Environ 200 personnes ont manifesté mercredi soir, à Beaucaire, dans le sud du Gard, contre un projet de ligne aérienne à très haute tension, 400.000 volts. Elle est destinée, selon ses promoteurs, à décarboner la zone industrielle et portuaire de Fos-sur-Mer, mais elle menace de défigurer des paysages naturels uniques, selon les opposants. Verdict fin juin.
La grogne continue voire s'amplifie contre le projet de THT estimé à 300 millions d'euros à travers le Gard. Les opposants demandent un moratoire à l'Etat et une nouvelle réflexion étudiant notamment l'enfouissement en partie de cette future méga ligne électrique.
Une ligne électrique géante
Censée voir le jour en 2028, cette ligne à très haute tension (THT) aura une longueur de 65 kilomètres pour relier les postes électriques de Jonquières-Saint-Vincent, dans le Gard, à Fos-sur-Mer, près de Marseille, via des zones situées près du Rhône, en Camargue et en Provence.
Quand il a appris l'existence de ce projet, Paul Collard, propriétaire d'un domaine viticole à Beaucaire, a eu un choc : "C'est comme si le ciel vous tombait sur la tête, puis vous vous demandez ce que vous avez fait de mal".
On veut faire savoir que l'on est capable de sauvegarder notre territoire, nos paysages. Nous voulons un rendez-vous avec Emmanuel Macron et Gabriel Attal, car aujourd'hui, nous ne sommes pas entendus.
Paul Collard, association sauvegarde Terre d'Argence et Vice-président des Jeunes Agriculteurs du Gard.
Depuis un plateau d'où l'on aperçoit son domaine, le paysage s'étend du Mont Ventoux à la Camargue. En cas de construction de la ligne THT, des pylônes de 50 à 60 mètres de haut seraient installés dans ces zones.
Cyril Mares, président de l'AOC (Appellation d'Origine Contrôlée) des vignerons des Costières de Nîmes, déplore les conséquences "pour l'œnotourisme qu'on essaie de développer. En tant que vigneron on est là pour transmettre un terroir et si le territoire est défiguré on n'a plus rien à transmettre.".
Le préfet des Bouches-du-Rhône qui coordonne le projet doit faire un moratoire. Soit on revoit tout, notamment avec une ligne enterrée, soit il décide de foncer, ce sera son choix mais cela nous obligera à réagir beaucoup plus fort.
Luc Perrin, association Sauvegarde Terre d'Argence.
Deux tracés possibles selon RTE
Le gestionnaire du projet, Réseau de Transport d'Electricité (RTE) a mené une "concertation préalable" de février à début avril, présentant "deux fuseaux d'impact", soit les tracés possibles.
Pour Jean-Luc Moya, de France Nature Environnement, il y a des solutions.
Il y a de vraies solutions alternatives, mais elles ne sont pas analysées dans le dossier de concertation, elles ont été écartées. Nous voulons un débat contradictoire, scientifique, technique avec un tiers neutre qui nous dise pourquoi RTE ne veut pas analyser ces solutions.
Jean-Luc Moya, collectif Stop THT 13/30.
Parmi les propositions, celle d'enterrer la ligne entièrement ou partiellement ou de la faire passer par le Rhône.
Le tracé choisi sera présenté aux acteurs locaux par RTE le 11 juin puis dévoilé publiquement le 28 juin.
Les associations écologiques vent debout
Vingt-quatre associations locales qui ont monté le collectif "Stop THT 13/30" publieront ce week-end une tribune nationale signée par une partie du monde culturel d'Arles dont Françoise Nyssen, ancienne ministre de la Culture et figure des éditions Actes Sud.
Une pétition en ligne contre le projet a recueilli 26.000 signatures.
Parmi les sites français les plus émetteurs de CO2, un des gaz responsables du réchauffement climatique, la zone industrielle et portuaire de Fos, près de Marseille, a été désignée début 2023 par le gouvernement pour devenir une des premières "zones industrielles bas carbone" du pays. Cette ligne THT "est un projet indispensable pour permettre la transition énergétique du territoire", selon RTE.
Une nouvelle manifestation contre la ligne THT est prévue le 19 juin.