Les membres de l'expédition Deep Time sortiront de la grotte de Lombrives le 24 avril, soit 42 jours après leur entrée. Revue des expériences qui y sont menées pour comprendre les capacités d'adaptation de l'être humain dans un nouveau milieu.
10°C, taux d'humidité à 100%, pas de cycles jour/nuit, aucune notion du temps, les quinze membres (7 femmes et 8 hommes) qui font partie de l'expédition 400 mètres sous terre dans une grotte ariégeoise sont soumis à rude épreuve. Mais le moral est bon. A un peu plus d'une semaine de leur sortie le 24 avril, Christian Clot leur leader et chef de projet de la mission donne quelques précisions sur les expériences menées.
Un nouveau système de vie
Ils sont dans la peau des nouveaux explorateurs. Les 15 membres découvrent chaque jour un nouveau territoire, un système de vie inhabituel où ils doivent s'adapter totalement. La mission doit justement étudier comment l'être humain fait face à ces changements. "Chaque équipier remplit des taches qu'il doit faire seul ou en groupe, mais aussi un questionnaire pour comprendre son évolution dans ce nouveau milieu." Un challenge qui passionne Christian Clot. "Nous avons des gélules que nous avalons qui donnent la température centrale. Nous prenons des mesures biologiques de type cortisol, melatonine. Nous faisons régulièrement des comparatifs sur l'évolution des poids, des masses corporelles. Bref, nous sommes dans une forme de paramétrage de chaque individu dans la grotte."
Des paramétrages biologiques mais aussi sensoriels avec tout un protocole de tests plus ou moins lourds qui se font de manière régulière. Tous les 5-6 cycles (un cycle étant une phase de sommeil puis de réveil) des prises de sang sont aussi réalisées pour surveiller l'état de santé.
Des expériences avec la réalité virtuelle
Ces personnes sont coupées du monde, hors du temps, mais ils ont tout de même des ordinateurs, des machines qui doivent elles aussi s'adapter à des conditions un peu extrêmes. Evidemment, ces machines sont paramétrées pour ne pas donner d'indications et d'informations qui permettraient aux individus d'avoir des repères.
Des expériences sont menées avec la réalité virtuelle. Elles permettent de mesurer comment nos sens (goût, odorat, toucher, etc...) évoluent et éventuellement se transforment. "Nous avons également des encéphalographies qui permettent de comprendre les charges électriques dans le cerveau. Appréhender également comment évoluent nos fonctions cognitives, notre cerveau dans une telle situation. Nous portons aussi des appareils qui mesurent nos cycles de sommeil de manière extrêmement précise."
D'autres tests portent également sur la sociologie, l'éthologie, la capacité de ce groupe à fonctionner, ou pas, ensemble, comment l'individu s'adapte, se positionne. Des caméras observent les comportements de ces 15 individus passablement déboussolés. Le groupe est-il capable de retrouver des fonctions collectives, combien de temps va t-il mettre à s'adapter, autant de questions qui taraudent le scientifique pas du tout érodé par l'expérience.
C'est absolument extraordinaire à voir, c'est de la science en marche, on fait une science de terrain, dans des situations réelles de vies.
Comment un groupe humain peut-il vivre sans information temporelle ? Comment peut-il reproduire des capacités de vies ? C'est tout l'objet de cette expérimentation.
Dès que les 15 membres remonteront à la surface pour retrouver le jour et leurs repères, toutes ces données seront analysées. La lumière sera faite sur ces humains dans une nouvelle écologie de vie. Ces cobayes volontaires auront été aussi très certainement influencés par la magnifique grotte de Lombrives.