Un groupe de spéléologues aveyronnais s’est aperçu que toute une partie du réseau souterrain Bise-Ouragan, accessible depuis L'Hospitalet-du-Larzac, s’est asséché, suscitant l’inquiétude.
Dans le sous-sol du Larzac, des spéléologues aguerris ont fait une découverte agréable pour les yeux mais inquiétante pour l’avenir. Au mois de septembre, lors d’une sortie dans le réseau souterrain Bise-Ouragan, composé de 4,5 kilomètres de galeries à 180 mètres sous la surface de la Terre, un petit groupe de spéléologues aveyronnais s’est aperçu que toute une partie du réseau s’était asséché, mettant au jour de splendides grottes.
"Habituellement, on s’équipe de bouteilles afin de pouvoir plonger et parcourir ce secteur, même à cette période de l’année. C’est une cavité que l’on connaît depuis 30 ans. Mais cette fois-ci les galeries étaient à sec, ou quasiment. C’est la première fois que l’on constate un arrêt du ruissellement de l’eau dans ces cavités et un assèchement des parties habituellement noyées", raconte Jean-Louis Rocher, l’un des membres du club Alpina Millau qui participait à cette exploration.
Du jamais vu depuis 30 ans
Dans cet endroit, l’eau s'inflitre dans la roche souterraine avait quasiment disparu. "C’est un niveau d’étiage automnal exceptionnellement bas, du jamais vu depuis que ce réseau a été découvert en 1994. On ne s’attendait pas du tout à cette découverte, la baisse du niveau de l’eau a été très rapide" précise Jean-Louis Rocher. Certes, cet assèchement permet à tous les spéléologues, même ceux qui ne sont pas plongeurs, de pouvoir venir explorer et admirer ces cavités, mais cet assèchement suscite l’inquiétude des observateurs aguerris qu’ils sont: "Cela fait peur quant à la quantité d’eau qui peut sortir du causse, on s’est dit qu’il n’y avait plus de réserve d’eau dans le karst", raconte Jean-Louis Rocher. Ce que l’on appelle le « karst », c’est un relief où l’eau, plutôt que de s’écouler en surface, s’infiltre dans le sous-sol. Le mot vient de Kras, une région de Slovénie où ce type de relief est très présent.
En France, on parle communément de "causse". On en trouve dans de nombreuses zones en Occitanie, dans le Lot, le Tarn et l’Aveyron notamment. Mais les spéléologues emploient le mot scientifique : le karst. Ils s’inquiètent donc du très faible ruissellement dans ce causse, situé à proximité de la commune de l’Hospitalet-du-Larzac, à 25 kilomètres au sud de Millau. D’autant qu’il savent que d’autres cavités des Grands Causses affichent elles aussi un déficit important en eau de par des assèchements de plus en plus courants. Certes, les pluie de ces derniers jours pourraient avoir fait remonter un peu le niveau de l'eau, mais il est parfaitement inhabituel de constater un si faible niveau enseptembre.
Une tendance nationale
Ce constat n’est pas isolé. En France, le Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM) suit l’état des nappes d’eau souterraines. Sur une carte publiée sur son site, on peut observer que le niveau d’eau demeurait 66% en dessous des normales mensuelles sur une grande partie de la France au 1er octobre 2023. « Les orages de mi-septembre ont été peu efficaces pour la recharge des nappes » note le BRGM.
D’après la carte établie par cet organisme, le niveau d’eau des nappes phréatiques situées dans l’Aveyron sont à un niveau « modérément bas ». "Depuis le début des années 2000, la tendance quant au niveau d’eau des nappes est à la baisse", souligne Jean-Louis Rocher.
Mais dans ce département, la sécheresse s’illustre aussi en surface. Dans le nord du département par exemple, dans le canton de Laguiole, le débit de la rivière Siniq est si faible qu’il faut cesser d’y prélever de l’eau. A trois reprises depuis le début de l’année 2023, les habitants du territoire Aubrac-Caraldez-Viadène ont dû être ravitaillés en eau potable par camion-citerne.