"Elle traitait les personnels de bras cassés et de punaises", séances d'humiliation, harcèlement moral, ce que reprochent des agents d'un tribunal à leur ancienne cheffe de service

L'ancienne greffière en chef du tribunal judiciaire de Toulouse (Haute-Garonne) est poursuivie par huit agents qui l'accusent de harcèlement moral. Initialement prévu le 1ᵉʳ octobre dernier, le procès a été renvoyé au 6 décembre 2024. Le point sur ce dossier.

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L'affaire devait être jugée le 1er octobre au tribunal correctionnel d'Albi où elle a été délocalisée. Le procès de l'ancienne greffière en chef de Toulouse pour harcèlement moral a été reporté au 6 décembre 2024, le temps de produire des pièces complémentaires. Que sait-on des accusations portées par des greffiers et des agents administratifs et techniques à l'encontre de leur ancienne cheffe de service ? Nous avons fait le point avec l'avocat des huit plaignants.

Propos vexants, dénigrement et humiliation

"Toutes les affaires de harcèlement ne se traitent pas au pénal," soulignait Xavier Pavageau le président du tribunal judiciaire de Toulouse lorsque nous vous révélions ses poursuites engagées à l'encontre de Madame C. "Mais dans ce cas, le procureur a estimé que vu la gravité des faits et vu le nombre de plaintes, ce dossier devait passer par ce biais."

La période des faits reprochés court de 2018 à 2023. Et tous les agents qui ont porté plainte pour harcèlement moral se disent victimes de dénigrement et d'humiliation au long cours. La plupart évoquent des propos vexatoires. "Elle s'exprimait d'une façon quelque peu dénigrante, traitant les plaignants de bras cassés, de punaises", estime Me Hervé Rénier.

Et l'avocat des huit plaignants d'énumérer : les critiques sur la qualification des agents, "en disant qu'ils n'étaient pas compétents et qu'ils ne pouvaient pas comprendre." Des démarches humiliantes pour celui ou celle qui va en faire l'objet comme cette sorte de pétition que la chef de service aurait orchestrée pour demander la mutation d'un agent. Et puis, ces convocations dans le bureau pour se voir entendre dire devant tout le monde, "ça, ce n'est pas bien, ça, ce n'est pas bien." Pour Me Hervé Rénier, "cela dépasse le cadre de la remontrance professionnelle".

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Congés refusés anormalement, charges de travail excessives données notamment à une greffière qui était en mi-temps thérapeutique, divulgation d'éléments de la vie privée qui ressortaient de manière très indélicate dans le service, énumère encore l'avocat.

C'est d'une manière générale une espèce de pression et de dénigrement permanent qui, à la longue, a usé les différentes personnes qui ont travaillé avec elle.

Me Hervé Rénier, avocat des huit plaignants

Tous les agents qui ont porté plainte décrivent le même schéma. "Quelque chose de généralisé et de répétitif".

Une cheffe de service, elle-même poussée à bout ?

Le procès, initialement prévu le 1ᵉʳ octobre, a été reporté pour produire de nouvelles pièces au dossier. Il est notamment question d'une expertise psychiatrique pour déterminer dans quel état d'esprit se trouvait la prévenue à l'époque et encore aujourd'hui. L'avocate qui assure sa défense, et que nous avons sollicitée à plusieurs reprises, se refuse à tout commentaire.

Le manque de moyens, des services en sous-effectif, la Justice souffre, poussant aux mouvements de grève. Ce contexte sera un élément du débat, voire un argument de défense de la prévenue, s'attend Me Rénier. "Dire que ce n'est pas elle qui a fait du harcèlement moral, mais l'institution qui, par la surcharge, le sous-effectif, etc, a provoqué cette souffrance au travail."

"Si cet élément existe, il n'est pas exclusif, poursuit l'avocat des huit plaignants. Pour nous, elle a aggravé une situation déjà compliquée par son comportement. Ce qu'elle a commis, là, on n'est plus du tout dans un management de crise avec des moyens limités. Ce sont des comportements individuels qui posent problème."

Des agents meurtris

Lors des investigations, les plaignants se sont aussi soumis à des expertises psychologiques, révélant "une grande souffrance au travail et des conséquences importantes." Il y a eu de nombreux arrêts de travail. Certains ont été suicidaires, confie Me Rénier. "C'est quand même allé très, très loin dans l'impact personnel pour chacun."

Ce que ses clients attendent de ce procès ? Une condamnation et une reconnaissance de leur statut de victimes de harcèlement moral de la part de leur supérieure hiérarchique de l'époque. Et puis, une réparation. La plupart des agents ont repris en activité, ailleurs pour certains après mutation. Un ou deux sont encore en arrêt maladie.

En attendant son procès, Madame C. est placée sous contrôle judiciaire avec "interdiction d'exercer ses fonctions ou de mettre les pieds au tribunal." Jusqu'à son jugement, la fonctionnaire reste présumée innocente.

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