Un site entièrement dédié à la production de vin désalcoolisé est en train de voir le jour à Vic-Fezensac dans le département du Gers. L’ambition est de proposer des vins sans alcool de qualité, un marché en pleine expansion.
Le constat est implacable, les Français boivent de moins en moins de vin. Entre 1960 et 2022, la consommation individuelle moyenne a chuté de près de 70% selon une étude. Et la tendance ne s’est pas inversée ces dernières années, les consommateurs réguliers de vin ne représentaient plus que 11% de la population, soit 5 points de moins qu’en 2015.
Mais dans le même temps, un autre phénomène a émergé, celui des vins sans alcool ou très peu alcoolisés. Un marché qui a progressé de 7% en 2022, signe qu’il répond à une demande forte, notamment de la part de ces Français qui veulent réduire leur consommation d’alcool sans perdre le plaisir du goût du vin.
"Aujourd'hui, c'est un produit qui est valorisé"
Dans cette optique, la filière viticulture de la coopérative Vivadour se dote d’un outil unique en France. A Vic-Fezensac, un site entièrement dédié à la production de vin sans alcool, Chai Sobre, est en train de voir le jour. Le laboratoire est déjà en fonctionnement pour chercher les meilleurs assemblages mais l’activité démarrera réellement pour les prochaines vendanges, quand l’imposant désalcoliseur aura été installé à côté des cuves, sur le site de production à échelle industrielle. Avec cet équipement, 80 000 hectolitres de vin désalcoolisé pourront être produits chaque année.
Parmi les 300 viticulteurs adhérents à la coopérative, nombreux sont ceux intéressés par ce débouché et qui fourniront le raisin pour la production de vin sans alcool. « On assiste à une évolution très forte des mentalités dans la profession » constate Frédéric Brochet, chargé de la mise en place du projet. « Il y a 4 ou 5 ans, c’était encore un sous-produit, un moyen d’écouler les excédents. Aujourd’hui, c’est un produit qui est valorisé ».
Les cépages de Gascogne très bien adaptés
Chai Sobre a même pour ambition de faire monter en gamme les vins sans alcool. « On se positionne sur une qualité premium » précise Pascal Dupeyron, directeur de la filière viticulture chez Vivadour. « Pour faire un bon vin il faut un bon raisin et les cépages traditionnels de Gascogne sont très bien adaptés à la désalcoolisation ».
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Pour s’assurer de la qualité des vins proposés, Chai Sobre s’est associé à Moderato, entreprise spécialisée dans les vins sans alcool. « Nous avons goûté une centaine de vins et ceux du Gers sont ceux qui réagissent le mieux avec un équilibre préservé après la désalcoolisation » explique Sébastien Thomas, co-fondateur de Moderato. « Un bon vin alcoolisé ne fera pas forcément un bon vin désalcoolisé. Mais les vins de Gascogne ont des arômes expressifs que l’on arrive à préserver ». Le but n’est donc pas de proposer des copies de vins traditionnels mais bien des vins désalcoolisés avec leurs propres caractéristiques. « Jusque-là on prenait des vins normaux pour les désalcooliser. Là, on va passer sur une production propre avec un choix de raisins adapté, un choix de cépages, qui nous permettront d’obtenir des résultats optimaux » ajoute Pascal Dupeyron.
Dans ce marché encore balbutiant, les vins sans alcool restent un peu plus chers. « C’est dû au process industriel. La fabrication d’un vin sans alcool est à peu près la même que pour le vin traditionnel mais il y a le passage par le désalcooliseur et des conditions sanitaires un peu plus strictes pour la mise en bouteille ».
Un prix qui ne semble pas rebuter les consommateurs, chaque année plus nombreux. Les vins sans alcool sont devenus un véritable débouché pour les viticulteurs confrontés à la baisse de leurs ventes.