L'opération antiterroriste s'est déroulée il y a une semaine à Nîmes. Les hommes de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) ont interpellé deux femmes de 28 et 29 ans. Depuis 2014, elles percevaient et renvoyaient les allocations familiales de leur soeur radicalisée qui vit en Syrie.
La lutte contre le terrorisme revêt parfois des aspects simples et très terre-à-terre. Et ce sont les agents des services de renseignement qui oeuvrent dans l'ombre pour traquer puis démanteler les filières, notamment de financement, si petites et familiales soient-elles.
Dans cette guerre discrète mais efficace, les services de l'Etat suivent les flux d'argent vers la Syrie, l'Irak et la Turquie. Le but étant de tarir les sources de financement des djihadistes et donc au final du terrorisme.
Le soutien financier familial dans le viseur de la DGSI
Après les revers militaires de Daesh et du Califat entre Syrie et Irak, la résistance islamique a perdu la quasi-totalité de ses sources locales de financement, dont le pétrole. Alors, les Européens radicalisés soutenant le djihad ont pris la relève...
Depuis la France, des familles financent, volontairement ou non, l'aide aux terroristes. Elles envoient de l'argent à des proches...
En envoyant de l'argent à un proche libre de ses mouvements en Syrie ou en Irak pour survivre ou pour élever un enfant, la famille en France finance le terrorisme. Que ce soit sciemment ou pas, car les fonds sont presque toujours récupérés par des sympathisants djihadistes. Et ces actes sont répréhensibles.
C'est le cas des 2 jeunes Nîmoises interpellées le 15 mars. 2 soeurs qui touchaient depuis 2014 les allocations familiales d'une autre soeur radicalisée, partie soutenir le djihad en Syrie et lui envoyaient un peu d'argent régulièrement. Une "aide, un soutien familial" selon les 2 femmes.
Mais pour la justice, c'est un trafic administratif qui constitue un détournement de fonds et un financement du terrorisme. Selon nos confrères du Figaro, l'abus porterait sur plusieurs dizaines de milliers d'euros depuis 2014-2015. Une somme d'autant plus indûment perçue que la soeur vivant en Syrie n'y avait pas droit.
Après leur garde à vue de 96 heures, les 2 femmes non radicalisées, ont été remises en liberté. Mais l'enquête se poursuit, notamment l'étude des supports numériques comme leurs téléphones et leurs ordinateurs et elles devront répondre dans quelques mois, de leurs actes devant la justice.
Des actes lourds de conséquences, car pour la loi française, le financement du terrorisme par un particulier est considéré comme un acte de terrorisme. Les sanctions encourues vont jusqu'à 10 ans d’emprisonnement et 225.000 euros d’amende.
Cette enquête préliminaire du parquet national anti-terroriste (PNAT) de Paris est une parmi d'autres. Un travail de fourmi de longue durée et des investigations qui mobilisent beaucoup de personnel.
Le microfinancement, nouvelle source de revenus pour les djihadistes
De tous temps, il y a eu le financement sous-marin d'Etat. Certains pays alimentent en armes et en dollars des groupes terroristes au Moyen-Orient, en Asie et en Afrique.
Avec la mise en place du Califat, le groupe Etat islamique avait réussi à battre sa propre monnaie et surtout il vendait les ressources pétrolières des terres conquises pour se financer, sans compter la vente d'oeuvres d'art pillées et le trafic de drogue. Mais le recul militaire de l'EI dès 2017 et la chute de Daesh en 2019 a plongé l'organisation criminelle dans la quasi-pauvreté. L'argent est alors devenu une quête essentielle.
Dès 2017, des centaines de jeunes Européens venus combattre en zone syro-irakienne ont sollicité financièrement leur famille pour leur venir en aide. Ce fut le cas de djihadistes originaires de Lunel et Nîmes.
En avril 2018, le procureur de la République de Paris, François Molins, s’est alarmé auprès des médias de l’existence d’un «microfinancement» du terrorisme alimenté par des sommes «modiques mais en nombre important». C’est ainsi que 416 "donateurs" ayant participé au financement de l’organisation État islamique (EI) ont été identifiés en France selon le magistrat.