Au deuxième jour du procès de Valentin Marcone, jugé pour avoir tué son patron et un collègue de travail dans une scierie des Plantiers dans le Gard en mai 2021, experts et proches de l’accusé ont défilé à la barre, jeudi, et brossé le portrait de l’accusé.
Elle s’avance timidement à la barre. Frêle Brune, aux cheveux longs Elsa Marcone, la sœur cadette de Valentin Marcone est venue très émue, et entre deux sanglots, témoigner à la barre. Parlant de son frère avec qui elle a trois ans d’écart, la jeune femme décrit "un grand frère protecteur avec lequel elle a grandi dans une famille aimante". Elle évoque des difficultés scolaires dues à sa dyslexie et à dysorthographie malgré lesquelles, "il n’a jamais baissé les bras".
"Je n’ai pas reconnu mon frère"
Il parlera avec sa sœur des difficultés rencontrées à la mairie des Plantiers et de son problème d’heures supplémentaires non rémunérées à la scierie. Le jour des faits, elle n'a pas compris ce qu’il se passait, a-t-elle expliqué.
"Je n’ai pas reconnu mon frère. J’ai eu beaucoup de colère et d’incompréhension contre lui. Je suis montée là-haut (aux Plantiers, ndlr) pour essayer d’aider. Il n’y avait pas grand-chose à faire c’était un autre monde. On ne savait pas pourquoi, comment. Un mois a passé puis j’ai pu parler avec mon frère au téléphone et au parloir. J’ai cherché à savoir ce qui était vrai. Mon frère n’a jamais menti."
Pendant sa cavale, interrogée par les gendarmes, elle dit : "Je pensais qu’il allait se suicider ou se faire tuer par les gendarmes. Je préférais qu’il se tue plutôt qu’il tue d’autres personnes."
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"J’ai compris les relations qu’il y avait là-haut, explique-t-elle pour parler de l’ambiance de travail à la scierie. Ça ne se passait pas forcément bien. Je savais que mon frère souffrait des conflits là-bas. À force de vivre des échecs et des conflits pour moi on pète un plomb. C’était sûr que ça finirait mal, je ne pouvais pas imaginer que ça finirait comme ça. À force de brimades et d’échecs… J’ai pensé qu’il allait se suicider pas à ça."
J’ai pensé qu’il allait se suicider pas à ça.
Elsa Marcone, soeur de l'accusé
Lorsqu’il est en détention, Valentin Marcone appelle sa sœur un soir pour lui dire de partir de chez celle car elle est menacée de mort. Une bouffée délirante qui pose la question de problèmes psychiatriques dont serait atteint l’accusé.
"L’impression d’être dénigré, exploité, rabaissé"
À côté l’enfance heureuse décrite par sa sœur et sa mère, il y a celle décrite par les experts psychiatres et psychologues qui ont examiné l’accusé. Le tableau se noircit. On découvre un Valentin Marcone petit garçon chétif, objet de brimades harcelé durant toute sa scolarité. "Il a servi de cible pendant deux ans à l’arrêt de bus, les élèves de son collègue lui jetaient des cailloux", rapporte un le Docteur Layet, psychiatre. C’est un garçon à la personnalité obsessionnelle, "méticuleux" et "ponctuel" à l’extrême.
Quand il rapporte au psychiatre que son patron qui lui reprochait "de mal faire son travail et lui parlait sur un ton moqueur et méchant" qui l’énerve et le peine, le sentiment de persécution rejaillit. "Il était alors convaincu que son employeur voulait le licencier pour embaucher quelqu’un d’autre", poursuit l’expert. Une situation qui l’emmène au "pétage de plombs".
Adulte, confronté aux aléas de son milieu professionnel, "il a de nouveau l’impression d’être dénigré, exploité, rabaissé", note Alain Pénin. Pour le psychologue, l’accusé "coche toutes les cases d’une personnalité paranoïaque". Un jugement faussé, conjugué à une absence d’autocritique de la part de l’accusé, l’a amené "à accumuler une rancune tenace qui a déclenché le geste qui l’a conduit devant vous", ajoutera le psychologue. "Ce qui est capital pour Monsieur Marcone, des soins au long cours", conclut le Dr Layet.
L’audience se poursuit avec la déposition de l’épouse de l’accusé.