Le 31 décembre 2029, les commerçants installés sur les Halles de Nîmes devront quitter les lieux. De quelle manière ? Seront-ils indemnisés ? Pourront-ils racheter leur étal ? Ils ignorent tout de ce déménagement et s'inquiètent alors que des travaux doivent commencer prochainement.
"On est très inquiets, très stressés. On ne sait pas où l’on va”. Yoni Capelli vient tout juste d’arriver sur le marché couvert de Nîmes, il y a peine un an, et déjà, il se questionne quant à son avenir.
En cause, la Convention d'Occupation Temporaire qui lie la ville aux étaliers et qui prend fin le 31 décembre 2029. La mairie prévoit d'entreprendre des travaux pour un coût total de 12,8 millions d'euros afin que le batiment fasse peau neuve. Après le 31 décembre 2029, Yoni ne pourra donc plus occuper les lieux.
Difficile d'anticiper 2030
“On a un crédit sur 7 ans d’un peu plus de 150 000 euros. Le problème, c'est que l’on n'est pas forcément sûr d’arriver à terme avant 2029”, explique le Nîmois, nouveau propriétaire de la rôtisserie "La ferme du Sud-ouest".
Le remboursement de son prêt s’étalant jusqu’en 2030, il n’a pas d’autres choix que d’augmenter le montant de ses mensualités. Il ne peut pas se permettre de continuer à payer un étal qu’il n’occupe plus.
Surtout qu’en 2030, “il n'est pas sûr de pouvoir revenir dans les halles récupérer [son] stand dans lequel [il] a investi et monté [sa] clientèle, ... dans lequel [il] a tout fait”. “On n’est pas du tout sûr de pouvoir le récupérer un jour”, renchérit le commerçant qui va devoir vendre... et racheter son étal dans la foulée s’il compte le garder.
Ce à quoi la Mairie de Nîmes a répondu : “Il est normal que l’on relance une nouvelle consultation pour que les étaliers puissent recandidater et se repositionner. Par contre, dire aujourd’hui en 2024 que l’ensemble des étaliers pourra revenir en 2030, tout dépendra aussi eux de leurs capacités et de leur volonté à y revenir".
Yoni n’est sûr de rien. Tout comme les 66 autres étaliers qui vont devoir plier bagage le 31 décembre 2029. “Moi j’achète des fromages que je dois vendre dans 6 mois. Si je dois fermer dans 2 mois, comment je fais ?”, se questionne agacé Sylvain Cregut, propriétaire de l’étal "Les fromages de Sylvain".
“On aimerait bien avoir un calendrier, avoir le plan des travaux"
Comme lui, ils sont près de 350 salariés dans le flou, avec derrière, des familles à nourrir. “On aimerait bien avoir un calendrier, avoir le plan des travaux. On ne sait même pas comment on va être impacté”, renchérit le commerçant. Sylvain, Yoni...
“L’inquiétude, c’est vraiment l’absence de connaissances que l’on a sur le futur projet, sur notre devenir. Est-ce que l’on va avoir un déménagement temporaire ou pas ? Qui le finance ?”, explique Vincent Vergne, Président du Comité des Halles de Nîmes. S’il est conscient de l’importance de ces travaux, il dénonce l’absence de dialogue entre la mairie de Nîmes, la Socri Reim, société en charge de la gestion du projet, et les commerçants.
Les commerçants des halles ont déjà dû faire face à l’explosion des charges de leurs étals alors qu’ils se plaignaient d’un mauvais entretien municipal des lieux, ils en ont marre.
Sylvain y compris, d’autant plus que sa peine est double : son stand, en plus de lui être enlevé en 2030, pourrait se retrouver en travaux d’ici peu afin de construire les deux escalators amenant aux futures galeries Lafayette. Et même à ce sujet, il ignore beaucoup de choses.
A priori, il faudrait qu’ils fassent un poteau pour soutenir le poids de l’escalator et ça sera soit ici, soit à l’intérieur du stand de mon collègue, soit les deux stands. On ne sait pas dans quelle mesure on va être impacté.
Sylvain CregutPropriétaire de l’étale "Les fromages de Sylvain".
Une indemnisation pas à la hauteur des désagréments
Ce qu’il sait aujourd’hui, c’est que les négociations vont se poursuivre entre les commerçants, la mairie de Nîmes et la Socri Reim.
“On nous a proposé de déménager dans des cases qui sont vides au sein des halles”. Une première option que Sylvain a dû refuser, impliquant presque un mois de travaux pour s’installer dans la nouvelle case pour redéménager trois mois plus tard dans l’ancienne rénovée.
“On nous a également proposé de fermer pendant trois mois complets avec une indemnisation pour pouvoir compenser les pertes et éventuellement le désagrément que ça va occasionner”, renchérit Sylvain. Mais une fois de plus, l’alternative n’est pas la hauteur du désagrément.
Pour un étal comme ça, il faut compter 15000 euros par mois de frais de fonctionnement, pour les salaires, les charges, les abonnements, le loyer, l'électricité... on nous a proposé 5700 euros. Ce n'est pas entendable !
Sylvain CregutPropriétaire de l’étal Les fromages de Sylvain.
Les commerçants se sentent négligés, d'autant plus qu'ils n'ont pas été invités à rejoindre les festivités des 140 ans des Halles au début du mois de novembre.
Le commerçant souhaite juste pouvoir relancer son activité et travailler sereinement, se projeter ! De son côté, la mairie assure s'entretenir régulièrement avec les étaliers, le dernier échange ayant eu lieu en juillet dernier. Elle promet une concertation dès la fin du mois de novembre pour réfléchir à l'évolution du projet.