Info France 3 Midi-Pyrénées : un jeune homme originaire de Castanet-Tolosan victime du syndrome de Lyell à l'âge de 7 ans en 1998, vient d'obtenir la condamnation du laboratoire Sanofi pour "manquement à une obligation de sécurité" et une indemnité d'environ 1,5 million d'euros.
C'est une très longue bataille juridique, qui est loin d'être terminée. Lucas C. 23 ans, habitant Castanet-Tolosan près de Toulouse, a obtenu le 14 janvier dernier la condamnation du laboratoire pharmaceutique Sanofi pour "manquement à son obligation de sécurité". Le tribunal de grande instance (TGI) de Paris qui a prononcé cette condamnation lui a accordé une indemnité d'environ 1,5 million d'euros. Sanofi a interjeté appel du jugement et conteste également "l'exécution provisoire" obtenue par l'avocate du plaignant qui prévoit que la somme soit versée à la victime avant le résultat de l'appel.
Des faits qui remontent à 1998
Le 5 février 1998, alors que Lucas a 7 ans, son médecin lui prescrit de l'Aspégic 250mg et du Doliprane pour soigner une rhinopharyngite. Il confie également à sa grand-mère, qui part en vacances avec l'enfant, un flacon de Clamoxyl (Amoxicilline) à prendre si l'état de l'enfant s'aggrave. Lucas est donc placé sous Aspégic et Doliprane mais devant l'apparition de fièvre et d'éruptions cutanées sa grand-mère lui donne une dose de Clamoxyl. Le 13 février Lucas est hospitalisé en urgence au CHU de Toulouse pour un syndrome de Lyell.Le syndrome de Lyell frappe Lucas
Il s'agit d'un syndrome potentiellement mortel induit généralement par un mélange médicamenteux qui a pour conséquence la nécrose des cellules de la peau et une forte atteinte occulaire. Lucas passe 13 jours en réanimation infantile puis au service des grands brûlés. Il est opéré à plusieurs reprises des yeux mais il perd la vue et son corps est brulé "à 75 %" selon son avocate, Maître Valérie Pirello, dont une grosse partie de l'activité est le droit médical. Les experts vont ensuite déterminer que la prescription du médecin traitant était normale. Le syndrome de Lyell a été déclenché par un mélange des trois médicaments, l'enquête précisant ensuite que la responsabilité du Clamoxyl (du laboratoire Glaxosmithkline) est écartée. C'est donc le premier "mélange", Doliprane et Aspégic (tous les deux étant commercialisés par Sanofi-Aventis), qui est à l'origine du déclenchement chez Lucas de ce syndrome très rare.Une procédure entamée tardivement
Les faits remontent donc à 16 ans maintenant. Car ce n'est qu'en 2008, dix ans après l'accident, que la famille de Lucas et le jeune homme lui-même se sont lancés dans un procédure judiciaire. Selon Maître Pirello "la famille doutait de pouvoir obtenir la moindre indemnisation de la part de Sanofi". Un premier avocat, puis une seconde, se saisissent donc du dossier. Pendant ce temps là, là vie continue pour Lucas : il obtient son bac S avec mention et est actuellement en dernière année d'études de kinésithérapie.Une condamnation en première instance
Le 14 janvier dernier, le TGI de Paris donne donc raison aux plaignants (Lucas et ses parents) et le jeune homme obtient une importante indemnisation d'environ 1,5 millions d'euros pour le préjudice subi et les souffrances endurées. Il est reproché à Sanofi un défaut d'information sur les notices d'utilisation de ces médicaments et surtout "un manquement à une obligation de sécurité qui est de résultat", précise l'avocate de Lucas. Selon la justice, Sanofi doit garantir aux patients un "sentiment de sécurité, précise Maître Pirello, la certitude que ce médicament ne va pas nous faire de mal". En d'autres termes qu'il n'y a pas de "vice caché" et que les effets indésirables ne risquent pas d'être supérieurs aux effet positifs. Sanofi, selon le TGI, aurait donc du écrire dans la notice d'utilisation (aux rubriques "effets indésirables" et "interactions médicamenteuses") et dans le "Vidal" de l'époque, l'existence de ce risque, même infime, de déclenchement du syndrome de Lyell en cas de mélange de ces médicaments.Les avocats de Sanofi ont interjeté appel de ce jugement. La date de l'audience en appel n'a pas encore été fixée : sans doute une décision "en 2015", selon Maître Luca de Maria, avocat de Sanofi. Pour lui "le manquement à une obligation de sécurité n'est pas constitué et le TGI est allé vite sur la conclusion par rapport aux travail des experts, encore incomplet".