Déconfinement : à Fourquevaux près de Toulouse, l’épicerie du village tient le cap !

Certains jours devant l’épicerie, la file d’attente formait un long ruban de gens masqués. Seul commerce du village, l’épicerie de Fourquevaux a joué pendant cette période de confinement un rôle central. A l’heure du "déconfinement", le petit commerce maintient le cap !

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La crise sanitaire liée au Covid-19 n’a pas épargné le monde rural. Pour tenter de comprendre comment les habitants de ces campagnes vivent cette crise sanitaire, nous avons posé nos valises à Fourquevaux, village typique du Lauragais de 800 habitants, situé à une vingtaine de kilomètres de Toulouse. 
En ce début de déconfinement, le village semble reprendre des couleurs à l’image de l’épicerie, véritable poumon de la commune. Reportage.
 


Devant l’épicerie, la petite terrasse aménagée où l’on buvait paisiblement le café a disparu. Depuis la crise sanitaire, l’ambiance a bien changé mais les villageois n’ont pas pour autant déserté le lieu. Bien au contraire. Pendant le confinement, l’épicerie a pleinement rempli son rôle de commerce de proximité. "Depuis le 15 mars dernier, le village est comme mort, ici c’est le seul endroit où l’on voit des gens même masqués, enfin un peu de vie !"
L’épicerie a véritablement éclos durant cette période. Selon la présidente de l’association Carole Featherstone, le chiffre d’affaires a été multiplié par trois dès la deuxième semaine du confinement. 
Carole, toujours accompagnée de sa chienne Dolly, la mascotte de l’épicerie, a gardé de ses origines, un petit accent british. 
Of course ! Cela ne l’a pas empêchée d’épouser la terre du Lauragais qu’elle défend sans compter. Fondatrice et présidente de l’épicerie associative " Au jardin d'Espirac", elle a mis toute son énergie pour que ce petit commerce en milieu rural voit le jour.

Le commerce est située au coeur du village dans des locaux prêtés par la municipalité. Créée fin 2018, l’épicerie associative fonctionne grâce au dévouement sans faille des bénévoles, épaulés dans leurs différentes tâches par Lisiane, seule salariée de l’équipe. 
Ce petit commerce de proximité a su tirer son épingle du jeu et affiche aujourd’hui, selon la présidente de l’association, une stabilité financière. "Tout ne s’est pas fait en un seul coup de baguette magique" mais petit à petit le concept a séduit les villageois. 
 

L'épicerie du village : un concept mûrement réfléchi

"L’idée était de proposer des produits frais, légumes, fromages, viandes issus d’une agriculture locale, respectueuse de l’environnement. Nous sommes entourés de culture et d’élevage et personne ne mangeait local ! Pas très logique tout cela", explique Carole Featherstone, présidente de l’association.

"Pas question non plus d’ouvrir une épicerie fine en pratiquant des prix exorbitants. Non, on s’adresse à tout le monde en proposant des produits de première nécessité et des produits frais en circuit-court. Plus qu’une épicerie, c’est un lieu de vie." On n’y fait pas seulement ses courses, on prend le temps de discuter de prendre un petit café au petit bar ou en terrasse, depuis la crise du coronavirus tout a été chamboulé mais on est là plus que jamais.
 


A l’intérieur aussi, ce n’est plus comme avant. Le petit coin piano-bar si convivial est lui aussi provisoirement inaccessible. Mais derrière les masques, se dessinent des sourires, les regards des bénévoles en disent long et cela réchauffe l’atmosphère. 
Lisiane, aidée par les bénévoles, travaille sans relâche depuis deux mois pour satisfaire la clientèle. Confinement ou déconfinement, le service et les gestes barrières restent inchangés. Les personnes attendent leur tour à l’extérieur, masqués en respectant les distances de sécurité. 
 


Le client ne touche à aucun produit, c’est une bénévole qui remplit les paniers de courses. Et pour ceux qui ne peuvent pas se déplacer, l’épicerie a mis en place un système de commande-livraison de paniers à domicile. Un service qui a eu un réel succès et qui va se maintenir pendant cette nouvelle période. Tout est encore un peu flou pour l’équipe, « tout se mettra en place au jour le jour en fonction de la demande et de la disponibilité des bénévoles qui pour la plupart vont reprendre leur activité professionnelle », explique Carole

Lisiane, capitaine à bord


Lisiane a 29 ans. Elle est la seule salariée, rémunérée par l’association. Ancienne graphiste, la jeune femme prend son nouveau métier très à coeur. En plein rush, elle a dû former tous les nouveaux bénévoles et changer ses méthodes de travail. 

Depuis le confinement on est trois à travailler tous les jours et cela va encore durer, c’est du stress mais il faut prendre sur soi, le plus important est de garder une ambiance sympa qui reflète l’esprit de l’épicerie même si en ce moment ce n’est pas évident.

"Avec cette crise, je me suis rendue compte de l’importance et de l’utilité de mon travail, le projet a vraiment du sens, on s’est aussi fait connaître dans de nombreux villages alentours et ça crée du lien. Les gens ne connaissaient pas l’épicerie, contraints par le confinement ils sont venus à l’épicerie et ont compris que l’on n’était pas une épicerie fine mais un petit commerce de proximité avec 80% de produits frais et locaux, légumes, viandes et fromages à des prix tout à fait corrects. J’espère que désormais, malgré le déconfinement ils vont continuer à venir chez nous, cela me permettra aussi de travailler davantage !"

