La France sort d'une vague de chaleur exceptionnelle, comparable à celle historique de 2003 pour le sud du pays, avec des dizaines de records de températures battus et plusieurs journées consécutives au-dessus de 40°C. Une situation inédite si tard dans l'été, conséquence annoncée du réchauffement climatique.
Le pays a connu de lundi à jeudi ses quatre journées les plus chaudes jamais enregistrées après un 15 août, selon l'indicateur thermique national (moyenne quotidienne sur 30 stations météorologiques représentatives de métropole et de Corse) qui a culminé jeudi à 27,8°C. "Il est incontestable que ce qu'on est en train de vivre actuellement est un phénomène qui est déjà un marqueur du changement climatique", pour Lauriane Batté, climatologue de Météo-France.
La plus tardive parmi les pires canicules
Le bilan de cette vague de chaleur entamée le 17 août au niveau national et sur le point de se conclure sera établi par Météo-France après le week-end.
Il est déjà certain que cet épisode de huit jours environ n'égalera pas les trois semaines de 2006, ni les deux semaines de la canicule de 2003, la plus intense à ce jour, ni même les records de celle de 2019 (journée la plus chaude nationale à 29,4°C de moyenne et record national avec 46°C à Vérargues, dans l'Hérault).Mais 2023 s'inscrira bien dans les sommets des annales. D'abord pour son caractère tardif: depuis 1947, seulement sept vagues de chaleur ont été mesurées en France après un 15 août, toutes au XXIe siècle. Et celle de2023 est nettement la plus sévère de ces dernières.
"Les simulations" du climat futur, compte tenu de la poursuite des émissions de gaz à effet de serre par l'humanité, "montrent une probabilité accrue d'avoir des vagues de chaleur en début et en fin d'été", souligne Mme Batté. De fait, la plus précoce des vagues de chaleurs a été observée récemment, du 15 au 19 juin 2022. Or avant 1989, les vagues de chaleur se produisaient une fois tous les cinq ans en moyenne. Depuis 2000, elles reviennent chaque année.
Nombreux records absolus dans le Sud
Si 2023 n'est pas la pire canicule toutes périodes confondues, c'est aussi parce que le tiers nord du pays a été relativement épargné, avec des températures parfois élevées mais non caniculaires. Au sud d'un axe Vendée-Alsace, où s'est stabilisé le "dôme de chaleur", des dizaines de records historiques, souvent de 2003, sont en revanche tombées: 43,2°C à Carcassonne, 42,4°C à Toulouse, 42,6°C à Auch, 42,7°C à Orange ou 41,4°C à Lyon-Bron."Cette période, avec des maximales dépassants 40°C notamment, est comparable dans le Sud-Est puis le Sud-Ouest aux températures relevées lors des canicules historiques d’août 2003 et juin 2019", notait Météo-France jeudi. Le seuil de 40°C, mesuré une seule fois dans les années 60 et une seule fois dans la décennie suivante, est désormais fréquent. Il a "été dépassé 4 jours consécutifs à Carcassonne, comparable à mi-août 2003" ainsi qu'à Carpentras et Orange (Vaucluse).
Nuits chaudes et vigilance rouge
Mais la gravité d'une canicule se mesure aussi en observant les températures minimales, quand la fraîcheur de la nuit est censée régénérer les organismes éprouvés."Les nuits ont été extrêmement chaudes" dans le Sud "avec des températures se maintenant bien au-dessus de 25 °C comme à Nice, Menton, Narbonne, Toulouse ou Bordeaux" sur plusieurs jours consécutifs. Menton a ainsi établi un record national de minimale à 30,4°C. Jusqu'à 19 départements ont dû être placés en vigilance rouge, plus haut niveau d'alerte, activé seulement pour la 6e fois à cause d'une canicule et jamais avant
2019.
Nouveau climat
Une "étude d'attribution" devra encore mesurer l'influence exacte du réchauffement climatique d'origine humaine sur cet épisode caniculaire, dont les caractéristiques correspondent aux modèles climatiques. Ceux-ci prévoient notamment que le réchauffement s'intensifie plus encore dans les régions déjà chaudes de France, à commencer par le pourtour méditerranéen et la vallée du Rhône ainsi que celle de la Garonne. Quelle que soit l'évolution des émissions de gaz à effet de serre, le nombre de jours de vagues de chaleur ou de canicules devrait doubler en France d'ici la fin du siècle dans un scénario optimiste, et même être multipliés par 3 ou 4 si le rythme actuel des émissions se poursuit.