Alors que les négociations ont repris depuis une semaine à Airbus, les syndicats tentent de limiter les 3500 suppressions de postes prévues à Toulouse. Retour sur les 6 derniers mois de cette crise du Covid qui a mis à mal le secteur aéronautique en Occitanie.
Pas de licenciements secs à Airbus. C'est l'objectif des syndicats de l'avionneur européen, et tout l'enjeu des négociations qui ont repris fin août. Pour bien comprendre comment on en est arrivé là, retour sur les 6 mois de crise sanitaire et aéronautique en Occitanie.
La crise démarre mi-avril à Airbus
Mais le coup de tonnerre se produit mi-avril, lorsqu’Airbus annonce que 3000 salariés sont placés en chômage partiel. Les indicateurs passent alors dans le rouge.« Ce n’est que le début d’un processus qui va durer plusieurs mois… »
Rapidement, l’onde de choc se propage chez les sous-traitants de l’avionneur.
« Concrètement, les prévisions que nous avons, ce sont des baisses d’effectifs sur la sous-traitance, qui vont aller de 20 000 à 40 000 personnes et il s’agit là uniquement d’emplois directs »
Certains réussissent à s’adapter, comme l’entreprise Femso qui passe de l’usinage de pièces mécaniques à la fabrication de visières de protection contre le coronavirus.
« ça nous a permis de maintenir l’emploi, de rappeler les personnes qui étaient en chômage partiel et de sauver l’usine. »
Mais d'autres sous-traitants anticipent sur ce qu'ils considèrent comme inéluctable : des suppressions de postes. Début, mai, Derichebourg abat ses cartes. Les salariés doivent signer un APC (accord de performance collective) qui prévoit la perte d'indemnités. En échange, les emplois seraient maintenus. En cas de refus, 700 postes menacés.
"On pense que c'est du chantage à l'emploi. Ils se servent de la crise du Covid. C'est une brèche pour remettre en questions nos acquis sociaux et se rendre plus compétitif auprès d'Airbus."
L'onde de choc se propage à tous les sous-traitants
Fin juillet, 160 salariés de Derichebourg Aeronautics Services sur les 1600 au total, refusent l'APC et seront licenciés.
Figeac Aero, Collins Aerospace dans le Lot, Aubert et Duval en Ariège, Daher à Tarbes et Toulouse... Les sous-traitants expriment une vive inquiétude. C'est toute la région Occitanie qui tremble. Mais tout le monde est convaincu qu'il faut présever les emplois et les compétences pour ne pas avoir à tout reconstruire après la crise. Le Gouvernement en est persuadé - il annonce le 9 juin un vaste plan de soutien à la filière aéro.
15 milliards d'euros sont injectés dans le secteur aéronautique, dont 7 milliards pour Air France et 1,5 milliard pourla recherche et le développement. C'est une bouffée d'espoir."Nous décrétons l'état d'urgence pour sauver notre industrie aéronautique."
Le 2 juillet 2020, second coup de semonce. Airbus détaille son plan social. 15 000 suppressions d'emplois dans le groupe dont 3500 à Toulouse."La recherche et le développement, ce sont nos emplois de demain, c'est capital."
Le 8 juillet, une marche inédite rassemble près de 6000 Airbusiens dans la ville rose.
Les syndicats Airbus exigent zéro licenciement secs. Ils estiment que le groupe en a les moyens."On n'est pas encore en mode survie, ils ont profité de ça pour faire du nettoyage..."
Le 24 juillet 2020, en visite à Toulouse, Agnès Pannier-Runacher ministre déléguée à l'industrie, annonce :
La direction d'Airbus souhaiterait que les négociations prennent fin à l'automne. Départ anticipé, pré-retraite, reconversion, les salariés ont encore jusqu'à la fin de l'année 2020 pour annoncer leur décision."Je crois que la direction d'Airbus est consciente que le Gouvernement a mis beaucoup d'argent sur la table et que des économies de cours terme peuvent se payer très cher à moyen terme. Lorsque vous perdez des compétences et vos sous-traitants, et que le cycle revient, alors, vous risquez de perdre votre compétitivité."
Ca n'est pas la 1ère crise pour l'aéronautique, mais celle-ci confronte le secteur plus tôt que prévu à sa nécessaire mutation.