Léa Zanderigo, étudiante en médecine à Iaşi en Roumanie, a lancé une cagnotte pour venir en aide aux réfugiés Ukrainiens qui affluent à la frontière. Mise en place le 28 février, elle a déjà récolté plus de 7000 €.
Aider les réfugiés Ukrainiens touchés par la guerre, c'est l'action lancée par Léa Zanderigo, 22 ans et deux de ses amis, Olivia et Romain, tous trois étudiants en 3e année de médecine dans la ville de Iaşi, à l’extrême est de la Roumanie.
Originaire de Plaisance-du-Touch (Haute-Garonne) et après avoir tenté deux fois médecine en France, elle décide de partir en Roumanie et d'y continuer ses études.
En Roumanie depuis trois ans, elle suit le début du conflit avec peur et inquiétude.
Nous ne sommes qu'à trois heures de la frontière ukrainienne et à une heure de la frontière moldave, j’étais très préoccupée, ma famille aussi, mes parents voulaient que je rentre.
Léa Zanderigo, étudiante en médecine.
Mais les étudiants ne baissent pas les bras et décident de tout mettre en œuvre pour aider les réfugiés. "Des gens de mon entourage voulaient aider les Ukrainiens, mais comme ils ne sont pas en Roumanie, ils voulaient passer par moi pour acheter et donner aux réfugiés".
La cagnotte est mise en place le 28 février dans la soirée. Pari réussi en seulement une semaine puisqu'elle a déjà atteint les 7000 €. "Ça a explosé du jour au lendemain. Nos proches ont donné et ont repartagé la cagnotte et ça continue encore".
Albița, frontière Moldave
Avec l'argent récolté, les étudiants en médecine décident d'acheter des médicaments, des vêtements chauds, de la nourriture, des produits pour bébé...
Ils achètent également des sacs de couchage - les réfugiés en Moldavie attendent 9 à 10 heures dans des camps où il fait très froid -, des vêtements thermiques, des chaufferettes, puis se rendent chez un grossiste pour la nourriture et les denrées périssables. "Avec tout ça, on a fait des kits pour les distribuer aux réfugiés".
Aidés d'une vingtaine de bénévoles français et roumains, ils se rendent samedi 5 mars à Albița, à la frontière moldave. "On ne part pas seul, toujours avec un fixeur sur place, qui sait parler la langue et connaît la région", explique Léa.
Dans des vans, ils ramènent les denrées à la frontière moldave et les déposent dans un camp de réfugiés.
Nous sommes aussi allés à la rencontre des Ukrainiens qui arrivaient à pied ou en voiture, on leur donnait des sacs, du café, on les aidait.
Léa Zanderigo
Parmi ces réfugiés, beaucoup de femmes, d'enfants. Très peu d'hommes. Un choc pour la jeune femme de 22 ans. "C'est un crève-cœur car on voit ces femmes perdues, avec des enfants en bas âge. Elles nous demandent des affaires pour bébés, des couches, de l’eau, elles vont en terre inconnue, ne connaissent pas la langue..."
Une solidarité dans un climat d’insécurité
Craintifs, traumatisés, sous le choc de la situation. Des mots qui reviennent sans cesse dans la bouche de Léa. Mais la jeune fille comprend, entend la peur dans les voix et lit la détresse dans les regards de ces réfugiés ukrainiens. Des visages inquiets, des sourcils froncés lui font face.
"En allant à leur rencontre, je me suis rendue compte que ce sont des gens comme nous, avec des téléphones, des marques", raconte-t-elle, émue.
C’est d’autant plus horrible qu’on se rend compte que ça pourrait être nous dans leur situation. On ne se sent plus si intouchable.
Léa Zanderigo
Après un moment d'adaptation, et une fois la glace brisée, c'est une toute autre ambiance. "Ils sont adorables, ils ne font que nous remercier… ce sont des gens perdus. Ils ne savent pas pour combien de temps ils sont là, c’est terrible, ça m’a choquée".
De l'autre côté, les Roumains, eux aussi, sont abasourdis. Les sacs sont faits, les valises sont bouclées, les Roumains sont prêts à partir. Ils ont peur. Peur que la Russie prenne la Pologne, envahisse la Lettonie, l’Estonie, la Lituanie, peur du retour du communisme.
Tout le monde essaie de vivre normalement, mais tout le monde a peur.
Léa Zanderigo
Un climat d’insécurité plane sur le pays. Une ambiance de doute et d'inquiétude que nous décrit la jeune étudiante, mais contrebalancée par une solidarité à toute épreuve. "Les Roumains sont très solidaires, ils se mobilisent, s’arrêtent de travailler pour venir aider dans les camps, c’est incroyable ! Alors que pourtant, on dit que les peuples de l’est sont des peuples froids mais là, ils se sentent concernés. La situation les touche, ravive en eux de douloureux souvenirs."
Actions futures
Actuellement, les Ukrainiens sont pris en charge par de grosses ONG au niveau des frontières. Pour ces étudiants, le problème se situe plus loin, dans les camps de réfugiés, au niveau des villes.
De nombreux camps sortent de terre un peu partout pour accueillir les Ukrainiens, qui arrivent, de plus en plus nombreux. "Objectivement, ils ont ce qu’il faut en terme de nourriture, mais le problème se porte surtout sur les aliments pour bébés, les cartes téléphoniques, les chargeurs, les matelas, les oreillers…"
On a utilisé 1000 € de la cagnotte pour acheter une vingtaine de matelas. Les entreprises nous aident, nous font des prix. On répond aux besoins des centres de réfugiés.
Léa Zanderigo
L'université est, elle aussi, très impliquée rapporte l'étudiante : mise en place de systèmes de dons, beaucoup de contacts avec les professeurs. "Pour le moment, j’essaie de gérer mes études en parallèle mais il faut aider les Ukrainiens, donc je me concentre beaucoup là-dessus c’est vrai."