La France, l'Espagne et l'Andorre ont peu coopérés pour protéger les espaces naturels des Pyrénées. Depuis 2014, à travers le projet GREEN, les trois pays collaborent afin d'améliorer la biodiversité des milieux forestiers, des milieux agro-pastoraux et des milieux aquatiques du massif Pyrénéen.
Depuis 1659 et la signature du Traité des Pyrénées, le massif Pyrénéen est officiellement la frontière entre les royaumes de France et d'Espagne. La biodiversité des Pyrénées, elle, n'a jamais connu de frontières. La présence de milieux identiques a engendré des problématiques similaires entre l'Etat français, l'Etat espagnol et l'Etat Andorran. Il a fallu attendre 2016 et le projet GREEN pour qu'ils décident enfin de collaborer ensemble.
"Le projet GREEN est un projet de coopération transfrontalière entre espaces naturels pyrénéens réunissant des partenaires espagnols, andorrans et français qui partagent les mêmes enjeux de préservation, de gestion et de valorisation des territoires du Massif des Pyrénées" explique Sébastien Chauvin, directeur de l'une de ces structures, le Forespir.
Faciliter les échanges
Créer un réseau autour de l'ensemble de ces acteurs a été le premier objectif. Le but est de faciliter les échanges entre ces organismes dans la gestion de cette biodiversité. Mais GREEN vise également à améliorer milieux, ceux forestiers, agro-pastoraux aquatiques.Plus de 40 actions d’acquisition de connaissances, de gestion des milieux naturels ou de formation et de sensibilisation en faveur de la biodiversité ont été mises en œuvre sur le territoire du Massif des Pyrénées.
" Par exemple nous avons identifié des forêts présentant des critère de biodiversité forts mais aussi mis en défens (installation de clôtures assortie d'une interdiction de pénétrer) de tourbières pour éviter les piétinements, détaille Sébastien Chauvin. Nous avons développé du "rouleau brise fougère" pour lutter contre l’envahissement des prairies par la fougère aigle, créé un réseau de suivi des impacts du gibier sur la régénération forestière".
Vider les lacs de montagne
Pas moins de 36 lacs pyrénéens ont ainsi été inventoriés : 4 lacs andorrans, 13 lacs catalans et 19 lacs français. C'est l'expérience espagnole qui a servi de modèle. "Nous avons découvert qu'en Espagne certains lacs avaient été vidés de tous leurs poissons afin d'observer la réponse de la biodiversité. Cela a donné des résultats remarquables et nous avons décidé de reproduire l'expérience dans des lacs français." raconte le directeur de la Forespir.D'une certaine façon un retour à l'état naturel pour ces lacs de montagne, dont on oublie trop souvent qu'ils sont habituellement sans poisson. Par exemple dans les laquets d’Arraillé, des spécimens de saumons de fontaine ont été prélevés : "20 ans après avoir retiré ces petits lacs laquets des listes d’alvinage (peuplement des eaux en poisson), cette espèce de poisson y est toujours est présent malgré les conditions de vies rudes de la haute montagne" nous explique Sébastien Chauvin.
La connaissance d'espèces multipliée par deux
Cela a aussi été l'occasion de changer de méthode dans l'inventaires de ces lacs. Jusqu’alors ils étaient réalisés depuis la berge ou par des plongeurs non naturalistes. Des botanistes ont pu plonger d'observer la flore lacustre. Ils ont découvert un nouveau monde. Par exemple, les scientifiques ont constaté que la Potamot à feuilles de graminée, considéré comme une espèce rare, était finalement très présent.De observations inédites ont pu être réalisées comme celles du coléoptère Boreonectes multilineatus (2 observations en France). Des espèces endémiques ont même été aperçues comme le Calotriton des Pyrénées (Calotriton asper). Grâce au programme, le nombre d'espèces connues a au moins été multipliée par deux.
Un ensemble fragile
Du côté de la ressource forestière, un inventaire des "forêts matures (anciennes)" a pu être effectué. Un enjeu important : "la plupart des forêts des Pyrénées ont moins de 100 ans sont méconnues en raison de leur exploitation extrêmement abondante par les forges catalanes et les chantiers navales basques".Les organismes français ont aussi pu redécouvrir la gestion des hêtres têtards grâce à l'aide de leurs homologues du Pays basque : "Les Basques continuent à utiliser les branches de ces hêtres pour la production de charbon de bois (pour les fonderies d'acier). C'est un savoir-faire que nous avions totalement perdu en France."
Ces 4 années de coopération ont été riches mais elles ont aussi démontré toute la fragilité de ce véritable réservoir de biodiversité dans le massif Pyrénéen.