Ouvert au public fin juin, le phare de l'Espiguette restauré a été officiellement inauguré ce jeudi. Une équipe de l'émission en langue occitane Viure al País l'avait visité en juillet.
C'est un phare comme ne on s' y attend pas, perdu à 800 mètres de la mer, au milieu du sable. Bien loin de l'imaginaire collectif du phare de pleine mer. Celui, perdu au milieu des flots, flanqué sur un rocher, secoué par la tempête, vent, mer déchaînée...
C'est l'histoire ce phare, et une visite en langue occitane qui vous est proposée par le magazine Viure al País. Pour voir la totalité de l'émission Viure al País consacrée au Phare de l'Espiguette : replay
Depuis 1869, la lumière du phare guide pêcheurs et marins à la pointe de l’Espiguette, sur la commune du Grau-du-Roi aux limites entre la Provence et le Languedoc.
Construit en 1868 le phare de l’Espiguette est le premier phare électrifié en Méditerranée avec le phare de la Garoupe d’Antibes. Les phares plus anciens, comme le phare du Planier à Marseille au 12ième siècle, guidaient les marins avec des ''feux''.
Oui, de vrais feux comme vous en feriez dans votre cheminée. Et pour les alimenter, il fallait d’énormes quantités de bois.
« Cela demande de grande quantité de bois (jusqu’à 700 kg de bois par nuit sur le phare de Chassiron à Oléron) et une logistique compliquée. On ne les allume donc pas constamment, la plupart du temps lors d’approche d’un navire.» - Source : Direction Interrégionale de la mer Sud-Atlantique (Ministère de la mer)
En Camargue on appelait ces feux les "farots". Francisé ce mot est devenu le pharo, puis le phare.
Petite histoire des phares
Avec la navigation de nuit, les phares maritimes ont été le premier moyen pour les navires de repérer les zones dangereuses et les ports.
Dans l’antiquité il s'agissait de simples feux de bois placés sur des hauteurs ou des tours. Puis sont apparues de vraies constructions, les phares, et l’utilisation des différents combustibles pour alimenter les flammes placées à leur sommet a évolué dans le temps : charbon, tourbe, huile, gaz, pétrole…
Les inventions vont être nombreuses pour perfectionner le fonctionnement des phares, à noter la première lampe à huile munie d'un réflecteur en cuivre argenté installée sur le phare de Sète vers 1770.
Ce procédé permet ainsi, à l’époque, au phare de Planier à Marseille, d’atteindre 28 kilomètres de portée par beau temps. En 1773 une surélévation de la tour de ce même phare du Planier, et la mise en place d’un feu à réverbère composé de 14 lampes à huile avec réflecteurs, lui permet d'être visible en mer à 19 miles nautiques, soit environ 35 kilomètres.
Peu après, un mécanisme d'horlogerie entraînant le système optique pour réaliser un phare à éclat, est utilisé au phare de Dieppe en 1787.
En 1791, le phare de Cordouan est équipé de 12 miroirs paraboliques de 80 centimètres, c'est alors le plus puissant au monde.
Il y aura de nombreuses évolutions technologiques, mais la vraie révolution viendra au niveau de l’optique, avec l’invention de la lentille Fresnel en 1823.
Et un petit peu plus tard, pour maintenir la flamme viendra, la fée électricité et ses ampoules. C’est en 1863 que le premier phare français, le phare sud de la Hève, accède à cette technologie.
Durant la deuxième moitié du 20ième siècle, l’électronique permettra quant à elle l’automatisation des phares.
Grâce à l'invention de Fresnel, il suffit aujourd'hui d’avoir une petite source lumineuse avec une optique qui renvoi et concentre la lumière en un point précis, pour pouvoir se signaler jusqu’à très loin. L’actuel phare du Planier, pour garder l’exemple, a une portée de 23 milles marins soit environ 42 kilomètres.
Le phare de l’Espiguette est équipé d’une ampoule dite Fresnel
La lentille de Fresnel a été inventée en 1823 et a permis, en France, de mettre en place tout un système de signalisation maritime sur le littoral avec la construction de nombreux phares sur les côtes.
Augustin Fresnel, a apporté aux phares un système d’éclairage optimal en remplaçant les réflecteurs par un système de lentilles à échelons. Cette invention a révolutionné l’éclairage moderne des phares. La lentille de Fresnel équipe, aujourd'hui dans le monde, la plupart des phares.
