Eugénie Izard, pédopsychiatre installée à Toulouse, est interdite d’exercer pendant trois mois. Cette sanction a été prise par la chambre disciplinaire du conseil de l’ordre national des médecins. L’institution l’accuse d’avoir enfreint la déontologie.
Les années se suivent et se répètent. Depuis 2018, Eugénie Izard, une pédopsychiatre de Toulouse (Haute-Garonne) est dans le viseur du conseil national de l'ordre des médecins. Elle est accusée “d’immixtion dans les affaires de famille” et soupçonnée d’avoir enfreint le secret médical à la suite d’un signalement auprès des autorités pour soupçon de maltraitance sur un enfant. Une sanction prononcée par l’Ordre des médecins en décembre 2020, puis annulée par le Conseil d’État, avait déjà été rendue à son encontre.
“Je m’y attendais un peu”
Déjà empêchée d’exercer en 2020 durant un trimestre pour la même affaire, la voilà de nouveau sommée de suspendre ses activités après une décision rendue jeudi 26 janvier 2023. “Cette décision, je ne la comprends toujours pas”, commente Eugénie Izard. “Je m’y attendais un peu”, reconnaît toutefois l’intéressée. “Ma consoeur venait d’être condamnée, quelques jours auparavant. J'avais compris que ça allait être compliqué pour moi”.
“Maintenant, on me reproche un signalement au président du Conseil départemental de la cellule enfants en danger, qui jusque-là ne m’a jamais été reproché. J’ai écrit aux autorités compétentes pour signaler une enfant en danger ce qui selon le code pénal interdit toute poursuite sauf s’il est établi qu’il a été fait de mauvaise foi, ce qui n’est pas mon cas”, dénonce la praticienne. “C'est assez révoltant. D’une part, il y a des associations et des professionnels qui tentent vraiment de protéger les enfants. D’une autre part, il y a une institution ordinale qui nous condamne ainsi alors qu’on a juste voulu protéger des enfants”.
Si elle prend acte de la décision rendue par la chambre disciplinaire du conseil de l’Ordre, Eugénie Izard compte poursuivre ses démarches devant les tribunaux. “Je vais tenter de saisir le Conseil d’État pour tenter d’obtenir à nouveau un sursis à l'exécution”, explique la Toulousaine. Suite à cette nouvelle décision, elle s'apprête aussi à changer de conseil avant une nouvelle étape judiciaire. “Mes soutiens sont encore plus nombreux”, assure l’intéressée.
Une chambre disciplinaire "indépendante"
En Haute-Garonne, le conseil départemental de l’ordre des médecins s’aligne sur la décision rendue par la chambre disciplinaire. “Ce n’est pas nous qui décidons dans cette affaire”. commente son président, Stéphane Oustric. Comme l’explique le médecin généraliste, “c'est la chambre disciplinaire. Elle est indépendante et présidée par un magistrat, nommé par le conseil d’état ou étant membre du conseil d’État”.
Il y a des éléments qui apparaissent non conformes dans sa pratique et sur lesquels des plaignants portent un fait.
Stéphane Oustric, président du conseil départemental de l'ordre des médecins de Haute-Garonne
Dans ce dossier, le conseil départemental de l'ordre des médecins de Haute-Garonne assure s’en tenir strictement à la procédure. “Je ne la connais pas personnellement, je n’ai pas de raison d’être contre elle. À un moment donné, il y a des éléments qui apparaissent non conformes dans sa pratique et sur lesquels des plaignants portent un fait. C'est tout, pas plus pas moins”. Stéphane Oustric rappelle en ce sens qu’il n’a “pas à commenter le comportement du docteur Izard qui s'estime lésée ou je ne sais quoi”.
Jugeant que cette affaire ne doit pas occulter le rôle essentiel que jouent les praticiens non médecins et médecins auprès des victimes de violences intrafamiliales conjugales, Stéphane Oustric martelle : “je ne suis jamais content lorsqu'un médecin ne respecte pas la déontologie”.