Établissements fermés sans aucune perspective de réouverture, loyers maintenus … la crise du covid -19 fragilise encore davantage le secteur des discothèques déjà mal en point. A Toulouse, comme partout en France, les faillites pourraient se multiplier.
Comment appliquer les gestes barrières le jour où les discothèques seront autorisées à accueillir de nouveau du public ? La question angoisse et agace tout à la fois les patrons du secteur à l’image d’Ivo Danaf, gérant du Purple, discothèque toulousaine et président de l’Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie de Haute-Garonne (UMIH 31) :
Garder un mètre de distance, porter un masque, je vois mal les clients se plier à ces règles.
Il s'empresse d'ajouter : " Soit on trouve un traitement qui permettrait de classer cette maladie au même niveau que la grippe saisonnière, soit on trouve un vaccin, mais là ce ne sera pas avant un an, sinon je vois mal comment accueillir de nouveau la clientèle dans les discothèques ou bars musicaux. »
En creux, cela signifie que les boîtes de nuit ne pourraient envisager une ouverture avant des mois, au mieux septembre ou octobre. Il faut également comptabiliser les BAM, les bars à ambiance musicale. Dans le centre-ville de Toulouse, on compte une dizaine de discothèques et une centaine de bars musicaux, tous sans perspective de réouverture à court terme.
La situation serait encore plus délicate que pour les bars et restaurants, les derniers à être déconfinés. Dans un restaurant, "le client est assis, on peut espacer les tables mais en discothèque, on ne sort pas pour rester à un mètre les uns des autres." ajoute Ivo Danaf.
Des licenciements à venir
Jean-Pierre Rogalle est gérant du Divino, en périphérie toulousaine. Ses 18 salariés sont au chômage technique et pour les payer, il a dû puiser dans sa trésorerie en attendant d’être remboursé. "On a repris le Divino il y a un an et demi, la situation financière était mauvaise. Heureusement, les 8 derniers mois avant la fermeture ont été bon, j'ai pu faire un peu de trésorerie. Si nous avions connu cette crise l’an dernier, c’est simple, on fermait !"Aujourd’hui, il est à la fois inquiet et lucide.
On ne sait pas ce qu’on peut dire aux salariés. Il y aura certainement des licenciements.
Un secteur déjà mal en point
Selon la Sacem de 2014, la société des auteurs et compositeurs et éditeurs de musique, la France compte environ 2000 discothèques dont 200 en Occitanie.En 30 ans, toujours selon la Sacem, leur nombre a été divisé par 2. De gros établissements comme l’Indigo à Collioure qui pouvait accueillir plus de 2000 personnes ont fermé il y a quelques années, il n’y a plus de discothèque aujourd’hui dans le Gers.
L’appel aux assurances
L’Etat qui prend en charge le chômage partiel a appelé les bailleurs à faire un geste et décaler les loyers, mais pour Philippe Belot, vice-président de l’UMIH et gérant de la discothèque Le Dowtoon Factoty à Toulouse qui emploie 19 salariés, barmen, agents de sécurité, personnel au vestiaire :Cela ne sert à rien de décaler les loyers. On est dans le couloir de la mort, on ne nous exécute pas aujourd’hui, l’exécution, on la repousse de quelques mois.
Pour une discothèque, il faut compter de 10 000 et 15 000 euros mensuels de loyer.
La solution qu’il prône avec son syndicat : "que le gouvernement et les assureurs prennent en charge en partie la perte d’exploitation de nos établissements pour répartir l’effort".
Derrière ces établissements, il y a également les bookers qui s’occupent de réserver les artistes, dont les dates de concert ont toutes été annulées. C’est donc tout un secteur événementiel qui pourrait donc avoir bien du mal à s’en remettre.
Il ajoute, "on sait qu’on sera les derniers à rouvrir" mais espère que cette crise sanitaire ne signera pas la fin des discothèques et lieux de détente "dont le public a besoin".