Samedi 20 novembre, un chasseur a été attaqué par une ourse lors d'une battue à Seix en Ariège, avant d'ouvrir le feu et de tuer l'animal. Gravement blessé, l'homme de 70 ans a été hospitalisé. La présence d'une ourse et de ses deux oursons dans le secteur avait été constatée dès le mois octobre.
Près de 24 heures après l'attaque d'un ours contre un chasseur à Seix (Ariège) dans les Pyrénées, de nombreuses informations sur cette affaire sont désormais connues. Le point sur cet accident pouvant relancer la guerre de l'ours entre opposants et défenseurs.
LES FAITS
Samedi 20 novembre, un groupe de chasseurs traque le sanglier sur la commune de Seix (Ariège), dans le secteur du Couserans. Vers 15 h 30, un appel aux secours est lancé. L'un d'eux, âgé de 70 ans, vient d'être blessé par une ourse. Le chasseur, gravement blessé au niveau de l'artère fémorale, est évacué par les gendarmes du PGHM vers l'hôpital de Foix.
Selon la version de la victime, il aurait été attaqué par une ourse accompagnée de ses petits. La femelle l'a mordue à la jambe. Le chasseur fait feu à deux reprises vers l'animal. "Il est grièvement blessé, il a les jambes déchiquetées, le péroné cassé et l'artère fémorale touchée. L'ourse l'a traîné sur des dizaines de mètre et il n'a dû son salut qu'à la présence dans la battue d'une pompier volontaire qui lui a fait un point de compression" rapporte Jean-Luc Fernandez; président de la Fédération de chasse de l'Ariège.
Mais selon Léa Filippi, substitut du procureur du parquet de Foix, la victime va "mieux" et "son pronostique vital n'est pas engagé".
L'ourse a été retrouvée morte à quelques mètres des lieux où le chasseur a été secouru. " Les gendarmes ont repéré une carcasse d'ours en contrebas du lieu où a été trouvée la victime, ce qui pourrait accréditer la thèse d'un accident lié à la rencontre entre l'homme et l'animal", indiquent samedi soir les services de la préfecture de l'Ariège.
L'OURSE PRÉSENTE DANS LE SECTEUR DEPUIS PLUSIEURS SEMAINES
Grâce au Réseau Ours Brun, la présence d'une ourse et deux de ses oursons sur la commune de Seix (Ariège) a été constatée le 11 octobre grâce à des caméras automatiques disposées sur les arbres. À l'heure actuelle, aucune information ne permet de savoir si cette ourse et ses deux oursons étaient encore présents dans le secteur plus d'un mois après.
Quoi qu'il en soit, "les chasseurs sont normalement formés à l'hypothèse de la présence de l'ours" rappelle Alain Reynes, directeur de l'association Pays de l’Ours. Comme le souligne l'arrêté préfectoral pour l'ouverture de la chasse en Ariège, daté du 10 mai, "la détection d’une présence d’ours avérée" entraîne la "suspension des chasses en battue". "Cette battue a été très bien organisée, préparée dans les règles, assure Jean-Luc Fernandez, président de la fédération de chasse de l'Ariège. Suspendre une battue en raison de la présence de l'ours est un faux problème. Ils sont présents partout. Cela devient inapplicable. Si l'on veut mettre sous cloche la montagne, il faut le dire."
UNE ENQUÊTE JUDICIAIRE OUVERTE
"Une enquête judiciaire a été ouverte pour comprendre les circonstances de cet accident" indiquait le soir même de l'accident la préfecture dans un communiqué de presse. Les auditions ont rapidement commencé. Selon les informations de France 2, un témoin, était entendu dès dimanche 21 novembre dans la matinée.
Une représentante du parquet de Foix, la substitut Léa Filippi était présente dimanche matin à Seix. "Les premiers éléments semblent confirmer que nous sommes bien dans le cadre d'une action de chasse, d'une battue, a expliqué la magistrate. Il va falloir désormais en connaître les conditions exactes".
Cette enquête, confiée à la Brigade de recherche de Saint Girons, l'association Pays de l'ours la souhaite "rapide et complète". "Nous ne savons pas encore si nous nous constituons partie civile dans ce dossier, mais une chose est certaine, nous ne sommes pas totalement rassurés" avoue Alain Reynes. En cause, le manque d'informations et l'absence d'avancées de la justice dans d'autres affaires similaires, comme cet ours tué par balle en juin 2020 sur les hauteurs du village d'Aulus-les-Bains (Ariège), l'incendie d'un véhicule d'agents de l'ONCFS en juillet 2019 ou encore en 2017 cette vidéo d'un commando masqué et armé annonçant la réouverture de la chasse à l'ours dans les Pyrénées.
Les enquêteurs devront vérifier l'exactitude de la version de la victime. Et répondre à plusieurs questions : quelles consignes de sécurité ont été passées aux chasseurs avant la battue ? Quelle a été l'attitude du chasseur face à l'ourse ? Si la présence de cette ourse dans le secteur était connue, pourquoi maintenir la battue ? Cette battue, avait-elle réellement comme seul objectif de chasser des sangliers ? "Toutes les hypothèses doivent être étudiées" espère le directeur du Pays de l'ours.
LES OURSONS LAISSÉS DANS LA NATURE
La carcasse de l'ourse tuée sur les hauteurs de Seix doit être héliportée dimanche 21 novembre dans l'après-midi. L'information reste à confirmer. Cet animal pourrait être Caramelles. L'histoire se répèterait comme le souligne Pays de l'ours dans son communiqué : "sa mère Mellba a également été tuée lors d’une battue en septembre 1997, alors que Caramelles et son frère Boutxy n’avaient que 8 mois."
Caramelles avait été laissée dans la nature. Ses deux oursons, désormais sans leur mère, devraient eux aussi y rester. "Pour des oursons de ces âges-là, il n'est pas préconisé de les retirer de leur milieu naturel, explique Alain Reynes. Surtout, à quelques semaines de leur entrée en tanière".
Mais les défenseurs des ours réclament que "l'’OFB suive particulièrement ces animaux, que les battues soient suspendues dans le secteur, et nous appelons les chasseurs de la vallée à la plus grande vigilance envers ces oursons inoffensifs et encore fragiles".