait, parce qu’aujourd’hui c’est intenable, invivable et c’est tout un pan d’économie et de culture qu’on est en train de tuer. C’est un drame que nous vivons."