"Il n'y a pas assez de médecins pour soigner tout le monde" : le service des urgences d'Auch impose un protocole pour désengorger les urgences

Pour éviter un afflux de patients aux urgences qui ne pourraient être pris en charge correctement, l'hôpital d'Auch a mis en place une organisation particulière. Elle est effective depuis le 1er novembre mais s'avère précieuse dans cette période où la pénurie de médecins urgentistes est criante.

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Les patients du Gers qui ont un besoin urgent de soins, ou l'estiment comme tel, doivent se plier à un protocole spécifique avant de se rendre aux urgences de l'hôpital d'Auch. En cause le manque de médecins urgentistes, accentué en cette période de fêtes, même si le protocole est en place depuis le 1er novembre.

"C'est une entrée régulée des structures d'urgence, explique le Pr Vincent Bounes, chef du SAMU 31 et médecin spécialiste en réanimation. Ça veut dire qu'on ne prend que les patients qui ont appelé le "15" ou qui sont dans un état grave bien entendu. Ce qu'on a montré, c'est que ça permet de diminuer de 15% le flux des patients qui sont aux urgences et de réorienter un certain nombre de patients vers les médecines de ville". 

Un préalable : appeler le "15"

"Le problème c'est qu'aujourd'hui, il ne va pas y avoir de médecins qui consultent en dehors des médecins de garde et que ça ne va pas être possible de réorienter les patients vers leur médecin traitant, ajoute-t-il. Mais ça fait partie des petits moyens qui sont de plus en plus mis en place pour diminuer ces flux et essayer de gagner des ressources médicales. Ça marche, on a eu de l'intelligence collective mais l'inquiétude, c'est : jusqu'à quand ?".

Les patients doivent donc appeler le "15" avant toute admission aux urgences. Ceux qui se présentent et pour lesquels aucune notion d'urgence n'est établie, peuvent être réorientés vers l'unité d’hospitalisation de courte durée, le dispositif d’appui à la coordination et de l’hospitalisation à domicile ou d'autres services de l'hôpital ainsi que les hôpitaux locaux.

Objectif : éviter l'embolie des urgences avec des patients qui attendent des heures sur des brancards une prise en charge et son corollaire potentiel d'erreurs médicales, de maltraitance des patients comme des soignants mais aussi d'incompréhension voire d'agressivité des familles et des patients eux-mêmes.

"Depuis 2 ans, on est en manque de médecins, explique Jean-Pascal Danos, aide-soignant à l'hôpital d'Auch. On a le CHU de Toulouse qui vient nous aider mais de plus en plus, à Toulouse, ils manquent aussi de médecins donc certains vont repartir renforcer les effectifs là-bas. Ce qui nous inquiète, c'est aussi la fermeture de lits sur l'hôpital. Il y a aussi l'augmentation de la population qui vient aux urgences car à 18h ou 19h, on a du mal à trouver des médecins de ville sur le Gers".

Pour Vincent Bounes, le problème est structurel et s'avère la conséquence de décisions politiques. "Il y a une vraie inadéquation entre ce qu'on a dit à la population depuis des années : "on est très bien soigné en France, on a des docteurs, etc." et la réalité sur le terrain où il y a des difficultés médicales, en médecine de ville, des médecins se désinstallent tous les jours et les urgentistes, c'est un métier difficile qui peine à attirer les médecins. Et tout simplement, il n'y a pas assez de médecins en France pour soigner tout le monde. Ça fait un peu polémique mais c'est vrai".

Risque de longue attente 

Sur 50 km à la ronde, l'hôpital d'Auch est le seul lieu où se faire soigner. Les professionnels du soin de l'hôpital s'inquiètent aussi du nombre de départs à la retraite. Un tout qui fragilise à outrance les services d'urgence. "Il y a des jours où on va se retrouver avec un ou deux médecins ici aux urgences, commente Jean-Pascal Danos. Quand le SMURiste sort, il n'y aura plus un seul médecin pour gérer les malades en cours, plus ceux qui arrivent, plus, s’il y a un gros "déchoquage", quelqu'un qui n’est vraiment pas bien sur lequel il va falloir un médecin presque à plein temps pour s'en occuper... ça veut dire qu'on laisse tomber tous les patients qui sont autour".

Le personnel hospitalier d'Auch dénonce aussi le manque de transports la nuit. "Si quelqu'un arrive d'un Ehpad, juste pour une suture, il va rester jusqu'au lendemain", faute de possibilité de le ramener dans sa résidence.

Les professionnels craignent une prise en charge très longue qui démultiplie les risques pour les patients. Dans l'attente de vraies solutions, le Pr Vincent Bounes donne quelques conseils basés sur le bon sens. "Ce qu'on appelle l'urgence ressentie est très différent de l'urgence vraie. Toutes les urgences sont justifiées quelles qu'elles soient. Simplement ne pas se déplacer systématiquement à l'hôpital et faire le "15", ça nous permet à nous d'avoir une meilleure prise en charge des patients".

"Utiliser le bon sens : ne pas attendre les jours fériés pour dire "ah bien tiens finalement je vais aller voir un docteur". Quand ça fait une semaine que ça dure, il vaut mieux consulter son médecin un jour ouvré. Et là aussi un peu de bon sens : "j'ai un peu de fièvre, je prends un Doliprane et j'attends un peu, je vois ce qui se passe. Je n'appelle pas systématiquement, d'emblée dès les premiers symptômes". Des réflexes citoyens auxquels les médecins font appel pour faciliter une meilleure prise en charge de tous.

Propos recueillis par Noémie Furling et Régis Guillon

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