Le phare de l’Espiguette construit en 1868, est naturellement équipé d’une lentille de Fresnel et fonctionne à l’électricité (la première électrification d'un phare en France datait de 1863).
Les lentilles à échelons sont toujours utilisées sur nos côtes, tout en haut des phares maritimes, mais Fresnel aurait-il pu les imaginer mouvantes, sinuant sur les routes de nos villes, de nos campagnes : les phares automobiles.
Et oui voilà pourquoi les phares de nos voitures s’appellent phares, ce sont des optiques Fresnel.
Que pourrait-on, nous aussi imaginer pour le futur de nos phares ? Sans doute une alimentation LED et des panneaux solaires... à moins que le progrès incessant ne finisse par avoir raison d’eux.
Ces bâtisses imposantes, sont aujourd’hui concurrencées par des appareils de plus en plus petits et performants, comme les GPS. Et même si l'exactitude est toujours plus grande avec le système GPS, les gens de mer continuent à avoir recours aux repères côtiers. Mais qu’en sera-t-il de l’entretien coûteux des bâtiments ?
Bâtiments solides et résistants aux vents et marées... pourtant une grosse partie de ce patrimoine maritime, nécessite actuellement de gros travaux de rénovation. Une source de financement pourrait venir de l’ouverture des phares au public avec des visites payantes. Un intérêt financier certain pour le bureau des phares et balises (Ministère de la Mer) qui gère le patrimoine maritime français, mais aussi pour les visiteurs.
Ainsi le phare de l’Espiguette a pris les devants, aujourd’hui, toujours en activité, il se visite aussi comme un monument, un musée qui raconte un bout d’histoire de la mer et des hommes.
Le phare de l’Espiguette, un monument à visiter, une vue panoramique
Automatisé en 1980, le phare de l’Espiguette est resté occupé jusqu’en 2005.
Classé aux monuments historiques en 2012. Toujours en activité, mais vide de tout occupant, il a fait place à un musée qui a ouvert début juin 2023. L’idée est venue de valoriser ce patrimoine et permettre au public de le visiter.
Une partie jardin, expose des représentations des épaves au large de l’Espiguette.
Les bâtiments de logement ont été remplacés par tout un espace muséographique. Ici, le phare raconte à présent son histoire pour les touristes et les curieux.
Le clou de la visite se trouveau sommet du phare : avec 111 marches à monter pour une vue exceptionnelle entre ciel, terre et mer.
Le Phare de l’Espiguette se trouve au coeur d’un espace naturel : Petite Camargue gardoise, Petite Camargue laguno-marine et Bancs sableux de l’Espiguette. C'est cette vue excpetionnelle sur les pinèdes, une nature vierge et la mer, que nous offre la terrasse, à 27 mètre de hauteur.
Mais la mer, on le constate se trouve étrangement bien loin, et bien loin de l'imaginaire du phare afrontant la tempête, battu par des vagues déchaînées s'écrasant sur ses flancs...
Mathieu Castel du service Phares et Balises Méditerranée, nous explique : « Quand ils ont construit le phare, il était à 150 m de la mer. Et maintenant il est à 700-800 m à peu près parce que le sable vient s’accumuler sur le littoral. Vous savez que le sable est mouvant en Camargue, donc c’est le sable qui vient s’accumuler et qui éloigne le phare du littoral»
D'ailleurs, une plaque de marbre que Mathieu Castel va nous montrer mentionne la distance de la Tour du rivage des basses mers, au moment de sa construction. Ce repère, devenu précieux, permet aux générations futures de déterminer d’une manière précise le taux d’avancement de la plage.
La visite du phare de l'Espiguette et son espace musée, complétera et éclairera bien au-delà, les explications de cet article. Mais sachez que la visite du phare de l'Espiguette est limitée à 10 personnes. Il est donc important de réserver son billet à l’avance.
Je vous invite également à lire cette brochure concernant les phares, éditée par le Ministère de la Mer : Les phares, patrimoine des côtes de France.
Si vous souhaitez voir la totalité de le magazine en langue occitane Viure al País consacré au Phare de l'Espiguette : tous les Viure al País sont en replay sur la plateforme france.tv