"J'en ai marre d'entendre que des jeunes se sont suicidés ", un père qui dénonçait le harcèlement de son fils face à la justice

Un père de famille de Fleurance dans le Gers qui a vu sa plainte pour harcèlement scolaire contre l'école de son fils classée, comparait lui-même devant la justice ce lundi 18 septembre. Il fait l'objet d'une plainte déposée par la maîtresse pour des menaces proférées dans le cadre de cette affaire.

Un père de famille de Fleurance dans le Gers qui a vu sa plainte pour harcèlement scolaire contre l'école de son fils classée alors qu'il dénonçait son inaction, comparait lui-même devant la justice ce lundi 18 septembre. Il fait l'objet d'une plainte déposée par la maîtresse pour des menaces proférées dans le cadre de cette affaire.

Les faits se sont déroulés en fin d'année scolaire. Jessy Campagna, père de Rémy*, 11 ans, découvre des marques sur le bras de son fils alors scolarisé en CM1 à l'école Louis Monge de Fleurance. Avec son épouse, ils interrogent l'enfant qui aurait fini par reconnaître qu'il se fait harceler à l'école par deux camarades de classe.

"Des marques sur son bras"

"J'ai commencé à remarquer des marques sur son bras et avec mon épouse on a réussi à le faire parler. (...) Il subissait des coups ("Si t'en parles, tu vas voir !"), des pincements, étranglements, griffures, des coups de poing. Mon fils, quand il a vu que l'établissement ne faisait rien, il en avait marre parce que ça faisait 15 jours qu'il prévenait et qu'il ne se passait rien, mon fils a rendu le coup. La gamine est allée voir la prof. Mon fils a assumé et du coup, la prof n'a puni que mon gamin".

Le père dit être allé à l'école pour avoir une explication. "La prof m'a regardé avec un sourire et m'a dit : qu'elle n'avait rien fait donc je n'allais pas la punir". Ça faisait 15 jours de colère de voir des marques sur le corps de mon fils, des griffures au niveau du cou, des étranglements... je me suis énervé, j'ai eu des propos que je n'aurais pas dû avoir. Je lui ai dit que la prochaine fois qu'elle punissait mon fils, je l'accrochais au porte-manteau".

Inaction dénoncée

La professeure a déposé plainte dans la foulée. Juste avant la rentrée, en août, Jessy Campagna a lui-même déposé plainte contre l'établissement pour mise en danger de la vie d'autrui. Une plainte qui a été classée sans suite depuis.

"Ce qui m'inquiète, c'est que les victimes de harcèlement scolaire, notamment l'enfant de mon client, ne soient pas traités correctement, affirme l'avocat du père, François Roujou de Boubée.

Un enfant quand il parle de harcèlement, on doit le croire, il n'y a pas de débat. Et là, le problème, c'est qu'on ne le croit pas.

François Roujou de Boubée, avocat de Jessy Campagna

"Il n'y a rien de mis en place au niveau de l'école et du rectorat. Il y a des manquements qui ont été constatés et qui visiblement n'ont pas été suivis d'effets. C'est la raison pour laquelle mon client et moi-même sommes très inquiets".

Parent convoqué par la justice

Le père de famille est convoqué devant la justice ce lundi dans le cadre d'une composition pénale. Il s'agit d'une procédure qui permet au procureur de proposer une ou des sanctions à une personne qui a commis une infraction passible de sanction de faible gravité. La victime peut, par exemple, se voir proposer la réparation de son préjudice.

Pour autant, Jessy Campagna n'en démord pas : son fils a été victime de maltraitance et l'éducation nationale n'a pas pris ses responsabilités. Il dit travailler avec l'inspection académique pour lutter contre le harcèlement et compte appeler à une manifestation pour dénoncer l'inaction des établissements scolaires quand surviennent des faits de cette nature.

Un combat pour les enfants

Il dénonce le directeur de l'école qui lui aurait dit "c'est votre parole contre la nôtre" sans prendre en compte les faits dénoncés par son fils. "Le corps enseignant se sent intouchable et nous, par contre, on est sanctionnable et ça, c'est pas bien. On ne peut pas mettre ma menace sous le même statut que la défaillance professionnelle du corps enseignant, mais ça reste un problème de professionnalisme et ça doit être réprimé par la loi".

"Mon combat ne concerne pas que mon fils, mais c'est pour tous les enfants. J'en ai marre d'entendre que des jeunes se sont suicidés face à du harcèlement, il faut arrêter ça de suite. Face à la décision du procureur de classer ma plainte sans suite, je ne peux pas me taire. Ça veut dire qu'il accepte que le directeur dise : je n'ai pas que ça à faire".

Un courrier qui fait scandale

La procédure pénale intervient alors même qu'un courrier d'un autre rectorat fait scandale. Il avait répondu aux parents d'un lycéen de Poissy qui dénonçaient son inaction face au harcèlement dont leur fils faisait l'objet, jeune qui s'est suicidé le 5 septembre, en les menaçant de poursuites en cas de dénonciation calomnieuse.

La lettre du rectorat de Versailles aux parents du lycéen, datée du 4 mai, a suscité l'indignation de la famille de Nicolas. Ce courrier qualifie d'"inacceptables" les propos des parents qui ont "remis en cause" l'attitude du personnel de l'établissement scolaire.

Menace de poursuites

Le rectorat mentionne également dans ce courrier l'article 226-10 du Code pénal qui sanctionne les dénonciations calomnieuses, rappelant qu'elles sont punies de cinq ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. "Je vous enjoins d'adopter désormais une attitude constructive et respectueuse envers les autres membres de la communauté éducative", est-il écrit. Et de prévenir : "Je serais contrainte, le cas échéant, de prendre toutes les mesures nécessaires tant au bon fonctionnement du service public de l'Education nationale qu'à la protection et la sécurité des personnels qui y concourent."

Jessy Campagna reconnaît que l'inspection académique du Gers a mis des choses en place pour son fils, mais il souhaite poursuivre le combat aux côtés des parents qui connaissent ou sont touchés par le phénomène. Le rectorat de l'académie de Toulouse que nous avons sollicité concernant la situation du fils de jessy Campagna, n'a pas donné suite à notre demande à l'heure où nous publions cet article.

*Le prénom de l'enfant a été modifié.

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