Les Sages ont validé l'article de loi qui a permis à la justice d'ordonner la fermeture de cette école toulousaine en décembre 2016. L'avocat de l'ex-directeur a tout de même indiqué vouloir plaider la relaxe lors du procès en appel.
Le Conseil constitutionnel a validé vendredi le texte de loi par lequel la justice a ordonné la fermeture d'une école musulmane hors contrat de Toulouse et condamné son directeur pour "enseignement non conforme". Pour autant, Mais l'avocat du directeur plaidera la relaxe de son client devant la cour d'appel de Toulouse, où l'affaire sera de nouveau jugée prochainement, estimant que la décision du Conseil recèle des arguments en sa faveur.
Le cas de l'école Al-Badr avait été cité en exemple au Parlement lors des débats sur la proposition de loi qui a renforcé en avril l'encadrement des écoles libres hors contrat pour prévenir, notamment, les risques de radicalisation.
Le 15 décembre 2016, le tribunal correctionnel de Toulouse avait ordonné la fermeture de l'école Al-Badr pour enseignement "non conforme" et condamné son directeur à 4 mois de prison avec sursis et à une interdiction de diriger un établissement d'éducation.
Les juges avaient également ordonné la fermeture de l'établissement et condamné l'association Al-Badr à 5.000 euros d'amende et à une "interdiction définitive d'exercer". Le directeur a alors déposé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC).
Elle visait l'article du code pénal qui réprime "le fait, pour un directeur d'établissement privé hors contrat, de ne pas s'être conformé à l'objet de l'instruction obligatoire et de ne pas avoir déféré à une mise en demeure de l'éducation nationale visant à fermer les classes qui sont les siennes".
L'avocat des requérants avait demandé aux "Sages" de le déclarer contraire au principe de "l'égalité des délits et des peines" en raison de son imprécision.
Il considérait également que le texte contrevenait à la règle de la "proportionnalité des peines" faute d'avoir fixé une limite à l'interdiction d'exercer et à celle de "l'individualisation des peines" pour avoir ordonné la fermeture d'une école pour une faute imputée à son directeur.
Dans sa décision, le Conseil a rejeté ces arguments et jugé l'article incriminé conforme à la Constitution. Il a rappelé que le texte contesté réprime, non pas le fait de ne pas s'être conformé à l'instruction obligatoire, mais celui de ne pas avoir respecté "la mise en demeure" de s'y conformer.
Il l'a donc jugé valable sous réserve que la mise en demeure "expose de manière précise et circonstanciée les mesures nécessaires pour que l'enseignement dispensé soit mis en conformité avec l'objet de l'instruction obligatoire".
Sur la durée de l'interdiction d'exercer en tant que peine complémentaire, les Sages ont rappelé que le code pénal prévoit déjà la possibilité d'une interdiction définitive ou temporaire (qui ne peut excéder cinq ans).
Enfin, ils rappellent que lorsque la personne exploitant un établissement n'est pas celle poursuivie (le directeur et pas la personne morale), la mesure de fermeture ne peut être prononcée sans que le tribunal correctionnel n'ait statué.
Le directeur de l'école Al-Badr, l'imam Abdelfatthah Rahhaoui, réputé pour son conservatisme, dirigeait l'établissement depuis 2013. Interrogé par Reuters, Me Samim Bolaky, avocat du directeur de l'école Al-Badr, a toutefois indiqué qu'il s'agissait d'une "importance victoire pour le groupe scolaire". Les "Sages" ont en effet estimé que l'Education nationale devait indiquer à l'école comment se mettre en conformité, en termes notamment de contenu pédagogique, ce qu'elle n'a pas fait, a-t-il dit, annonçant qu'il allait plaider la relaxe.
L'école est aujourd'hui toujours ouverte mais gérée par une autre association dont l'imam est membre et envisage l'ouverture de classes de collèges à la rentrée prochaine.