ENTRETIEN. "La sociologie est une science qui dérange" : 1300 chercheurs attendus au congrès de l'AFS en 2025

En prévision du onzième congrès de l'Association française de sociologie à Toulouse en 2025, la sociologue Marianne Blanchard de l'université Toulouse - Jean Jaurès revient sur le choix de la Ville rose pour l'événement et les inquiétudes des professionnels sur l’avenir du métier.

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Le onzième congrès de l'Association française de sociologie se tiendra à Toulouse du 7 juillet 2025 au 11 juillet 2025.

L'occasion pour près de 1300 sociologues de se réunir autour du thème Environnement(s) et inégalités. Pour cette venue dans la Ville rose, la sociologue Marianne Blanchard de l'université Toulouse - Jean Jaurès pose un constat sur la situation actuelle de la profession et les critiques qui entourent le métier.

France 3 Occitanie : Pouvez-vous expliquer ce qu’est l'Association française de sociologie et le choix de Toulouse pour le futur congrès ?

Marianne Blanchard : C’est une association professionnelle qui rassemble plus de 1500 sociologues. Elle permet d'avoir un espace d’échange entre les acteurs du métier et constitue un lieu de défense de la profession lorsqu'il y a des attaques contre certains membres. Le congrès a lieu tous les deux ans. Nous attendons 1300 personnes pour cette édition.

Nous avons choisi Toulouse car c’est une ville importante pour la sociologie avec pas moins de quatre laboratoires. C’est également une ville très dynamique concernant les recherches sur l’environnement, notre thème pour ce congrès. Nous avons choisi ce thème car c’est un enjeu de société majeur et notre profession doit s’en saisir pour montrer que ce n’est pas uniquement un domaine qui concerne les sciences dites "dures" comme la physique. Nous voulons notamment réfléchir à la notion d’inégalité environnementale, par exemple en matière de responsabilités dans les dégradations environnementales.

France 3 Occitanie : Quel regard portez-vous sur l’avenir du métier de sociologue dans un contexte national particulier ?


Marianne Blanchard : Nous sommes inquiets au vu du contexte politique. Il suffit de voir par exemple la Hongrie depuis que Viktor Orban et l’extrême droite sont au pouvoir. Les études de genre ont été retirées des universités dans ce pays. Nous ne voulons pas vivre la même chose en France et c’est pour cela que l’association s’est positionnée contre l'extrême droite lors des dernières élections. Pour l’instant nous ne sommes pas bridés mais nous restons attentifs car il y a beaucoup d’attaques contre le soi-disant islamo-gauchisme et le "wokisme". Nous sommes une discipline qui est pointée du doigt. Pour répondre à cela, nous devons continuer à montrer que notre démarche s’appuie sur des données empiriques et défendre la liberté académique. L’arrivée de l’extrême droite est une crainte très nette pour la profession.

Plus largement, c’est toute l’université publique qui est fragilisée et qui ne cesse de se fragiliser. L’enjeu se joue aussi sur les financements. Il y a une précarisation très forte pour les jeunes chercheuses et chercheurs. Dans les derniers gouvernements, il n’y avait pas de politique ambitieuse sur l’enseignement supérieur et a fortiori sur les sciences humaines et sociales.

France 3 Occitanie : Pourquoi pensez-vous que les sociologues sont particulièrement attaqués ?

Marianne Blanchard : Il y a un fantasme autour de la discipline. Je suis sur les réseaux sociaux et il suffit que je dise qu’il fait beau pour me faire traiter de gauchiste. Mais ces critiques ne datent pas d'aujourd'hui. Le sociologue Pierre Bourdieu disait déjà que la sociologie est un sport de combat. C’est une science qui dérange car elle met en lumière les mécanismes de production des inégalités. Elle va dénoncer certains mythes comme la méritocratie par exemple. En interrogeant notre système et les rapports de domination, je pense que la critique est inhérente à l’objectif de la sociologie. Il est important de comprendre que nos travaux s'appuient sur des faits. Nous vérifions nos sources et nous combattons les fausses informations. Une opinion n’est pas la même chose qu’un résultat de recherche.

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