Sur la Montagne Noire, dans l’Aude, un immense projet de construction de complexe touristique et de golf sur des terres agricoles rencontre une vive opposition d'agriculteurs et d’habitants.
Dans l’Aude, la Montagne Noire fait face aux Pyrénées. Le paysage y est bien souvent escarpé mais au-dessus de la commune de Fontiers Cabardès, des pâtures, des champs et une ancienne ferme suscitent la convoitise.
Un immense complexe touristique
“On a ici environ 110 villas sur l'ensemble du champ qui vont être réalisées”, explique Emmanuel Pistre, l’un des habitants du village opposé au projet, en parcourant du regard les terres environnantes. “Là-bas, là où il y avait la ferme de la Canade, on va avoir l'hôtel et des appartements, tandis que le golf sera plus en aval, en dessous." Un golf, des villas, un hôtel, au total, le complexe s’étendra sur plus de 140 hectares.
De nouveaux habitants, des emplois supplémentaires et des rentrées d’argent en perspectives ? Au contraire d’inspirer, ce projet inquiète par son gigantisme. La commune de 500 habitants doublerait sa population et les habitants craignent une bétonisation des lieux. Ils viennent de créer une association pour s’opposer au golf et à son complexe : l’Association Montagne Noire Avenir. “On ne pourra plus randonner, on ne pourra plus faire de VTT ! Tout ça fait partie de notre quotidien, on va perdre en qualité de vie et en attractivité”, se désole Anne Lesné, une des habitantes à l’origine de l’association. “Nous vivons dans un village rural et bucolique, les gens ne vont plus vouloir venir s’y installer. Pourtant notre population est assez jeune, l’école est pleine, c’est attractif pour les familles, il faut préserver cette qualité de vie !”
La menace d’un village fantôme
Les habitants craignent l’impact des travaux sur leur qualité de vie et ce qui se passerait si les logements ne trouvaient pas preneur. “Ils vont être vendus sur plan, est-ce qu’ils vont vraiment se remplir de vie ? On ne sait pas”, s’inquiète-t-elle. “On connaît des exemples d’échecs monumentaux avec des villages fantômes.” “Ce projet économiquement est très incertain”, complète Emmanuel Pistre, également à l’origine de l’association. “La zone d'achalandage du golf est trop faible, c'est la fédération française qui le dit."
Les agriculteurs de la Confédération Paysanne particulièrement inquiets
Justine Bianconi est éleveuse de chèvres à Fontiers Cabardes. Chaque jour, elle emmène paître ses bêtes sur ses terres traversées par un cours d’eau. Pour elle, la présence d’un golf est synonyme de pollution. "Vous voyez ce ruisseau qui est le ruisseau d'abreuvement de nos chèvres sur l'automne, on a peur qu'il soit pollué puisque le projet de golf est juste au-dessus, en amont, et on a peur qu'il y ait des déversements sur cette eau", explique-t-elle.
Autre grief, ces terrains étaient des terres agricoles. 140 hectares de pâtures et de champs plats, riches, fertiles et naturellement irrigués, ce qui en fait un atout précieux pour les éleveurs, en particulier en altitude. La Confédération agricole dénonce cette perte. “Sortir ces terres de l’agriculture pour en faire des zones touristiques où l’on bétonne et où on étend des produits phytosanitaires alors que nos fermes sont en insécurité alimentaire et manquent de terres en altitude et c’est ça qui nous pose problème”, dénonce Justine Bianconi qui est également porte-parole de la Confédération Paysanne. “Là haut, on y faisait du maïs sans irrigation, c’est dire la pluviométrie et la profondeur des sols !”
Une convention signée entre le promoteur et la commune
A Fontiers Cabardès, le maire n’entend pas s’opposer au projet, il est juridiquement contraint. La précédente municipalité a signé une convention avec le promoteur lorsque ce projet a été lancé il y a une dizaine d'années. "Si on ne se conforme pas à cette convention, on est passible d'une amende de 300 euros par jour pendant 30 ans. Voilà", explique-t-il. "Moi je n'ai aucun intérêt dans le golf, aucun, c'est privé, ils font ce qu'ils veulent". Le nouveau PLU intégrera donc le complexe touristique. L’enquête publique doit débuter en mars prochain.
Nous ne sommes pas parvenus à joindre l’entreprise chargée du projet.