A Montoulieu, en Ariège, la cérémonie d'hommage aux Harkis a été interrompue brutalement par la Préfète qui n'a pas apprécié que les représentants de Harkis lui tournent volontairement le dos pendant l'inauguration d'une stèle.
En Ariège, la cérémonie nationale d'hommage aux Harkis aura été quelque peu écourtée... Alors que dans le même temps, François Hollande reconnaissait lors d'un discours solennel aux Invalides "la responsabilité des gouvernements français dans l'abandon des harkis", une cérémonie officielle se tenait à Montoulieu, en Ariège. C'est sur cette commune qu'une centaine de Harkis ont été accueillis en 1964, au lendemain de la guerre d'Algérie. Dans le petit hameau de Ginabat, 25 familles sont arrivées avec leurs enfants. C'est là que ce dimanche, une stèle en leur mémoire était inaugurée. Mais c'est là aussi que les représentants de la communauté Harkie de l'Ariège ont décidé de se faire entendre une nouvelle fois. Au moment de l'inauguration, ils ont choisi d'offrir leur dos à la Préfète de l'Ariège et aux élus présents. Une manière de "tourner le dos à une République" qui les ignore depuis si longtemps alors qu'ils réclament depuis des années une reconnaissance mais surtout des mesures concrètes, sociales ou d'accès à l'emploi.
Cette manifestation symbolique n'a pas été du goût de la Préfète qui a décidé d'interrompre la cérémonie.
Voir ici le reportage de Stéphane Compan et Thierry Villéger :
Une douloureuse histoire
Les Harkis ont été des auxiliaires de l'armée française pendant la guerre d'Algérie de 1954 à 1962. Après les accords d'Evian qui scellent l'indépendance de l'Algérie, le 18 mars 1962, ils sont désarmés et abandonnés par les autorités françaises qui laissent le territoire au FLN ( le Front de libération national de l'Algérie). Selon les historiens, entre 55 000 et 75 000 d'entre eux, seront massacrés par l'armée de libération nationale (A.L.N.), le bras armé du F.L.N. Environ 60 000 Harkis seront rapatriés en France, où ils seront le plus souvent parqués dans des camps précaires.Avec leurs descendants, leur communauté est estimée aujourd'hui à 500.000 personnes en France.
Une histoire désormais reconnue
"Je reconnais les responsabilités des gouvernements français dans l'abandon des harkis, les massacres de ceux restés en Algérie et les conditionsd'accueil inhumaines des familles transférées dans les camps en France", a déclaré ce dimanche le chef de l'Etat. En reconnaissant ces "responsabilités", François Hollande a honoré une promesse faite en avril 2012 durant la campagne présidentielle, en reprenant pratiquement au mot près le texte de sa déclaration de l'époque. Il l'avait déjà fait en partie lors de la même cérémonie le 25 septembre 2012, mais à l'époque c'était via un message lu par Kader Arif, son ministre délégué aux Anciens combattants.
Evoquant une "vérité implacable" et "cruelle", François Hollande a parlé des "combattants qui furent privés de la protection de la France au lendemain de la guerre d'Algérie et dont l'abandon ne fut jamais pleinement reconnu par la République". Pour François Hollande, les harkis et leurs descendants souffrent encore "de discriminations, préjugés, racisme, intolérance". Il a souligné les actions entreprises par ses prédécesseurs et sous sa présidence, dont un "plan d'action" en 2014. "Vous êtes des exemples d'adhésion à la France même quand elle a pu vous manquer et elle vous a manqué", a-t-il déclaré.