Rupture de confiance. C'est le motif invoqué par la présidente de l'Occitanie pour évincer Virginie Rozière de son poste à la tête du comité régional du tourisme. Cette décision entérine le clivage entre les deux femmes alors que le tourisme traverse une crise sans précédent avec le COVID 19.
C'est une information de nos confrères du d'Oc qui se sont procuré un courriel envoyé par Carole Delga aux élus de la majorité pour justifier sa décision. Le 3 avril dernier, la commission permanente du Conseil régional d'Occitanie a voté l'éviction de l'Héraultaise Virginie Rozière de la présidence du comité régional du tourisme (CRT) pour cause de "rupture de confiance". Le feu couvait depuis longtemps. Les deux femmes ne cachaient pas leurs divergences et le personnel du comité du tourisme parle de climat délétère au sein des services. Quoi qu'il en soit cette éviction arrive au pire moment, à l'heure où le secteur touristique de toute la région Occitanie traverse une crise sans précédent avec le coronavirus et les mesures de confinement.
Débarquée pour rupture de confiance
Dans le courriel envoyé aux élus de la région, Carole Delga justifie cette éviction en énonçant plusieurs de ses griefs envers le travail de la présidente du CRT.
Elle dit "regretter l’attitude de défiance de Virginie Rozière à l’encontre de l’institution régionale, oubliant même de représenter le CRT au sein de la collectivité. » Carole Delga évoque aussi « un manque de coopération » avec les différents partenaires et un « dysfonctionnement préjudiciable à l’efficience de nos actions en faveur de l’économie touristique. »
Carole Delga accuse Virginie Rozière d'avoir mal fait son job
Comment accepter que la présidente du CRT n’ait pas répondu favorablement aux demandes de rendez-vous de partenaires tels que la Ville de Lourdes, deuxième destination touristique française ou la puissante Fédération régionale de l’Hôtellerie de plein air ?
Dans son courriel, La présidente du conseil régional regrette également du « retard », des «lenteurs» ainsi que certaines orientations stratégiques qui se résumeraient à « des actions de communication publicitaire ».
Prétextes, répond Virginie Rozière
Un argumentaire nul, selon l'élue montpelliéraine qui réfute toutes ces critiques. Jointe ce matin au téléphone, l'ex présidente du CRT se dit perplexe. Pour elle, il n'y avait pas de divergence affichée de la politique touristique menée par la Région. Les orientations prises pour tenter d'atténuer les effets de la crise du coronavirus sur l'économie touristique auraient même fait l'objet d'une bonne concertation. Quant aux accusations d'avoir fait lanterner la ville de Lourdes ou l'Hotellerie de plein air, Viginie Rozière dit rester perplexe devant ces arguments: " j'ai même le 06 du président de l'hotellerie de plein air car on bosse souvent ensemble!".
Pour l'élue héraultaise, la réalité du conflit entre les deux femmes est ailleurs.
Virginie Rozière invoque un règlement de compte pour son soutien aux salariés en souffrance au sein du CRT
Selon la Montpelliéraine démise de son titre de présidente du CRT, le coeur de la crise, c'est son soutien aux salariés de son service. Plusieurs d'entre eux (8) se plaignaient depuis un an à la médecine du travail de harcèlement de la part du Directeur Général du service, Jean Pinard. Une enquête (par des consultants) a été ouverte. En attendant ses conclusions, Virginie Rozière avait demandé, comme lui préconisait l'avocat du CRT, des mesures d'éloignement du directeur général. Carole Delga lui aurait alors reproché une mesure "disproportionnée". La présidente du CRT a été evincée une semaine avant les conclusions de l'enquête, qu'elle ne connait pas. La présidente du conseil régional a quant à elle envoyé une vidéo aux salariés où elle affirme que l'enquête conclut que les plaintes sont sans fondement et que le DG sera de retour à son poste le 14 avril.
Ce dossier n'est certainement pas politique au départ" analyse Virginie Rozière, qui était la tête de liste dans l'Hérault pour les dernières régionales, en 2015. "Certes, depuis que j'ai refusé de soutenir Macron, contrairement à d'autres membres du PRG, je ne me suis pas fait que des amis..." Mais je ne pense pas que c'était la motivation principale, sinon ça aurait été fait depuis longtemps!
Le soutien du conseiller régional Guilhem Serieys à Virginie Rozière
Contrairement à la première information que nous avons relayée sur un vote à l'unanimité de la commission permanente pour l'éviction de Virginie Rozière, le conseiller régional Guilhem Serieys s'est opposé, au cours de la séance, à l'adoption de cette éviction et affiche un soutien sans faille à la présidente du CRT déchue.
Notre information provenait du courriel envoyé par Carole Delga à Virginie Rozière pour justifier son éviction.
En voici un extrait:
Madame la Conseillère régionale,
La commission permanente de ce vendredi 3 avril a renouvelé les membres du conseil d’administration et de l’assemblée du Comité régional du tourisme Occitanie. Dans cette nouvelle configuration, vous n’êtes désormais plus habilitée à exercer au nom de la Région les fonctions de Présidente du CRTO.
Cette décision votée à l’unanimité résulte d’une rupture de confiance à votre égard au cours de ces derniers mois...
signé Carole Delga.
Sur son compte facebook, le conseiller régional Guilhem Serieys revient sur le déroulement de la séance.
Et maintenant ?
C'est le vice-président délégué au tourisme, Jean-Louis Guilhaumon, qui récupère la présidence par intérim. Le maire P.S de Marciac est a ce titre assez qualifié pour mesurer l'impact du tourisme sur les villages, comme sa commune qui prospère grâce au festival de Jazz. En revanche le tourisme est un secteur (un de plus!) dont la présidence est désormais recentrée sur l'ancienne entité Midi-Pyrénées. Son attribution à l'élue héraultaise correspondait pourtant à un partage des compétences entre les deux anciennes régions, le tourisme étant incontestablement le principal atout du Languedoc-Roussillon.
Réaction de Jean Pinard, le directeur général du comité régional du tourisme
Mis en cause nommément par Virginie Rozière qui a exprimé que l'origine de son éviction par Carole Delga vient du conflit qui l'opposait au directeur général, Jean Pinard tient à rectifier plusieurs points:- Selon lui, il n'y a eu qu'un salarié (par ailleurs élu et candidat aux dernières régionales contre Carole Delga, précise J.Pinard) qui l'a attaqué pour harcèlement.
- une procédure est diligentée et le CSE (délégués du personnel et délégués syndicaux) affirme qu'il n'y a pas de harcèlement.
- Enfin selon Jean Pinard, qui a repris le travail lundi dernier après 7 semaines de mise à pied, Virginie Rozière a bien pris connaissance du rapport du cabinet externe qui a diligenté cette enquête.