Canicule et sécheresse de l'été 2022 ne cessent d'avoir des conséquences. C'est le cas pour des produits de consommation très prisés lors des fêtes de Noël et de fin d'année. Exemple : la truite de l'Ariège dont la production a chuté. Reportage.
Température trop chaude. L'eau qui vient à manquer. Cet été 2022 s'est avéré meurtrier pour certains élevages. À commencer par celui de poissons. En Ariège, au pied du Plateau de Beille, l'environnement est idéal pour la pisciculture. La truite arc-en-ciel, réputée pour sa chair, est très prisée pour les repas de fête. Mais en cette fin d'année, elle pourrait bien venir à manquer.
Canicule et sécheresse ont fait des dégâts dans les bassins d'élevage. "Habituellement, nous sommes sur une production de soixante tonnes à l'année avec de l'eau fraîche qui arrive en direct de la montagne. Et là, on va être plutôt sur une quarantaine de tonnes", avance Morgan Catala, co-gérant de la ferme aquacole des Chutes d'Aston.
Espèces sensibles et fragiles
Comme chaque jour, Morgan Catala nourrit ses poissons à la main. Trois espèces de truite sont élevées dans les bassins de la ferme : la Fario, l'arc-en-ciel et l'omble. "Cette année, ça a été très compliqué avec la sécheresse et les canicules que nous avons pu connaître", admet-il. L'explication ? "Les salmonidés, ce sont des espèces très fragiles qui ont besoin d'une température inférieure à 18 degrés."
Quand les cours d'eau montent à plus de 20°, on a des animaux qui sont fragilisés, qui ne se nourrissent plus, ce qui entraîne des pertes de croissance. Et donc, des pertes de production. Et si ça dure trop longtemps, ça devient létal pour les truites.
Morgan Catala, co-gérant de la ferme aquacole des Chutes d'Aston
Trop chaud, pas assez d'eau... Un cocktail explosif que les gérants de la ferme ont désamorcé au mieux, en optimisant au maximum leurs différents bassins.
Recyclage de l'eau
"Habituellement, sur la période estivale, on travaille avec 700 litres d'eau à la seconde pour le bon fonctionnement de l'exploitation", explique Morgan Catala, posté au bord d'un bassin de la ferme. "Cette année, on était plus proche des 400l/s", autrement dit, il a fallu passer l'été avec quasiment deux fois moins d'eau.
Des bassins de sortie d'eau ont été reconvertis en bassins d'élevage, afin de réutiliser l'eau au maximum, de s’adapter au faible débit et assurer, malré tout, le développement de l’élevage.
Plus la température monte, moins il y a d'oxygène dans l'eau. C'est à ce moment-là que l'on a le plus besoin d'eau, mais qu'il y en a le moins de disponible pour les élevages.
Morgan Catala de la ferme aquacole
Y-a-t-il eu une hausse de mortalité chez les truites ? "C'est une évidence", répond le pisciculteur. "Un problème national, observé partout en France, y compris dans les régions les plus pluvieuses et productrices de truites comme en Normandie, en Bretagne ou au Pays-Basque", rajoute-t-il.
300 kilos de fumets en moins
Dans la boutique de l’exploitation, les réservations pour les fêtes ont débuté. Et cette année, il vaut mieux s’y prendre à l’avance. "Il faut prendre conscience qu'avec l'année que l'on vient de passer, on a moins de stock que d'habitude", nous dit Amandine Lafon.
Les produits phares de la ferme, ce sont la truite arc-en-ciel et de la grande truite sous forme de filet frais ou fumée.
En général, on tourne autour des 900 kilos de fumets pour les fêtes. Là, on a quand même 300 kilos de moins que l'année dernière.
Amandine Lafon, co-gérante
Résultat : le modèle de distribution a été revu. "Habituellement, 2/3 de la production part chez des revendeurs. Cette année, on a recentré sur la vente directe en gardant 50% de notre production."
Une production plus restreinte et des circuits plus courts, voilà peut-être les solutions qui pourraient permettre de pérenniser une filière particulièrement senible au réchauffement climatique.