Nous avons mis en place une organisation et des gestes barrières que l’on va conserver pendant le déconfinement. Je pense qu’il faut être encore plus vigilant pendant cette période, même si nous ne sommes pas dans une zone à risque, le danger de contamination est toujours présent car les gens vont se relâcher un peu. Je n’ai pas envie de revivre le confinement.

Des bénévoles investis

Aujourd’hui Isabelle, bénévole, est à la caisse. En temps normal elle n'effectue qu'une fois par mois une permanence à l'épicerie. Ortophoniste de profession et contrainte avec la crise de coronavirus de fermer son cabinet, elle a eu plus de temps et s’est davantage investie : "On a beaucoup donné pendant le confinement, il y a eu une belle énergie, c’est comme ça quelle fonctionne cette épicerie."
 

Pendant le confinement, je soupçonnais même les gens de venir faire leur course, malgré la queue, juste pour discuter, prendre une bouffée d’oxygène, un peu de liberté. L’épicerie est plus que jamais un pôle de vie, je ne veux pas croire que cela va s’arrêter avec le déconfinement, il y a de nouveaux bénévoles et de nouveaux clients. Et puis je suis orthophoniste et c’est une lourde charge mentale pour moi de rouvrir mon cabinet, c’est le flou total, m’investir dans l’épicerie m’a aussi aidé à moins stresser.


Martine Lamarque est bénévole et membre du conseil d’administration de l’association. Aujourd'hui elle fait ses courses et en profite pour discuter à l'extérieur de l'épicerie. Retraitée depuis un an cette ancienne directrice d’école ne manque pas de dynamisme. 


Travailler à l’épicerie m’a permis de rester active pendant le confinement, de me sentir utile. On a préparé les paniers commandés tous les après-midi en arrière boutique, on a répondu aux besoins de proximité des personnes isolées et âgées et entre bénévole cela a crée une dynamique, c’est du carburant, que du bonheur, une belle expérience.
Ça a créé entre nous un lien très fort, sincère qui je suis sûre va perdurer.

Un lieu de vie pour la clientèle

Pour Réjeanne pendant le confinement, l'épicerie était l'un des seuls points de rencontre et d’échange dans le village. 

Roselyne est retraitée, c’est une habituée des lieux.

Dans la journée on voit personne, c’est un village dortoir et avec le confinement c'était très dur à vivre. L’épicerie c’est super, ça fait de l’ambiance, on peut discuter, j’espère qu’avec le déconfinement ça va aussi ouvrir le matin, ça crée de la vie.

Geneviève habite Fourquevaux depuis 30 ans. Elle aussi attend patiemment son tour dans la file d’attente à l’extérieur de l'épicerie :

C’est très bien organisé et les produits sont frais et de grande qualité. Il y a longtemps que j’ai pris conscience de la nécessité de consommer des produits locaux, les supermarchés ont fait leur temps, il faut acheter des produits bio et privilégier les circuits-courts. Dans le contexte actuel, le concept de cette épicerie prend tout son sens.

Le déconfinement et des projets

Pour la présidente, Carole Featherstone : " C’est une véritable éclosion, l’épicerie a pris tout son sens. Avec une vingtaine de  bénévoles on a travaillé comme des dingues. Il a fallu s’organiser, tous les après-midi, on confectionnait les paniers commandés et ensuite on a assuré l’ouverture de l’épicerie, les livraisons, la mise en rayon, commander et récupérer les produits, gérer les stocks, l’informatique, le nettoyage… un gros travail. Heureusement, certains bénévoles étaient au chômage partiel, ils ont pu s’investir à fond. On a eu aussi le soutien de nouveaux membres inscrits à l’association, des personnes qui du fait du confinement avaient plus du temps et du coup nous ont accompagné, cela nous a bien aidé.
Et puis on a eu une nouvelle clientèle, des gens des villages alentours ont fait leur courses chez nous, des habitants d’ Odars, de Labastide Beauvoir, de Sainte Foy d’Aigrefeuille, Préserville, Auzielle… on a vraiment été utile pour tous ces gens qui ont découvert notre concept, j’espère que l’on va conserver une partie de cette clientèle."

"On a multiplié par trois notre chiffre d’affaires, aujourd’hui il est toujours deux fois supérieur à la normale et il devrait baisser ou se stabiliser avec le déconfinement. On a forcément davantage de trésorerie, on va donc l'utiliser en partie pour acheter des réfrigérateurs plus performants et moins énergivores, en profiter aussi pour améliorer le rayonnage.
On a fait un carton avec la préparation sur commande et la livraison à domicile. Avec le déconfinement les personnes vont sûrement retourner dans les grandes surfaces, pour le moment on va maintenir des livraisons deux jours par semaine, on va s’adapter à la demande.
Enfin, Lisiane notre salariée actuellement en temps partiel à 24 heures par semaine devrait passer à 28 heures ! On réfléchit aussi à élargir les heures d’ouvertures mais tout cela reste fragile, il faut rester prudent
."

Le déconfinement démarre à peine, même si le dynamisme et l'entraide demeurent au sein du village, le monde d'avant n'existe plus et le sentiment d'inquiétude est palpable. Pour le moment l'épicerie ne change pas son mode de fonctionnement instauré depuis le début de la crise sanitaire. Lisiane, elle rêve à des jours meilleurs : 

Le plus dur pour moi ce n'est pas le virus mais la distance humaine, le manque de contact humain avec ma clientèle. Avec la charge de travail j’ai beaucoup moins de temps pour discuter avec eux et cela me manque, c’est la base de mon métier. Il me tarde de leur faire la bise et de serrer à nouveau dans mes bras des clientes que j’aime beaucoup.

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